Le marketing à la performance ouvre des perspectives inédites de recherche mêlant connaissance des consommateurs et intelligence artificielle.

Longtemps polarisé sur le taux de clic, le marketing à la performance propose aujourd'hui des modèles de mesure et donc de rémunération de plus en plus nombreux et de plus en plus fins. Mais cette multiplication des expertises a rendu le modèle économique de la performance extrêmement complexe. Comment mesurer de manière probante et objective la contribution respective de chacun des leviers? Comment rémunérer les différents acteurs, sans concentrer la rétribution globale de la performance sur le denier clic?

«Une approche fragmentée des techniques est préjudiciable au ROI[retour sur investissement] de campagnes de plus en plus combinatoires. Aujourd'hui, on est donc obligé de maîtriser l'ensemble des expertises pour pouvoir optimiser le potentiel de performance de chacune d'entre elles», soutient Olivier Mazeron, président de Group M Interaction. Mais rien de moins aisé. Séparer le bon grain de l'ivraie dans une nébuleuse extrêmement composite, atomisée, régulièrement investie par de nouvelles offres et technologies s'apparente pour les annonceurs à un vrai casse-tête.

Le marketing à la performance regroupe trois grandes familles d'intervenants: les agences «pure players» indépendantes, aujourd'hui fortement «challengées» voire avalées par les grands groupes médias; les acteurs intermédiaires plus ou moins spécialisés (plates-formes d'affiliation, retargeteurs, trading desk indépendants) et les sociétés spécialisées dans le search, en plus grande difficulté. Or, ce marché est voué à une double évolution structurelle.

Un marché jeune

Comme tous les secteurs en croissance rapide fondés sur l'émulation technologique, il ne fera pas l'économie d'un mouvement de concentration capitalistique. Mais il devrait également, à la marge, voir essaimer une galaxie d'acteurs hyperspécialistes ou hyperinnovants. «Le secteur de la performance est plein de potentiels. Il y a un marché pour l'invention de nouveaux leviers, de combinaisons innovantes, de modèles inédits de mesure», soutient Dan Posalski, cofondateur et PDG de Black Angus, start-up strasbourgeoise créée en décembre 2013 par des experts du digital (chefs de projets, développeurs et consultants) qui vient de lancer Houm.us, première plate-forme de mesure de l'audience du hashtag.

«La performance est un marché jeune où l'expertise technique a encore beaucoup à prouver», corrobore Romulus Grigoras, patron de Devatics, société toulousaine fondée en 2010 par trois enseignants chercheurs de l'Institut national polytechnique (INP Toulouse). Forts de dix ans de R&D en intelligence artificielle, ils ont lancé en 2013 Second Skin, une solution en temps réel permettant de détecter les internautes ayant une forte probabilité d'abandon de panier et d'adapter la réponse en fonction du comportement: recommandation produit par l'envoi de promotion ciblée, relance de panier ou de produit abandonné, envoi de questionnaire, «click & collect» (suggestions de proposition de vente au vendeur en magasin, sur la base des informations de navigation de l'internaute)… Parmi les premiers annonceurs adeptes de Second Skin: Bouygues Telecom, Maty et Comtesse du Barry.

La crédibilité passe par la recherche techno

La recherche scientifique est également un enjeu de crédibilité pour les acteurs plus historiques du marché. Agence intégrée au groupe Wunderman (WPP) et spécialisée dans l'e-mailing à la performance, Predictys dispose d'une base de données de 140 millions de consommateurs et revendique plus de 1 000 clients référencés entre l'Europe, les Etats-Unis et l'Amérique du Sud. «L'agence a mis au point avec PACTE, une équipe de recherche issue du CNRS, une plate-forme technologique propriétaire analysant les comportements des internautes avec plus de 1 000 critères, en temps réel», annonce Nathalie Quinette, présidente de Predictys.

Et d'évidence, la recherche technologique en matière de performance ne devrait pas s'arrêter en si bon chemin. «La donnée collectée à partir des objets connectés constitue sans doute une révolution plus majeure encore que celle du CRM. Elle va permettre de connecter les marques à un niveau extrême de granularité du parcours de consommation. Et cette révolution va venir beaucoup plus vite qu'on ne le pense», avance Olivier Mazeron.

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