Ils sont partout ou presque et ont vocation à être au service de la relation client. S’ils apportent une touche ludique à l’expérience consommateur, les écrans constituent également un outil de conseil et d’aide à la vente.

Dès l’entrée, les vitrines classiques ont laissé place à des écrans dernière génération. À l’intérieur, un miroir « Moi en mieux » permet de se maquiller virtuellement. Un peu plus loin, un Ipad composé d’une application de diagnostic, « Ma peau en mieux », est mis à disposition des clients pour les aider à trouver le soin le plus adapté à leur besoin. Nous sommes dans le magasin pilote « Une heure pour soi » du réseau de parfumeries Leclerc, ouvert à Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher) en mars dernier.


Plus d’une dizaine de points de vente, sur la centaine que compte l’enseigne, seront réaménagés de la sorte d’ici à fin 2014. Innover et bousculer les codes du marché, tels sont les objectifs que s’est fixés Édouard Leclerc, qui a fait appel à l’expertise de Market Value, une agence spécialisée dans la stratégie de marque et le retail design. « Les écrans permettent à l’enseigne comme aux marques de cosmétique de communiquer. Ils ont à la fois un côté ludique tout en étant des outils de conseil et d’aide à la vente. Le parcours client est ainsi enrichi grâce à l’expérience digitale », explique Philippe de Mareilhac, CEO de Market Value.


Édouard Leclerc n’est pas le seul à travailler sur le sujet. Les écrans envahissent les magasins. Eram, Desigual, Etam, Relay, Laforêt, Nespresso, SNCF ou encore Citybank, les marques, quel que soit le secteur, ont introduit la vidéo dans leurs boutiques. Même les centres commerciaux s’y mettent, à l’image du Qwartz de Villeneuve-la-Garenne (Hauts-de-Seine), entièrement orienté « digital shopper ». Ce dernier comprend une « cité » e-commerce composée de bornes interactives, une application pour se géolocaliser et se repérer dans le centre commercial, une aire de jeux interactifs pour les enfants, etc.


Surfaces vivantes


« L’évolution technologique ouvre de nouvelles façons de composer l’espace. On parle moins d’écrans et plus de surfaces vivantes », analyse Christian de Bergh, directeur général retail branding de Dragon rouge. L’agence de design a notamment conçu le premier point de vente Samsung à Paris, boulevard Malesherbes (8e), en 2013. « Après avoir introduit des corners chez les distributeurs, la marque expérimente l’expérience client digitalisée sur 170 mètres carrés. Ce flagship comprend des murs d’écrans dynamiques et un tunnel de LED », décrit Christian de Bergh.Les écrans ont plusieurs vocations, selon leur disposition dans le magasin. Placés en vitrine, ils attirent les piétons en zone de chalandise, l’animation des images lumineuses captant le regard des passants pour leur donner envie d’entrer dans la boutique.


L’enseigne de cavistes Nicolas teste en ce moment des vidéos dans les vitrines de quatre de ses points de vente. Elles présentent l’univers et les produits (vins et spiritueux) de la marque. Ce dispositif audiovisuel a été installé par Publicis Shopper. L’agence, spécialisée dans l’expérience client connectée, a également imaginé des vitrines interactives pour Orange, à l’occasion de plusieurs campagnes publicitaires, comme au moment de Noël et en mai dernier à Lille. Ces deux dernières actions invitaient les piétons au jeu, soit via leur smartphone, soit avec leurs propres corps devant l’écran, celui-ci interagissant grâce à une caméra de reconnaissance des mouvements. Le but ? Attirer un maximum de gens devant les boutiques Orange et leur faire gagner des cadeaux pour qu’ils entrent à l’intérieur des points de vente. « Nous avons eu de très bons retours qualitatifs à la suite de ces campagnes. La vidéo permet de transmettre des émotions, de capter l’attention et la curiosité des chalands », confie Valérie Piotte, directrice générale de Publicis Shopper.


