télévision
C’est la fin des experts et l’ère du coaching interpersonnel: au MIP-TV, les tendances sont aux programmes d’entraide, avec des téléspectateurs toujours plus friands de réseaux sociaux.

L'enfer, ce ne serait donc pas les autres. Au contraire, le monde des programmes présentés lors du 49e MIP-TV, du 1er au 4 avril à Cannes, est pavé de bonnes intentions. Virginia Mouseler, directrice de The Wit (World Information Tracking), avoue en avoir été frappée: «Les émissions qui vont arriver sur les écrans reposent beaucoup sur l'entraide. C'est la fin des experts à la Super Nanny. Tout un chacun peut aider son prochain.» Judéo-chrétien en diable…

«Desperate Neighbours», un pilote américain, montre ainsi des familles en détresse qui se réunissent, avec leur communauté, dans la salle municipale afin de discuter de leurs problèmes. Un programme israélien, «Dear Neighbours, help my daughter find love» (Chers voisins, aidez ma fille à trouver l'amour) convoque tout un village afin de chercher un bon mari pour les filles trop prises par leur vie urbaine. Quant à «The Audience», un format anglais, il repose sur un principe tragi-comique: un individu en difficulté se voit suivre en permanence par une cohorte de cinquante personnes, de parfaits inconnus qui commentent tous ses faits et gestes et l'aident à venir à bout de sa névrose d'échec ou autres phobies sociales.

«On fait de plus en plus appel au “crowd wisdom” (sagesse populaire), remarque Virginia Mouseler. Une sorte de recommandation peer-to-peer.» La directrice de The Wit y voit un lien avec une autre tendance, sociétale celle-là, largement abordée lors du MIP-TV: l'hyper-connexion des téléspectateurs, qui ne peuvent, semble-t-il, plus regarder un programme sans le commenter avec leurs amis, via les tablettes ou les smartphones: les fameux «second screens» (deuxièmes écrans, lire aussi page 28).

«Les gens continuent à regarder la télé mais nous voulons qu'ils parlent de nous sur d'autres écrans pendant ce temps-là», a expliqué Christian Bombrun, directeur général adjoint de M6 Web pendant une conférence sur le sujet. «Si les micro-crochets, comme The Voice, Got Talent ou Strictly Come Dancing cartonnent dans tous les pays, c'est aussi parce que les téléspectateurs adorent les disséquer en direct sur les réseaux sociaux», remarque Amandine Cassi, directrice des études d'Eurodata TV (Médiamétrie).
Josh Sapan, PDG d'AMC, la chaîne américaine de Mad Men et Breaking Bad, les appelle des «superviewers»: un public si impliqué que les doigts lui brûlent d'aller en deviser sur Facebook ou Twitter. «Les fans d'un show comme Breaking Bad en discutent sur les réseaux sociaux immédiatement après sa diffusion. Même parfois pendant. Ce qui nous amène de nouveaux fidèles!» a-t-il remarqué lors de son allocution au MIP-TV.
The Wit a d'ailleurs conçu un nouvel outil, le Wit-ER (Engagement Rating), qui permet de mesurer la popularité d'un programme, en soupesant les «like» sur Facebook et les commentaires sur Twitter. Champions des six derniers mois: Berlin Tag und Nacht, un show de télé-réalité allemand, et la série Bref, sur Canal +. «On commente davantage sur Twitter les programmes de flux, et sur Facebook les fictions, pas forcément vues en direct», remarque Virginia Mouseler.

Parions que TF1, dont le programme The Voice cartonne sur Twitter notamment, ne manquera pas de développer une communauté autour sa «première production internationale», la série Le Grand, avec Jean Reno, produite par Lagardère Entertainement, pour un budget de 16 millions d'euros (diffusion en 2013). Toutefois, ce sont «les émissions humoristiques qui incitent le plus à la participation sur les réseaux sociaux», assure encore la directrice de The Wit.

 

Encadré

 

Un consumérisme toujours plus affiché

Elle chaloupe sur la scène, crinière supernaturelle, déhanché extra-terrestre: elle, c'est Elle McPherson, venue au MIP-TV parler du Fashion Show qu'elle anime sur NBC. Son principe: des aspirants stylistes s'affrontent devant des acheteurs de Saks, Macy's et H&M, qui acquièrent ou non leurs modèles, ensuite vendus en magasins. «C'est un “commerce show” qui crée vraiment du trafic en magasins!» analyse la top-model au langage de marketeuse. En Italie, «Shopping Night» (Realtime) lâche deux femmes, la nuit, dans un centre-commercial. Les annonceurs du textile se battent pour figurer dans ses programmes qui font plus que flirter avec le «branded entertainment».

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