Le marketing à l'assaut de la 3D

Visualiser des images en 3D (trois dimensions) n'est plus du domaine de l'innovation. Et pourtant : très présente sur les écrans des nouveaux médias (Internet, mobile, PDA), cette technologie n'a pas encore franchi le territoire du marketing. Mais grâce à la démocratisation des usages multimédias des consommateurs, la 3D devrait faire son apparition dans un avenir très proche dans le marketing. Maurice Lévy, le président de Publicis Groupe, en a déjà fait le pari. En 2007, il a lancé avec Dassault Systèmes, numéro un mondial des logiciels utilisant cette technologie, une coentreprise baptisée 3D Swym. Son but : mettre les outils de conception 3D entre les mains des consommateurs pour qu'ils imaginent, transforment et créent un magasin, un produit ou un emballage. Les exemples de ce type ne sont pas légion car l'histoire de cette technologie sur les nouveaux écrans trouve son origine loin du marketing.

Il y a trois ans, les premières applications 3D sur téléphone mobile ont fait leur apparition dans les jeux vidéo. L'idée : développer sur le mobile une expérience de jeu aussi proche que possible de celle que l'on trouve sur un ordinateur. La société Gameloft figure parmi les précurseurs. « La 3D offre une qualité d'image, une profondeur de jeu incroyable et des fonctionnalités supplémentaires, pour les jeux de courses notamment », explique Cyril Guilleminot, responsable France de Gameloft. Séduite par le phénomène, la marque Tag Heuer a lancé dès 2004 son jeu mobile Indy 500 Challenge. « Le jeu met en scène une course de Formule 1. Avoir recours à une interface de jeu en 3D, cela donne de Tag Heuer une image très innovante », indique Florian Lang, directeur de l'agence-conseil en communication interactive Kassius, qui a conçu le jeu. Mais les marques, hors celles du secteur des jeux vidéo ou souhaitant s'appuyer sur ceux-ci, n'ont pas été très nombreuses à s'investir dans le domaine.

Premier signe annonciateur du prochain envol de cette technologie : le développement du parc de téléphones mobiles multimédias. « Le nombre d'utilisateurs équipés en portables pouvant lire la 3D n'est plus du tout anecdotique aujourd'hui et il ne cesse de grandir », précise Cyril Guilleminot. Le premier frein technique près d'être dépassé, la technologie 3D sur mobile devrait donc figurer en bonne place dans les outils marketing à disposition des annonceurs. « Attention, faire de la 3D pour de la 3D n'a pas de sens, prévient Florian Lang. Cette technologie doit d'abord servir à apporter un service au consommateur. La pertinence du message, c'est la priorité essentielle du marketing mobile. »

Couplage 3D-GPS

Visualiser une simple vidéo en 3D n'a certes plus rien de révolutionnaire pour les terminaux dernière génération des constructeurs, tels Nokia et Sony Ericsson. « Pour séduire le " mobinaute ", les annonceurs devront en effet lui proposer d'interagir avec un objet 3D sur son mobile, estime Antoine Levêque, directeur général de Marvellous France (ex-Aerodeon), agence de marketing mobile du réseau Isobar. Cette technologie prendra toute sa force si elle est couplée au système GPS par exemple. » Scénario futur d'un tel mélange technologique : vous vous promenez dans un quartier de Paris et vous tombez sous le charme de ses rues. Via le GPS de votre mobile, vous vous localisez à cet endroit et vous obtenez instantanément la liste des appartements disponibles dans ce quartier. Grâce à la 3D, vous pouvez même en faire la visite virtuelle (vues à 360° ou déplacements dans l'appartement). « Il s'agit d'un avenir vraiment proche grâce à des outils déjà existants, comme le logiciel Google Maps et sa fonction 3D sur le mobile », ajoute Antoine Levêque. Nous entrons là de plain-pied dans ce que l'on appelle déjà la publicité « géocontextualisée » : le service apporté au consommateur devient une « publicité » en soi et l'annonceur, client de Google, est l'agent immobilier... Sur Internet, des services de ce type commencent à apparaître. Ainsi, l'agence de marketing touristique DDB Tourism&Travel a utilisé la 3D pour son client, le ministère du Tourisme égyptien. Depuis novembre 2007, celui-ci propose, dans le site L'Égypte vue du ciel (www.earth.egypt.travel/), une « plongée informative » en 3D dans les hauts lieux du pays grâce à l'utilisation du logiciel Google Earth. Une information-service entièrement gratuite qui montre le champ des (désormais) possibles sur le téléphone portable.

Autre association technologique intéressante : la 3D et la reconnaissance d'image via les téléphones portables. Vous filmez, via votre téléphone, la publicité d'une voiture dans un magazine. Sur l'écran de votre mobile, la voiture en question apparaît en 3D. Vous pouvez en changer la couleur, la faire pivoter, ouvrir ses portes ou entrer dans l'habitacle en rapprochant votre mobile de la publicité. Cerise sur le gâteau : il est possible d'être immédiatement mis en relation avec un conseiller virtuel 3D qui répondra à toutes vos questions sur le nouveau modèle. Ce scénario n'a absolument rien de futuriste : le fabricant finlandais Nokia travaille sur un projet de ce type, intitulé Mara (Mobile Augmented Reality Applications). Il mise sur une « réalité augmentée » qui mêle les mondes réel et numérique grâce au capteur photographique des téléphones. L'objectif est d'identifier des objets ou des bâtiments vus à travers l'écran du terminal mobile. Une fois le lieu repéré (musée, hôtel, bouche de métro, etc.), le logiciel affiche sur l'écran du téléphone une information correspondante, laissant le choix d'accéder ou pas à des contenus Web s'y rapportant. Un véritable basculement dans une autre dimension. Cette « réalité augmentée », pourra même, à terme, être utilisée pour retrouver un ami au milieu d'une foule ou d'un quartier... Voilà qui est tout d'un coup plus rassurant.