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Butineur, «multitasker» et multitâche, le spectateur a un nouveau mode de consommation des médias, étant entouré d’une multitude d’écrans. Les agences médias, les diffuseurs et les annonceurs l’ont bien compris.

Un adolescent connecté sur son ordinateur portable fait ses recherches pour ses devoirs sur Internet tout en étant branché en permanence sur Facebook, en regardant parfois des vidéos sur You Tube et en répondant aux SMS sur son portable, avec la télévision en fond sonore… Sans le savoir, notre jeune cobaye excelle dans l'art du «multitasking» (l'utilisation de plusieurs écrans en simultané).

L'image relève désormais du cliché, alors que les études abondent sur ces comportements multimédias des ados, précurseurs de la consommation multiécran de demain. Le consommateur n'a jamais été autant entouré d'écrans. A l'ordinateur familial et à la télévision s'ajoutent nombre d'appareils nomades: ordinateurs portables, téléphones mobiles, lecteurs MP3 ou MP4, consoles de jeux, tablettes… Un foyer avec des enfants de 6 à 11 ans possède en moyenne dix écrans, tous niveaux sociaux confondus (Observatoire Gulli, 2008) et 73% des 12-17 ans possèdent un téléphone portable (Sofres, 2009).

Les agences médias, régies, annonceurs et diffuseurs s'intéressent de près au sujet et adaptent leurs contenus et formats en conséquence. À l'heure où les réseaux sociaux deviennent des médias complémentaires à la télévision et au mobile, les chaînes planchent d'ailleurs sur des programmes «transmédias» (lire ci-dessous).

 

Nouvelles habitudes de consommation des médias

Pour tenter de décrypter les nouveaux usages des écrans par les Français, l'agence médias Starcom et sa consœur de conseil en «communication planning» Reload, via leur panel propriétaire avec Microsoft Advertising, ont publié le 1er mars une étude intitulée «Les Nouveaux Modes de consommation des écrans».

Premier constat, la population n'a jamais été autant équipée et connectée: 67% des Français sont internautes, 17 millions de foyers sont équipés d'au moins un ordinateur, 26,6 millions d'un téléviseur, 42 millions de Français ont un téléphone mobile (32% des 15-60 ans utilisent Internet mobile) et 435 000 tablettes tactiles ont déjà été vendues en 2010.

D'où de nouvelles habitudes de consommation médias. Avec notamment la télévision à la demande («catch-up» TV), citée par 84% des interrogés (quanti panel Reload). Ce qui marquerait «la fin des frontières médias» par une «délinéarisation des contenus», selon Starcom. Par exemple, il est possible de jouer une même partie sur trois écrans distincts: ordinateur, mobile et console de jeux. L'utilisateur hiérarchise son attention sur les différents médias.

 

Offres publicitaires multiécrans

Résultat, le contenu pour les marques n'a pas la même valeur en fonction des médias. La création publicitaire devra donc se décliner de manière complémentaire sur les différents médias. «On passe d'une logique d'exposition à la publicité à une logique d'engagement du consommateur», assure Thierry Jadot, président de Starcom. Ce qu'essaient de développer les marques dans de nouveaux types de créations publicitaires, prémices de campagnes multiécrans.

En décembre dernier, Pringles (Procter & Gamble) était ainsi le premier annonceur de la page d'accueil Kinect sur les consoles de jeux Xbox 360 de Microsoft. Le spot pouvait être vu en plein écran grâce à un geste de la main. Ce procédé pourrait parfaitement être décliné sur d'autres écrans.

Chez Longchamp, l'enchaînement multiécran a permis de créer un «storytelling» autour de son nouveau produit. Le week-end du 4 mars, une publicité publiée par plusieurs quotidiens donne rendez-vous sur TF1 dimanche 5 mars en prime time… pour la seule et unique diffusion télévisée du spot publicitaire pour la collection Kate Moss for Longchamp, ensuite diffusé sur le Web.

Dans la foulée, les premières offres publicitaires multiécrans apparaissent, proposant aux annonceurs d'optimiser la répartition de leurs investissements entre Web, télévision, tablette et mobile. Depuis septembre dernier, avec son offre «1 spot 4 écrans», M6 Publicité Digital propose aux annonceurs de décliner leur campagne vidéo sur ordinateur, IPTV (télévision en direct, de rattrapage et vidéo à la demande) et TV connectées, mobile et tablette Ipad. L'offre sera élargie aux autres tablettes à partir de fin mars, assure M6. «L'annonceur peut nous adresser une seule publicité pour ces trois médias: on les adapte, elles sont maintenant cliquables, diffusées sans format Flash, pour être compatibles avec les appareils Apple et, pour l'IPTV, on les adapte en 16/9e et HD», explique Nicolas Thorin, directeur de M6 Publicité Digital. L'annonceur peut aussi connaître le taux de clics sur les publicités vidéo diffusées sur ordinateurs, mobiles et tablettes.

Certes, les appels d'offres diffusés aux agences médias ne font pas encore référence à cet aspect multiécran. «On nous demande d'intégrer la radio, la presse, la TV, le “display” et le “search”, mais nous devons aussi prendre en compte cette nouvelle consommation médias fragmentée dans nos offres», souligne Olivier Mazaron, directeur général de Group M Interaction. Le mouvement est en marche.

 

 

sous-papier
Orange veut anticiper l'arrivée du transmédia

Les programmes transmédias, dont le contenu est décliné de manière complémentaire sur plusieurs médias (TV, Internet, mobile, réseaux sociaux, etc.), s'imposent comme une des tendances audiovisuelles de demain. Un mode d'accès interactif aux contenus audiovisuels, influencé par l'univers des jeux vidéo puisque l'internaute peut incarner un personnage, choisir la suite du récit… Ce qui est le cas pour la websérie d'Arte Addict(s), un polar interactif doté d'un budget d'un million d'euros, diffusé depuis le 15 novembre dernier sur arte.tv et dont les personnages ont leurs empreintes numériques sur Facebook et Twitter.

«Etre en adéquation avec le public»

Orange s'y essaie également: en octobre dernier, le groupe a créé une structure jeux et transmédia, comprenant une cinquantaine de salariés, au sein de la direction des contenus. «Avec l'existence avérée du “multitasking”, la télévision ne suffit plus. Il faut utiliser les médias sociaux pour être en adéquation avec la consommation réelle du public», estime Jean-François Rodriguez, directeur jeu et transmédia chez Orange.

Activité encore en phase d'expérimentation, Orange s'apprête toutefois à lancer deux superproductions ce printemps: Detective Avenue, une série policière transmédia, dotée d'un budget initial de 300 000 euros, qui sera présentée le 4 avril au MIP TV, et qui s'articule autour d'une websérie de 60 épisodes. «On utilise plusieurs services télécoms, SMS surtaxés, Audiotel, géolocalisation…, et les réseaux sociaux pour disséminer des indices», explique Jean-François Rodriguez. Et pour accompagner la sortie du film en 3D The Prodigies - La Nuit des enfants-rois, prévue le 9 mai 2011, Orange lancera un jeu avec des indices à dénicher sur sept sites Web et sur Facebook. Restera à trouver un modèle économique, alors que les annonceurs hésitent encore à figurer dans de tels programmes.

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