Numérique

«On peut se réjouir de la vitalité du marché mais on ne peut pas ignorer l’arbre qui cache la forêt.» Sophie Poncin, présidente du Syndicat des régies internet (SRI), ne pouvait que dévoiler une situation «assez inédite» et «préoccupante»  jeudi 26 janvier au pavillon Gabriel.

Si le marché publicitaire digital apparaît en première lecture en grande forme, avec une croissance de 7% en 2016, à 3,453 milliards d’euros, et une part de marché (29,6%) qui passe devant la télévision (28,1%) elle ne peut ignorer qu’il est «trusté à 80% par deux acteurs»: Google et Facebook. Si l’on regarde la croissance générée l’an dernier, elle est en effet à 86% le fait du search et des réseaux sociaux. Si le display est en progression (+14,5%), c’est grâce à la forte croissance des réseaux sociaux (+62%), le display classique – non social – étant en baisse de 3%. Sur l’ensemble du gâteau publicitaire, le search et les réseaux sociaux totalisent 68% de l’ensemble (contre 22% pour le display), cette captation allant jusqu’à 92% sur mobile. Pourtant, la part d'audience est quasi-équivalente : ces derniers captent 98% des internautes français quand le display hors réseaux sociaux en attirent près de 96%.

Un label qualité

Alors que faire? Bruxelles enquête sur un éventuel abus de position dominante. L’autorité de la concurrence s’est autosaisie. Mais du côté de l’Udecam, son président Jean-Luc Chétrit refuse de stigmatiser un duopole: «On ne tombera pas dans une sorte de guerre contre Google et Facebook.» Il préfère s’en remettre à la coopération des deux acteurs, pariant qu’ils accepteront la certification de leurs audiences communiquées aux annonceurs. L’Udecam et l’UDA rencontreront ainsi Facebook la semaine prochaine afin que la plateforme puisse être auditée par le Centre d’études des supports de publicité (CESP) alors qu’elle publie régulièrement des correctifs d’audience.

L’Udecam s’en remet aussi, avec le SRI, à un «label qualité» qui doit être lancé au cours de cette année. Le CESP et l’ACPM ont été choisis pour être les partenaires qui permettront de certifier les audiences au regard des exigences de ce label. Il s'agit d'indiquer si les sites sont conformes aux attentes des annonceurs en matière de visibilité, de fraude, d’expérience utilisateur, de respect des données personnelles et de brand safety. «Il a vocation à redonner confiance sur la valeur face aux plateformes qui sont en train de capter la très grande partie des investissements», martèle Sophie Poncin.

Le social fait la croissance du display

Les principaux leviers de la croissance restent la vidéo, le social et le programmatique. Parmi les points d’encouragement pointés par Sébastien Leroyer, directeur chez PWC, une meilleure réponse aux ad-blocks (36% des contenus bloqués selon l’IAB), une progression des taux de visibilité et une transparence accrue.

Mais là encore, le poids prépondérant des réseaux sociaux affleure. Le display classique est à -14% quand on enlève le social dans un contexte où les formats basculent vers le mobile. Si la vidéo est encore très dynamique (+35%, à 417 millions d’euros), c’est grâce à sa forte hausse sur les réseaux sociaux. Hors social, la croissance de la vidéo n’est plus que de 6%. C’est ce qui explique que le format outstream soit en très forte progression (+115%) et représente désormais 36% de la vidéo.

Il en va de même, dans une moindre mesure, des autres paramètres de croissance: le programmatique (+51%) est désormais majoritaire dans le display mais sa croissance est de 29% hors social, et les investissements mobiles (+60%) représentent un gros tiers du display mais leur croissance est moitié moins forte (+30%) hors social (voir graphique). Enfin, 81% des investissements programmatiques mobiles sont générés par les réseaux sociaux. 

A noter que la France se rapproche désormais du Royaume-Uni en termes de part des investissements mobiles (41%) sur le digital.  «Ils croissent désormais plus vite que les usages», observe Sébastien Leroyer, de PWC. Le search progresse de 4,3%, et représente 55% du marché de la publicité numérique totale pour un chiffre d'affaires net de 1,893 milliard d'euros. Le display (bannières et vidéos) est en hausse de 14,5%, soit 35% du marché global pour un chiffre d'affaires net total de 1,204 milliard d'euros. Les autres leviers (affiliation, emailing, comparateurs...) progressent de leur côté de 3,2%, à 447 millions d'euros. «En 2016, les contrastes du marché du display s'accentuent de manière notable, et le poids des médias sociaux atteint un niveau encore jamais vu», observe Sébastien Leroyer.



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Les tendances du programmatique

 

On assiste en 2016 à un renforcement du "programmatique premium", autrement dit à une extension de l'achat automatique aux inventaires premium, avec de plus en plus de vidéos et de data. Les achats, ensuite, deviennent algorythmiques : les campagnes programmatiques sont optimisées par des solutions techniques de machine learning. Enfin, les deals privés captent de plus en plus d'annonceurs attirés par des garanties sur les volumes, la qualité et le prix des inventaires.

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