Pour Jean-Philippe Chavatte, directeur général de l’agence Carré noir : « Si l’on n’a pas encore réussi la digitalisation des points de vente, notamment côté technologique, on peut réussir le contenu des écrans. Il s’agit de proposer des informations récentes – dernières campagnes, nouveautés, etc. – et de capitaliser sur le « storytelling ». Grâce aux écrans, on peut en effet raconter de nouvelles histoires en permanence. »  Carré noir a ainsi appliqué ces préceptes pour ses clients André et Pimkie, deux enseignes qui expérimentent la vidéo en magasin depuis début 2014.


Autre problématique de contenu pour l’enseigne de restauration rapide KFC, qui travaille actuellement avec l’agence AKDV pour installer des écrans dans ses points de vente et de consommation. « Nous prenons en compte plusieurs facteurs : le conseil des clients, l’ambiance du lieu, l’aide à la vente, via des bornes interactives et grâce à une application mobile pour les commandes, et la découverte des produits, avec des contenus informatifs intéressants », indique François Hannebicque, cofondateur et directeur de création d’AKDV. Pour lui, « la vidéo doit impressionner les clients, habitués à l’image HD et aux home cinémas. C’est pourquoi le contenu, la taille ou le format de l’écran doivent être extraordinaires. »


Certaines marques l’ont bien compris. En Italie, Louis Vuitton a installé un escalier-écran qui diffuse du contenu interactif. À Londres, l’écran géant du flagship de Burberry projette des concerts live. Dans le centre commercial So Ouest de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), Hollister retransmet des images de surfeurs sur l’eau en temps réel sur écran géant grâce à des webcams branchées 24 heures sur 24. Aux Champs-Élysées, le navire amiral Citroën indique sur un écran les commentaires publiés dans les réseaux sociaux de la marque. Mille et une options sont possibles grâce aux écrans. Les marques l’ont bien compris.
Reste, comme le souligne François Hannebicque, qu’il ne faut pas oublier que « l’écran doit être au service de la relation client ». Pour Henri Danzin, cofondateur et coprésident de l’agence Oyez, cela fait dix ans que les points de vente introduisent des écrans non interactifs en leur sein, et il n’existe toujours pas de modèle économique. « Le retour sur investissement (ROI), tout comme le bénéfice de ces installations, est difficile à évaluer.

A contrario, les écrans interactifs, qui se sont multipliés récemment dans les points de vente grâce à la baisse de leurs coûts, offrent un certain nombre de mesures et de statistiques très riches pour les enseignes. Et surtout, les écrans interactifs apportent une réelle valeur ajoutée à l’expérience consommateur et à la relation client. » Oyez a ainsi accompagné la stratégie digitale de Darty pour incarner un nouveau modèle de magasin, baptisé le « connected store ». L’agence a tout d’abord introduit des bornes interactives destinées à guider le client et offrir un accès à tout le catalogue du distributeur et des services associés. Elles informent­ instantanément sur la disponibilité d’un produit in situ et facilitent la mise en relation avec les vendeurs, qui récupèrent le panier établi sur la borne pour finaliser l’achat. Ensuite, des tablettes sont à la disposition de ces derniers, qui donnent également accès au catalogue des produits et services Darty, aux paniers et à l’historique d’achat Web des clients. Elles sont reliées aux contenus argumentaires de vente projetés sur un grand écran et, enfin, elles facilitent le paiement.


Résultat : l’expérience client est enrichie, le parcours du consommateur est fluidifié jusqu’au paiement. L’accompagnement du client se fait sur mesure, entre autonomie via les bornes et aide d’un vendeur nanti d’un support digital si besoin. Ce dispositif a été lancé en 2013 dans neuf magasins Darty. Suite au succès de ces boutiques pilotes, il est progressivement déployé à l’ensemble du réseau. « La réussite de cette opération « connected store » de Darty tient aussi dans l’implication de chaque salarié de l’enseigne. Ce genre de dispositif demande un investissement financier à long terme mais nécessite surtout une réorganisation complète de l’entreprise », indique le coprésident d’Oyez. De la sorte, le responsable marketing peut, par exemple, proposer des nouveaux contenus vidéos au responsable des bornes pour diffuser des campagnes en temps réel. Justement, le contenu passant sur les écrans situés dans les points de vente joue un rôle stratégique et déterminant.

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