Hybride ou électrique, la voiture verte s'inscrit progressivement dans le paysage urbain. Mais les consommateurs ne sont pas encore prêts à passer la seconde.

L'étude réalisée par la régie publicitaire en ligne Specific Media sur les consommateurs français et la voiture verte (panel représentatif de 500 personnes, septembre 2011) révèle que 90% d'entre eux envisageraient d'acheter une voiture écologique. Pourtant, seulement 15% se disent prêts à en acquérir une. Pourquoi un tel décalage? Le prix! Si 79% déclarent que l'écologie est une préoccupation sérieuse, elle n'est pas prédominante dans la décision d'achat. Etre écologique, oui, mais à moindre coût!
Attentifs à leur portefeuille, les Français raisonnent en termes de «prix d'achat» et de «coût de fonctionnement». L'idée de ne plus passer à la pompe les séduit, mais le surcoût à l'achat d'un véhicule écolo freine 74% d'entre eux. En temps de crise, le prix reste le facteur déterminant pour la majorité de la population.
Olivier Beaurain, directeur marketing de Specific Media, souligne le caractère contradictoire des données recueillies: «Tout le monde a envie d'être écologique, il y a une volonté générale d'adhérer à ce concept, mais peu de gens se renseignent et essayent un véhicule.» Et il précise: «Les consommateurs déplorent d'ailleurs le manque d'information sur le sujet, il faut avant tout faire de la pédagogie et surtout travailler sur l'image du produit.»
Selon lui, l'acte d'achat automobile est complexe car la voiture est à la fois objet de désir et de contraintes (taxes, essence, prix, bouchons, angoisses, etc.). «Pourquoi ne pas faire de la “communication image” originale comme la campagne Kia aux Etats-Unis avec ses hamsters rappeurs?», suggère-t-il. A part Renault et sa campagne amusante (imaginée par Publicis Conseil) qui replace l'électricité au cœur de la vie quotidienne, peu de publicités créatives sont consacrées aux véhicules écologiques aujourd'hui. Mais si les temps changent, les habitudes et les points de contact avec les consommateurs aussi. L'étude de Specific Media révèle que si 3 consommateurs sur 4 privilégient Internet comme source d'information en matière de véhicules verts, seulement 34% se disentréceptifs aux spots TV sur le sujet.

 

L'innovation inquiète

 

Passé le coût financier, l'un des principaux enjeux de la commercialisation du véhicule électrique à grande échelle est son alimentation en énergie. «Le manque d'autonomie, c'est anxiogène», souligne Bertrand Eyraud, rédacteur en chef du site voitureelectrique.com.
Ce dernier note une croissance constante visiteurs sur son site depuis deux ans, mais considère qu'une réelle démocratisation du véhicule électrique nécessitera encore plusieurs années. «Les principaux utilisateurs aujourd'hui sont les professionnels qui ont bien compris leur intérêt en termes de coûts d'usage et de valorisation d'image», indique-t-il. Viennent ensuite les fous de technologie ou d'innovation, puis les écologistes convaincus. L'offre ne touche pas encore réellement le grand public.
L'électrique vise une cible plutôt urbaine avec une  configuration de deux voitures par foyer: une berline thermique pour partir en vacances et une petite citadine électrique pour les déplacements quotidiens. Pourtant, le monde rural affiche un gros potentiel car le consommateur peut recharger sa batterie chez lui et n'a plus à se déplacer vers une station essence parfois éloignée du domicile.


La voiture verte, c'est l'avenir


Pour Bertrand Eyraud, la voiture électrique représentera 10 à 20 % du marché occidental en 2020, et son succès dépendra de plusieurs facteurs : l'évolution technologique (la batterie devrait atteindre au moins 500 km d'autonomie d'ici à dix ans), les politiques énergétiques et l'augmentation du prix du pétrole. Le paysage automobile du futur sera donc pluriel. Moteur à essence, diesel, hybride, électrique ou hydrogène : les consommateurs auront l'embarras du choix.
L'objectif de l'alliance Renault-Nissan, en pointe sur ce marché, est d'être leader avec 1,5 million de véhicules électriques vendus d'ici 2016. Les premières ZE (Zero Emission) du groupe franco-japonais sont apparues en 2011 avec la nouvelle Kangoo, la Fluence et la Nissan LEAF. Les modèles Zoé (type Clio) et Twizy (tandem urbain, combinaison d'un scooter trois roues et d'une Smart) rejoindront le nouveau parc automobile écologique du groupe au printemps 2012.
Le constructeur automobile, fort de son slogan «Drive the change», se positionne non seulement comme acteur de l'innovation mais aussi du changement sociétal. Le choix de Cathy et David Guetta comme ambassadeurs de la Twizy illustre la volonté de toucher la génération montante. «Nous voulions une icône forte et incontournable qui, par son énergie positive, son ancrage en France et son succès international, incarne ce basculement dans un nouveau monde», souligne Stephen Norman, directeur marketing et communication monde de Renault.
Si Renault mise tout sur l'électrique, Toyota croit, lui, en l'hybride. La marque référence en matière d'écologie, grâce au succès de la Prius, a déjà vendu 400 000 hybrides en Europe et atteindra bientôt les 4 millions au niveau mondial. Une étude prospective réalisée par le Commissariat général au développement durable en mai 2011 prédit une courbe exponentielle de ventes de véhicules hybrides, avec un coup d'accélérateur à partir de 2016. Les ventes annuelles devraient atteindre presque 500 000 hybrides en 2025 contre 200 000 pour les véhicules électriques. La voiture hybride, avec ses deux moteurs, permet en effet de rassurer les utilisateurs et d'atténuer le choc du changement. Selon cette étude, les voitures électriques et hybrides seraient à terme économiquement concurrentielles avec la voiture thermique. Si l'automobile verte demeure un marché de niche, son évolution laisse présager une vraie révolution du parc automobile. Alors, restons branchés !

 

(encadré)

 

Les jeunes, espoirs de la mobilité verte

 

Les jeunes sont-ils plus enclins à rouler vert? Sensibilisés aux questions écologiques et plus ouverts au changement, ils pourraient en devenir les premiers consommateurs. L'étude Specific Media révèle que 43% des 18-29 ans sont prêts à payer 10% de plus à l'achat. Pourtant, «ce n'est pas la cible la plus évidente», tempère Olivier Beaurain, responsable de l'étude, «ils disent être prêts à payer plus, et en même temps sont les premiers à être freinés par le prix. Ils peuvent rarement acheter un véhicule neuf, c'est une réponse un peu virtuelle.» Autolib, le dispositif de voitures électriques en libre service de Paris, constitue un bon compromis pour les jeunes qui en sont les principaux utilisateurs. Les 3 000 Bluecars du groupe Bolloré, qui devraient circuler dans l'agglomération parisienne d'ici la fin de l'année, contribueront peut-être à la familiarisation de cette nouvelle mobilité décarbonnée.

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