Technologie
Absente des radars médiatiques, que devient l'impression 3D ? Si le grand public n'est pas encore prêt à passer le cap, en BtoB, la révolution est bel et bien là. Avec des technologies toujours plus variées.

En 2015, c’était la révolution de l’année. Elle faisait les gros titres, les moyens, et une bonne partie des petits. L’impression 3D était partout. «Troisième révolution industrielle» pour certains, avènement du DIY pour d’autres, ère de la personnalisation, de la collaboration entre citoyens, libération des consommateurs… L’impression 3D, c’était le nouveau pétrole. TPE, PME se sont glissées dans la brèche, mais qu’en reste-t-il aujourd’hui? Le derrick des procédés de fabrication ne fait plus vendre de journaux. Rares sont ceux qui en parlent. Le silence médiatique est assourdissant. Et pour le consommateur, la révolution n’a toujours pas eu lieu. C’est à se demander si elle existe encore!

Pourtant, selon les analystes, la technologie tient toujours ses promesses, et les tiendra encore longtemps. À l’été 2016, Xerfi estimait le marché à 4,7 milliards d’euros en 2015, et prévoyait une croissance jusqu’à 15 milliards en 2020. L’organisme International Data Corporation (IDC), sur une base plus élevée (un marché de 15,9 milliards de dollars en 2016) table sur un développement dans les mêmes proportions. Et les experts restent sur cette ligne. Diable, mais pourquoi a-t-on alors l’impression que le soufflé est retombé?

«Pour le moment, l’impression 3D n’est pas une technologie qui touche le grand public» , estime Arnault Coulet, PDG et fondateur de Fabulous, spécialiste de ce nouveau procédé. Or la plupart des médias ne s’intéresse qu’à ce qui touche Monsieur et Madame Tout-le-monde. «Il y a eu un emballement médiatique sur la révolution que ça allait apporter. On a imaginé qu’on allait tous avoir rapidement notre imprimante 3D chez nous, pour court-circuiter les industriels. Si cela arrivera peut-être un jour, ce n’est pas pour tout de suite» , prédit David-Henri Bismuth, directeur du laboratoire technologique Niji. Le problème? La valeur d’usage.

Plus accessible mais encore trop longue

«Pour le moment, les objets à imprimer sont assez restreints. En dehors de médaillons, de bijoux, de figurines… Ce sont beaucoup de petits objets décoratifs. Qui ne nécessitent pas d’investir dans la technologie», continue David-Henri Bismuth. Si les prix des imprimantes 3D sont plus accessibles –300 euros pour le premier modèle–, le procédé de fabrication demande encore du temps. «Amazon va plus vite que l’impression 3D! Quand ce sera l’inverse, on en reparlera», ajoute-t-il. N’oublions pas que fabriquer une pièce de quelques centimètres demande plusieurs heures… Sans compter l’aspect technique de la réalisation du modèle 3D.

«C’est une démarche qui ne parle pas à tout le monde», note Arnault Coulet. La «geek-attitude» n’est pas la loi du plus grand nombre. Ainsi, les contraintes sont encore beaucoup trop grandes pour que le commun des mortels passe le cap. Quel avantage à investir dans une machine dont on ne se servirait qu’occasionnellement, et pour fabriquer des petites pièces en plastique? «Même les fablabs [laboratoires de fabrication à impression 3D pour le public] sont encore vus comme trop contraignants. Et beaucoup de questions se posent aujourd’hui sur leur modèle de rentabilité», explique David-Henri Bismuth. La tendance de la personnalisation touche ici ses limites. «Les fabricants ont compris que donner le choix de quelques formes ou de la couleur suffisaient pour le moment. Les clients y trouvent leur compte», argue le spécialiste. Tous ces arguments sont autant d'obstacles au développement de l’impression 3D pour le grand public. D’ailleurs, la plupart des entreprises sur ce marché rachetées par des géants sont au point mort. Mais pour le grand public, seulement. 

De nombreuses applications en médecine

Sur le marché B to B en revanche, c’est bel et bien une tendance de fond qui ne cesse de croître. «Tous nos clients ont investi dans leur imprimante 3D. Les avantages pour les entreprises sont considérables», indique David-Henri Bismuth. Et c'est sur cette partie du marché que les investissements se concentrent. Le procédé accélère le développement des produits. Dans la grande bataille du «time-to-market» ou encore du «minimum viable product», l’impression 3D fait figure d’arme redoutable. En médecine, notamment dentaire, elle deviendra vite un standard de production pour les prothèses ou les gouttières. Car les technologies sont bien plus variées que pour le grand public. Si on lui réserve des machines qui ne travaillent que le plastique, en le faisant fondre et en l’additionnant par couches, on trouve dans le B to B des techniques bien plus valorisées. «On peut faire de l’impression 3D par frittage de métal en poudre, avec un laser, ou par injection de matériaux plus recherchés dans de la poudre de plâtre», détaille Arnault Coulet. Ce qui offre l’opportunité de fabriquer des objets bien plus qualitatifs.

«Nous travaillons pour des marques de luxe, sur des PLV ou des objets de communication», explique l’entrepreneur dont la société Fabulous, créée en 2014, emploie cinq personnes. Pour des pièces tirées à 200 exemplaires, pas besoin de moule ou de «filières» d’extrusion qui sont des pièces extrêmement coûteuses. «Elles peuvent être fabriquées à la demande», insiste le spécialiste. Donc bien plus pratique lorsqu’on a un réseau de magasins disséminés sur la planète. Dans l’ombre, l'impression 3D continue donc de progresser, à grande vitesse même. Promise à un bel avenir, en trois dimensions.  

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