Conséquence de la digitalisation de la société, la convergence – des métiers, des outils, des médias… – a fait basculer le marché de la publicité dans l’ère de la révolution permanente. « Le digital a fait apparaître de nouvelles façons d’aborder le média en général (la télévision, la radio et la presse) avec une approche multi-écrans, rappelle Souaade Agmir, directrice de la stratégie digitale chez Publicis Media France. Il a également provoqué une défragmentation de l’audience qui rend les consommateurs plus difficiles à tracker… » Avec à la clé de nouveaux enjeux de ciblage et de mesure, et un impact tant sur les stratégies de communication plurimédia des annonceurs que sur l’offre des broadcasters. A l’image du groupe TF1 qui, depuis quelques semaines, s’essaie au programmatique TV et propose ses inventaires publicitaires TNT hors primes sur le DSP The Trade Desk. « On pouvait acheter en vidéo à peu près tout type d’inventaires, à l’exception de la TV linéaire. C’est désormais possible rappelle Philippe Boscher, directeur adjoint marketing digital chez TF1 Pub. Pour y parvenir, nous avons dû apprendre une nouvelle langue : nous ne parlons plus de GRP et de coût GRP mais de coût d’impression, de CPM. Nous entrons dans les KPIs du digital (visibilité, complétion…). Un vrai choc tectonique ! » Le premier d’une série (de chocs) dont on ne connaît pas la fin, mais dont on connaît le prochain : l’arrivée de la TV segmentée, testée depuis ce début de l’année et dont le décret devrait être publié au printemps. Pour les médias comme pour tous les acteurs de la chaîne (agences, annonceurs, traders…) la mutation en cours est donc synonyme de transformations profondes et continues. Passé la nécessité de se former en permanence pour apprendre et maîtriser les technologies et le bilinguisme TV / Digital, les cartes ont été rebattues : « La concurrence pour les broadcasters n’est plus sur leur cœur de business mais sur tout l’écosystème média, observe François-Xavier Le Ray, Directeur général France et Belgique de The Trade Desk. Aujourd’hui un marketeur met en perspective un plan média aussi bien sur YouTube que sur TF1. »
Côté opérateurs : « Nous devenons un prestataire technique des broadcasters. Si la pub bloque chez TF1 ou M6 (au moment d’un changement de spot en TV adressable) c’est chez nous qu’on appelle pour dire ça ne marche pas, rappelle Christophe Philip, Directeur marketing advertising de Bouygues Telecom. Parallèlement, la data passant par nos box, nous assumons le rôle de collecte des consentements pour ne pas saturer les consommateurs de demandes. On essaie d’avoir des process commun pour « décomplexifier » l’environnement de travail et avoir rapidement un maximum de box adressable. »
Si la solution de facilité suggère le recours au choix technique le plus répandu, c’est tout l’inverse que recommandent les professionnels : « Nous avons opté pour Google parce qu’il peut créer cette convergence, mais nous travaillerons avec d’autres dès que cela sera possible », assure Christophe Philip. « Il faut travailler avec tous les acteurs pour standardiser les pratiques en France ajoute Souaade Agmir. Nous pouvons nous appuyer sur la courbe d’expérience programmatique et de l’adressabilité en digital pour y parvenir. » Au-delà de la pluralité, il s’agit aussi de garantir l’indépendance des acteurs de la chaîne et d’éviter qu’ils soient juges et parties. Car il y a une vie hors de Google et Facebook !