La cérémonie d’ouverture des Jeux a été conçue pour être exceptionnelle : elle ne se déroulera pas dans un stade mais le long de la Seine. Plus d’un demi-million de visiteurs sont attendus. Les enjeux sont colossaux. Revue de détail.

Paris 2024 casse les codes de la compétition sportive en faisant entrer le sport dans la ville, il en sera de même pour la cérémonie d’ouverture, se réjouit le Comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo). En 2024, la cérémonie s’annonce audacieuse, originale et unique, elle marquera l’histoire olympique de grandes premières. »

C’est la première fois qu’une cérémonie d’ouverture de Jeux olympiques aura lieu hors d’un stade. Baptisée « La Seine olympique », elle se déroulera sur le fleuve ; les 10 600 athlètes défileront sur des bateaux du pont d’Austerlitz à celui d’Iéna. « Les Jeux à Paris, c’est une fois par siècle. Il serait dommage de se contenter d’une cérémonie médiocre », ironise Thierry Reboul, directeur des cérémonies de Paris 2024 [lire aussi p. 14]. Il fallait organiser un événement hors norme qui marque durablement les mémoires. »

Un spectacle inédit

Conscient de l’enjeu d’une telle nouveauté, le Cojo a gardé la main sur la direction artistique de l’événement, confiée au ­metteur en scène Thomas Jolly. « L’ambition de Paris 2024 est de faire de cette cérémonie un événement hors norme, populaire, inclusif, respectueux de l’environnement et qui laisse un héritage concret pour les Parisiens et les Français », souligne Cyril de Froissard, qui dirige Paname 24, qui en assure la production exécutive et qui réunit Auditoire, Havas Events, Ubi Bene, Obo et Double 2. « C’est un énorme défi logistique, ne serait-ce que par la taille du terrain de jeu », poursuit-il. « C’est une première pour nous, ajoute Thomas Deloubrière, CEO de Double 2. Pour autant, l’équipe de France de l’événement que constitue Paname 24 dispose d’une multitude d’expériences qui nous permettent de garantir une maîtrise complète d’une telle cérémonie. »

Combien de places gratuites ?

100 000 spectateurs payants (pour un prix compris entre 90 et 2 700 euros) sont attendus sur les quais bas, gérés par le Cojo. Pour les quais hauts – où les places seront gratuites –, le Comité et la Ville de Paris espèrent pouvoir accueillir 500 000 personnes, mais le gouvernement n’a pas encore tranché la question. De 300 000 à 600 000, ­selon les sources… De la même façon, le flou règne sur la date d’ouverture de la billetterie gratuite, gérée par le ministère de l’Intérieur, et les modalités pour assister à l’événement.

La Sécurité, une préoccupation quotidienne

Avec un demi-­million de spectateurs sur les berges et 200 chefs d’État et de gouvernement, la sécurité est l’enjeu majeur de la cérémonie. Le protocole de sécurité signé fin mai entre le ministère de l’Intérieur, la mairie de Paris et le Cojo prévoit le déploiement de 35 000 policiers et gendarmes et de 6 000 agents de sécurité, recrutés à parité par la Ville de Paris et le Comité. Malgré cette annonce, les inquiétudes demeurent : « L’organisation des Jeux est […] confrontée à un véritable défi capacitaire, [notamment en ce qui concerne] la sécurité privée, dont il est peu probable qu’elle soit à la hauteur des besoins », alertait début 2023 la Cour des comptes.

Les transports, atouts et inquiétudes

Paris 2024 s’est engagé à ce que l’ensemble des sites parisiens puissent être rejoints en transports en commun ; ils ont donc été choisis dans un rayon de 10 km autour du village olympique. Les quatre nouvelles lignes de métro du Grand Paris Express seront les bienvenues. Pourtant, là aussi, le signal d’alarme a été tiré. « Jamais les transports franciliens n’ont aussi mal fonctionné », pointait sévèrement une mission d’information du Sénat en février. Les raisons ? Les chantiers du Grand Paris Express, le manque de conducteurs de bus et un difficile retour post-covid à une fréquentation habituelle.

Concilier spectacle vivant et scénographie télévisuelle

Paris 2024 doit tout inventer. « Nous sommes partis d’une feuille blanche », confirme Thierry Reboul qui poursuit en citant Thomas Jolly : « Dans un stade, il y a une convergence du regard. Là, le stade est déplié sur 6 km de long, il faut réinventer la scénographie. » Les organisateurs doivent jongler entre l’impératif de produire un spectacle télégénique et faire en sorte que chaque spectateur sur place puisse assister à une part significative de la cérémonie. La Seine sera évidemment un élément constitutif de la parade : « Nous tenons compte de cinq dimensions : horizontal, vertical, et avec les différents éléments, l’eau, la terre et l’air », dévoile le directeur des cérémonies.

Une empreinte carbone réduite

Paris 2024 vise un impact carbone divisé par deux. Pour atteindre cet objectif, l’organisation a évité les « éléphants blancs », ces infrastructures démesurées construites pour les JO et sous-utilisées ensuite : 95 % des lieux olympiques utilisent des structures existantes. Leur accessibilité par les transports en commun est l’autre solution retenue pour réduire cet impact. Le Cojo a aussi mis en place une démarche d’achats responsable pour impliquer l’ensemble de ses prestataires et une compensation carbone au-delà de ce qui sera émis.

Le symbole le plus visible de cet engagement écologique est l’organisation d’épreuves dans la Seine. Depuis 2016, l’État et les collectivités ont ­investi 1,4 milliard d’euros pour qu’il soit possible de nager dans le fleuve. Début juillet, la mairie de Paris a d’ailleurs dévoilé les trois sites dans lesquels les Parisiens devraient pouvoir se baigner à partir de 2025.

Un budget sous surveillance

Le budget de la cérémonie d’ouverture – tout comme celui de l’ensemble des Jeux – est étroitement monitoré. « Le Cojo pilote de très près tous les aspects de l’événement, la réalisation, le planning, mais aussi le budget », reconnaît Thomas Deloubrière. En effet, depuis 2004, le budget d’organisation global a explosé. Il a été réévalué fin 2022 à 4,4 milliards d’euros, contre 3,3 milliards lors de la candidature. Une hausse liée à une « sous-estimation évidente du budget de candidature », regrette la Cour des comptes qui note toutefois qu’il n’y a pas de « dérive en gestion ou une évolution inconsidérée du projet ». Mais les observateurs sont prudents car les budgets prévisionnels des Jeux ont toujours été largement sous-évalués…