La firme de Seattle a ouvert sa première librairie en dur, confirmant la nécessité pour les pure players d’appréhender le parcours client dans son ensemble en s’incarnant dans la vraie vie.

 Parquet au sol, rayonnages en bois, quelques sièges pour feuilleter les ouvrages… L’Amazon Books de Seattle, la première librairie en dur ouverte par le géant du e-commerce fin 2015, emprunte résolument au style de la librairie américaine traditionnelle. L’électronique en plus, en démonstration au centre du magasin avec des produits maison : Fire TV, assistant vocal Echo ou tablettes Kindle fixées à la table basse du rayon enfants. Aucun prix n’est affiché : il faut scanner un code avec son smartphone pour accéder à la page du produit, découvrir son prix – garanti similaire en ligne et en magasin – ou accéder aux commentaires des clients.

Autre particularité : seules les couvertures des livres les plus vendus ou les mieux notés sont exposées. Enfin, à la caisse, on n’accepte que les paiements par carte. Ceux qui ont un compte Amazon peuvent également choisir de recevoir le ticket de caisse par courriel.

 

L’ouverture annoncée d’un second magasin d’ici à l’été à San Diego (Californie) ne cesse d’interpeller les observateurs du marché. Pourquoi Amazon s’essaie au modèle de la librairie physique, que sa présence en ligne chamboule depuis vingt ans ?

«L’entreprise observe ainsi comment les clients réagissent tout en détectant d’autres opportunités stratégiques, avance Sucharita Mulpuru, analyste chez Forrester. La démarche est vraiment expérimentale.»

 Pour d’autres, elle révèle d’une tendance de fond à l’œuvre au royaume du digital : l’incarnation dans le monde physique. «Les marques ayant bâti leur réputation et leur identité exclusivement en ligne ressentent aujourd’hui le besoin de se rapprocher de leurs clients, de générer de la confiance et de fidéliser, analyse Antoine Burger, digital trend editor de l'agence Peclers. En ouvrant leurs propres magasins en dur, ces pure players cherchent un relais de communication plus direct avec le consommateur. Leurs boutiques incarnent l’une des applications les plus réussies d’une stratégie phygitale.»

 Les stratégies omnicanales qui s’appuient sur l’exploration du parcours d’achat intéressent certainement le géant du Web. «Amazon va probablement analyser les données sur les comportement à travers les différents canaux (en ligne ou en magasin) et tester l’effet de nouvelles techniques en magasin sur les ventes ou la satisfaction client», commente Sucharita Mulpuru.

Certains consommateurs apprécient de pouvoir manipuler les livres ou d’être conseillés pour l’utilisation des services digitaux. Inversement, le magasin est aussi une vitrine des services du site, comme l’abonnement Amazon Prime. Les deux librairies sont stratégiquement implantées dans des zones marchandes proches de campus universitaires. Le client bénéficie donc de «l’expérience Amazon au centre commercial», résume Miro Copic, expert en branding et marketing à l’université de San Diego. Pour lui, ces boutiques visent à vendre la marque dans son ensemble.

In fine, leur réussite pourrait ne pas se mesurer par les ventes, mais par le trafic généré en ligne. C’est l’avis de Sucharita Mulpuru. La longueur de la file d’attente devant la boutique de Seattle, le jour de son ouverture, indique en tout cas à quel point le concept intrigue.

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