Innovation
Stratégies a rencontré Cyrille de Lasteyrie, alias Vinvin, lors des Sommets du digital cette semaine. Il est intervenu sur scène pour parler d’intelligence artificielle, de robotique, de transhumanisme et de toutes les conséquences sur l’être humain… et sur les entreprises. Entretien.

Producteur, animateur, comédien, conférencier, consultant… Cyrille de Lasteyrie se définit avant tout comme auteur. «Mon fil rouge depuis 25 ans, c’est le storytelling». Ce diplômé en histoire et en marketing a commencé sa vie professionnelle en tant que concepteur-rédacteur chez Publicis Direct, a été à la tête de sa propre agence de communication, Sidièse, puis de sa société de production Story Circus.

Il a participé à plusieurs aventures entrepreneuriales, en France ou aux Etats-Unis. On l’a entendu à la radio, vu à la télévision ou au théâtre… Bref, «il a exercé 1 000 métiers», comme on pourra le lire au dos de son livre, déjà écrit, mais dont la publication a été soumise au financement participatif sur la plateforme Ulule.

 

Pourquoi avoir fait appel aux dons avant de publier votre livre?

Cyrille de Lasteyrie. Trois éditeurs m’ont proposé de l'éditer. Mais mon expérience dans le digital depuis 15 ans m’a donné le goût des aventures de groupe, communautaires. Aussi, je pense que le trajet traditionnel est moins intéressant. En tout cas, il ne me fait pas rêver… Le digital permet d’avoir des retours, des avis avant même que le projet soit lancé. C’est stimulant. Plus qu’un livre, j’ai envie que ce lancement soit une aventure éditoriale.

 

Mon livre sur Ulule. Parmi les contreparties il y en a une où l'on va tous chanter ensemble façon We are the world. https://t.co/RWYQml91ky

— Vinvin (@Vinvin) 22 janvier 2017

 

Qu’est ce qu'il raconte, ce livre?

C de L. C'est un livre de développement (très) personnel. Un recueil de vie à mi-parcours composé d’une centaine de petites histoires qui font entre dix lignes et dix pages... Des textes sans queue ni tête, mais qui disent que tout est possible. 

Sur la scène des Sommets du digital, vous avez enjoint les dirigeants dans la salle à s’emparer au plus vite du sujet de l'intelligence artificielle (IA). Pourquoi une telle urgence?

C de L. L’intelligence artificielle provoque les mêmes réactions que la transformation digitale à ses débuts. Pourtant, de nombreux exemples montrent que le sujet est déjà bien ancré dans le présent et qu'il impacte tous les secteurs. Il faut réagir maintenant pour ne pas ramer demain. En 2005, les entreprises ne prenaient pas internet au sérieux, et considéraient le phénomène comme un sujet secondaire. Dix ans après, ces mêmes boîtes nous appellent en panique pour mener une transformation digitale profonde et de toute urgence… Je suis convaincu que c’est la même problématique avec l’intelligence artificielle, multipliée par dix. Les conséquences business, organisationnelles, technologiques, humaines ou sociologiques sont énormes. Ne pas ouvrir un dossier IA dès maintenant, c’est franchement criminel. Et attention, nourrir l’IA demande du temps (machine learning, deep learning…). Le risque, c'est de prendre un retard monstre face à la concurrence.

 

 

Mais l’intelligence artificielle ne représente-t-elle pas une menace pour les entreprises?

C de L. Individuellement, il faut s’interroger sur la manière dont l’IA va toucher son métier, quel qu’il soit. Certaines professions seront touchées dans 30 ans, certaines sont déjà transformées. Mais ce qui est intéressant, c’est qu’il y a des domaines qui ne seront jamais remplacés, notamment la pure relation humaine. Mais aussi l’intuition, la sensibilité, l’écoute… Ce sont d’abord les activités où il n’y a aucune valeur ajoutée humaine qui seront automatisées, c'est-à-dire tout ce qui est répétitif. L’idée est donc de collaborer avec l’IA pour se concentrer sur ce qui n’est pas «remplaçable». Le travail sur soi est la clé de la coexistence homme/machine. Chacun doit aller creuser en soi et chercher ce qu’il a d’unique.

Et comment le secteur de la communication peut s'emparer de ce sujet?

C de L. Le sujet central du secteur c'est le big data et son analyse. On le voit dans l’automatisation des campagnes publicitaires, les régies spécialisées dans les données comportementales, etc. L’IA a déjà fortement modifié les métiers. Les expertises vont petit à petit se déplacer. Les planneurs stratégiques, plus que jamais, vont devoir réfléchir à leur valeur: la prise en compte de la connaissance personnelle du client, les enjeux politiques, les nouvelles concurrences, la sensibilité face aux tendances, la créativité… Les humains ont une perception supérieure des données. L’idée n’est pas d’avoir peur de l’IA, mais simplement de travailler avec.

Pourquoi, selon vous, de nombreuses entreprises rechignent encore à se saisir de l’IA?

C de L.  Parce que, au départ, quand une innovation fait son entrée sur le marché, ses applications concrètes ne sont pas évidentes, les produits ne fonctionnent pas immédiatement, etc. Un chatbot, par exemple, nécessite du temps avant d’être «intelligent», car il doit se nourrir et apprendre des questions et des réponses de ses interlocuteurs. Ou encore le frigo connecté, qui existe depuis 10 ans, mais qui ne rencontre pas encore l’usage. Mais le jour où l’innovation devient mature, les acteurs qui ne se sont pas positionnés à temps sont instantanément dépassés par ceux qui avaient posé leurs pions dès le départ. Il ne faut pas attendre, ni avoir peur, mais tester et apprendre.

 

 

Quels conseils adressez-vous aux entrepreneurs?

C de L.  S’emparer du sujet ne signifie pas forcément y consacrer de l’argent. C’est plutôt un état d’esprit, un intérêt. Il s'agit de lire de l’information, de s’abonner à des newsletters, de se rendre aux événements spécialisés, de rencontrer des start-up, de nouer des partenariats avec des spécialistes, etc. En somme, de se mettre dans une position de préoccupation qui va permettre de développer son offre, mais aussi de peaufiner son image de marque, de montrer à ses clients qu’on s’intéresse au sujet. L’idée c’est de se dire, «OK, ça ne marche pas encore, mais si jamais ca marche dans cinq ans, je préfère être armé».

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