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A l'instar de TF1 avec sa nouvelle appli My TF1 Connect, les diffuseurs mettent la social TV au cœur de leur stratégie, anticipant le développement de la télévision connectée avec des contenus pour le second écran.

La nouvelle application My TF1 Connect, lancée le 17 janvier, a de bonnes chances de marquer les esprits chez tous ceux qui ont pris l'habitude de consulter leur tablette ou leur smatphone quand ils regardent la télévision. Via l'onglet «connect», ce second écran (avec ses bonus, coulisses ou séquences exclusives) est intégré à la diffusion en direct des programmes de TF1 en parallèle d'un fil de conversation sociale.

Surtout, une innovation, «instant replay», permet de couper trente secondes d'une émission que l'on regarde et de partager cet extrait instantanément sur Twitter ou Facebook. Une dimension «replay» dans l'instantané, tourné vers les réseaux sociaux, qui a immédiatement séduit Gilles Bouleau, le présentateur de TF1: «Tu imagines le coup de boule de Zidane!», s'est-il exclamé en interne. L'audience en serait en effet immédiatement démultipliée… et mondiale sur le site de la Une.

«Nous travaillons à faciliter l'accès à nos contenus en offrant de prolonger l'émotion qu'on veut faire partager, explique Olivier Abecassis, directeur général d'e-TF1. Les internautes décident eux-mêmes les séquences qui leur plaisent. On ne peut pas se mettre sur une posture d'audience sociale et se dire qu'on va contrôler ce qu'il s'y passe.» Avant le sport et l'information, qui disposeront de leur animation sur le second écran au printemps, la chaîne commence avec la saison 2 de The Voice, qui s'est révélé être un mastodonte en audience en 2012. L'enrichissement proposé va de «l'instant replay» au flux issu des réseaux sociaux synchronisé avec la diffusion sur le premier écran. L'idée? Que les tweets ou les réactions soient bien raccrochés à la séquence télévisée, qu'elle soit en direct ou enregistrée, et donne envie aux gens connectés – notamment les jeunes – de rejoindre l'expérience interactive.  Outre l'attrait des séquences exclusives, une dimension «gaming» se propose aussi de mieux impliquer le téléspectateur en lui offrant un cinquième siège virtuel parmi les coachs de l'émission. A charge ensuite pour l'animateur Nikos Aliagas de tenir compte de l'internaute dans le déroulé de son émission en seconde partie de soirée.

TF1, qui a enregistré 12,7 millions de tweets et compte 4,5 millions d'applications téléchargées, entend ainsi obtenir un engagement croissant de la part de ses internautes. Si les Miss France ont atteint un record de quelque 457 0000 tweets, la conversation sociale y était synchronisée par item et par miss. Seuls deux «community managers» sont nécessaires. «C'est une étape de plus dans la convergence et l'intégration des flux linéaires, enrichis par la conversation sociale, complète Laurent Solly, le directeur général de TF1 Publicité. C'est l'alliance du premier “mass media” français avec une capacité de toucher l'individu. Nous proposons de servir l'écran principal et le second écran, regardé par 54% des Français, avec une offre publicitaire pour tous les écrans qui nourrit l'espace classique et crée un marché supplémentaire.»

La régie propose ainsi aux marques de devenir partenaire du «5e coach», d'être présent sur le second écran via un format display, d'adresser un jeu et un formulaire d'inscription pendant la coupure publicitaire de The Voice ou encore d'apparaître en spot post-roll de «l'instant replay».

Agrégation et enrichissement

TF1 n'est bien sûr pas le seul groupe à faire du second écran un enjeu stratégique. CBS aux Etats-Unis ou Pro Sieben en Allemagne proposent aussi d'agréger l'e-conversation sociale autour de leurs programmes via des onglets de télévision connectée (interaction avec les animateurs, contenus enrichis, programmes en temps réel par synchronisation des écrans, voire séries en avant-première).

En France, M6 a lancé en juillet l'option «Devant ma TV», intégrée à ses applications (4,4 millions téléchargées pour la chaîne, 2,7 millions pour W9 et 108 000 pour 6 Ter). Le groupe compte depuis deux mois cinq à six émissions qui proposent un enrichissement pour le second écran. «Dès lors que la pédagogie est faite, on peut imaginer un dispositif enrichi, observe Valéry Gerfaud, directeur général de M6 Web. Ce qui fonctionne le mieux, c'est quand on propose de donner son avis.»

Pour La France a un incroyable talent, un sondage invite ainsi l'internaute à se substituer au jury, et des éléments comme la «vanne d'or» sont même repris dans l'émission. Coulisses, jeux, consultations des internautes…, depuis novembre, les contenus complémentaires et interactifs sont progressivement mis en avant. Et se révèlent vite engageants: «Pour les gens qui synchronisent l'application, la part de ceux qui interagissent est très importante par rapport à ceux qui tweetent», souligne Valéry Gerfaud.

La chaîne peut développer une approche spécifique en direction des annonceurs, comme des épisodes inédits d'émissions de M6 proposés en même temps qu'un spot Orange. Le prochain Top chef sera aussi l'occasion de développer des dispositifs complémentaires pour le second écran du type «pré-roll» (spot avant la vidéo). Les secteurs interdits de publicité TV classique (cinéma, livre…) peuvent y trouver leur place... alors que l'internaute est riche en «data» (données).

Le flux des contributeurs en temps réel

Du côté de France Télévisions, Philippe Bourquin, directeur de la TV connectée, rappelle que le groupe public a déjà plusieurs briques d'expérience à son actif. Au-delà de l'émission Mots croisés, qui a remplacé les SMS par une sélection de réactions issues des réseaux sociaux, branchés en permanence et intégrés à l'animation, France Télévisions s'est associé à la plate-forme d'observation Mesagraph pour mesurer l'engagement des communautés à l'intérieur de Pluzz, son service de télévision de rattrapage.

Pour Média le magazine ou La Grande Battle, une web-application est connectable de façon à permettre l'organisation en temps réel du flux des contributeurs et à permettre l'enrichissement par des contenus additionnels. «L'idée est de généraliser cette approche de façon assez rapide», indique Philippe Bourquin. Avant la fin janvier, le groupe passera à la vitesse supérieure avec l'appli C à vous:«Ce sera la première fois que l'on fera de la synchronisation en direct», dit-il. Le chroniqueur Matthieu Noël engagera les internautes à lui suggérer sa prochaine tête de Turc pendant que la recette d'un bon plat mijoté sera proposée sur le second écran. Il sera même possible d'acheter en ligne les ingrédients: «On pourra constituer son panier chez un partenaire avec les bons conditionnements.» Idem pour la musique.

Le récent Consumer Electronics Show de Las Vegas, qui comprenait un «Second Sreen Summit», estime ce nouvel écosystème à 400 millions de dollars aujourd'hui et à 6 milliards en 2017. Selon Eric Scherer, directeur de la prospective de France Télévisions, les trois quarts des Américains consultent déjà un autre écran quand ils regardent la télévision, et 40% le font tous les jours. Dans 20% des cas, c'est déjà pour faire des courses en ligne…

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