Talent à suivre
Adepte du street art, il invente un nouveau genre en peignant entre ses murs. Ses œuvres, mélange de réalité et fiction, offrent un autre regard sur le monde extérieur.

Il a de la peinture partout sur les doigts, mais ses murs, eux, sont intacts. Bienvenue dans l’antre de Jisbar. Dans son atelier, une reproduction de Klimt vient à peine d’être terminée, La Jeune Fille à la perle de Vermeer rayonne mais n’est pas encore « salie » par la touche street, alors que La Création d’Adam de Michel-Ange, cachée au fond, n’est encore qu’à l'état de brouillon : « Je reprends des œuvres connues et je les réapproprie à ma sauce ». Quand il ne s'attaque pas à de grands artistes, Jisbar réinterprète les cartoons et les super-héros qui ont marqué son enfance. Une fois le personnage dessiné, ses toiles deviennent un exutoire où il jette tout ce qui lui passe par la tête : «Si aux 20 heures on parle d’une pénurie d’essence, j’écrirai Esso, si je regarde un documentaire sur les extra-terrestres, j’inscrirai UFO », s'amuse Jisbar. Jamais en panne d’inspiration, ce pop/street artist ne se range pas dans une case : «Je m’inspire du mouvement pop art pour les couleurs flashy, l’iconographie et du mouvement street art pour les messages plus engagés », explique-t-il.

Graffitis de luxe

Tout est parti de Norman en 2010. Le youtubeur aux 10 millions d’abonnés a été le premier client de Jisbar en acquérant sa toile Jeffrey. Dès lors tout s’enchaîne, les premières galeries, les premières ventes et même les collaborations avec les marques. Ces dernières le sollicitent pour « customiser » leurs produits comme la célèbre marque de chaussures de luxe J.M. Weston, la maison de costumes Rives, les pantalons pour homme LePantalon, le collectif ArtPilo… « C’est gagnant-gagnant, les enseignes montrent qu’elles sont modernes et moi, que je m'implante dans le milieu ». Jisbar a seulement 28 ans mais ses œuvres ont déjà parcouru le monde : Malmö, Abu Dhabi, Santa Cruz, Londres... Prochaine étape, les biennales de Venise et de Luxembourg.

«Finalement j’ai un parcours plus que classique», souligne Jisbar. Dans le cheminement certes, mais dans la formation moins. Plus jeune, il se destinait à être vendeur d’art, «jusqu’au jour où on m’a demandé d’effectuer un SWOT [outil de stratégie d'entreprise] », grince l'artiste. Lequel n'est pas étranger au milieu, puisque c’est auprès de sa mère qu’il a appris à peindre. Il avoue avoir connu un certain nombre de ratés avant de créer un univers reconnaissable, univers qu’il partage désormais à travers son compte Instagram, « un formidable outil de reconnaissance mondiale ». Habitué à travailler sur cinq ou six toiles en même temps, cet autodidacte ne s’accorde jamais de pause : « Si je ne peins pas, je m’emmerde. »

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