L’ère de l’IA générative marque le début d’une nouvelle forme de narration. Aux marques de réinventer l’écriture créative et de challenger ce que nous connaissons du brand content. 

Ghostwritter977 presque aux portes des Grammy avec un titre IA, Emmanuel Macron qui chante sur du Angèle, des recettes ChatGPT sur TikTok : ces trois contenus ont fait le tour des réseaux sociaux avec un point commun : l’IA générative.

Du côté de la création publicitaire, l’utilisation de l’intelligence artificielle générative reste «timide» : on crée de jolis visuels, on développe quelques activations, on utilise l'IA pour automatiser des tâches répétitives… Comme pour toute nouvelle technologie, l’intelligence artificielle nécessite une phase d’exploration et soulève des questions.

Si aujourd’hui la «promesse» de produire plus et plus vite avec l’IA convainc certaines marques, cet outil n’a de sens que s'il contribue à développer des stratégies de brand content qui viennent nourrir une communication globale.

Nouveaux territoires et nouveaux genres créatifs

Les créatifs ne cessent de le répéter : pour créer une idée, il faut du temps. Dans cette ère du fast-content, nous avons tous fini par céder et nous habituer au rythme imposé par les réseaux sociaux : produire vite, créer «à la seconde», partir à la course aux likes.

Pour la première fois, une technologie vient «calmer le jeu», pour nous inviter à concentrer notre temps et notre regard sur la création de contenu de valeur et plus sur la simple production de contenus. Si cette révolution impacte nos méthodes de travail, l’intelligence artificielle générative ouvre surtout des portes vers des terrains inexplorés.

Certains créateurs de contenus ont ouvert le bal. C’est le cas de Barry Enderwick (alias SandwichesofHistory), qui a créé sa série TikTok, AI Friday, dans laquelle chaque vendredi, il partage des recettes générées par ChatGPT. Certaines marques s’approprient l’intelligence artificielle, pour créer des expériences interactives qui résonnent plus fortement avec leurs communautés. Coca-Cola tire parti du caractère interactif de l’IA en créant sa plateforme IA «Create Real Magic» : la marque invite sa communauté de fans et artistes à des œuvres digitales à partir de son iconographie.  

Cependant, cette nouvelle ère de contenu n’est pas sans challenge. Gardons en tête que l’intelligence artificielle est «vide de sens» et il est facile pour une marque de le devenir si elle ne trouve pas un équilibre entre expression «artificielle» de la marque et authenticité. Le piège ? Créer un «conflit» avec son audience en développant un contenu en totale rupture avec ce que prône une marque. C’est le cas de Levi’s, qui a annoncé vouloir utiliser des mannequins générés par IA pour plus d’inclusion. Une communication jugée paradoxale et taxée de «diversity washing». Si l’IA ouvre de nouveaux territoires d’expression, les marques doivent veiller à maintenir une cohérence et assurer une synergie entre technologie, créativité et identité de marque.

Des créations taillées sur mesure

Loufoques, racistes, sans âme… Les limites créatives de l’intelligence artificielle sont souvent moquées et montrées du doigt. Cet écueil doit pousser les marques à redoubler d’efforts dans leur stratégie de différenciation. Car si l’intelligence artificielle «imite» la pensée humaine, elle «révèle au grand jour» les faiblesses d’une marque et d’une société.

En témoigne une étude menée par IMT, qui révèle l’incapacité de l’intelligence artificielle à créer des images de médecins africains noirs soignants des enfants blancs. L’IA reproduit «fidèlement» les stéréotypes qui dominent la société et perpétue l’image du «sauveur blanc». Qu’est-ce que cela signifie pour une marque ? Qu'il ne faut pas considérer l’IA comme un «outil fini», mais comme un «outil» que l’on entraine, qu'on forme à adopter son propre style, sa tonalité de marque, les aspérités de sa marque et de sa communauté… Jusqu’à ce que la technologie ne matérialise plus uniquement une «pensée quelconque» mais reflète une identité et une philosophie de marque unique.

Le livre de recette AI Cookbook, créé par Heinz, en est un bon exemple. Le point de départ de la marque : si l’IA est capable de générer des images improbables, la technologie peine à créer des recettes originales, réalistes et désirables. La marque s’est associée à des chefs et experts pour «enseigner» à l’IA comment créer des recettes parfaites, avec pour brief d’intégrer «les tomates Heinz». Le livre propose plus de 30 recettes générées par l’intelligence artificielle et humaine. La marque a réussi à faire de l’outil une forme de «sous-chef Heinz» numérique pour inspirer les consommateurs.

Comme l’arrivée de la photographie dans l’art, l’ère de l’IA générative marque le début d’une nouvelle forme de narration. Un nouveau «genre» qui nous oblige à revenir à l’écriture créative, nous pousse à la «création originale et singulière» plutôt qu’à l’appropriation et nous invite à challenger ce que nous connaissons du brand content.