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Utilisé de façon appropriée, Internet peut-être un outil qui consolide les jeunes démocraties naissantes. Retour d'expériences au Sénégal, en Tunisie et en Egypte.

Au cours d'un colloque organisé les 21 et 22 juin à Montpellier par Canal France International, des spécialistes de l'e-journalisme ont planché sur le sujet du jour: «E-politique: après les révolutions, les élections». Au gré des ateliers, un constat a émergé: Internet est un outil d'épanouissement de la démocratie, à condition que l'on s'en serve correctement.

Le Web peut d'abord être mis au service d'une plus grande transparence. Le «succès» des récentes élections présidentielles au Sénégal, dû aux dizaines de milliers d'observateurs qui ont assuré le bon déroulement du processus et ont fait remonter les informations, en atteste.

En Tunisie, la journaliste Amira Yahiaoui, présidente de l'ONG Al Bawsala, veille quant à elle au bon fonctionnement de l'Assemblée constituante: «Sur mon site, vous pouvez cliquer sur les sièges des élus, voir leur fiche - cela nous a pris quatre mois de lobbying pour savoir où ils étaient tous assis - et savoir ce qu'ils votent, s'ils sont présents. D'ailleurs, un élu, qui était absent un jour, m'a envoyé son arrêt maladie, à moi et pas au président de l'Assemblée.»

 

Une nécessaire modération

Pour le blogueur égyptien Waël Abbas, Internet permet de «tout montrer». Son blog diffuse les documents que lui envoient les internautes. «Les médias traditionnels diffusent aussi des vidéos amateurs, explique-t-il. Mais eux les filtrent. Nous, nous postons tout.» Une vidéo choquante, postée en 2007, montrant une scène de torture dans un commissariat, a sans doute contribué à ce que les auteurs des violences soient condamnés à des peines de prison. Une telle «transparence» peut ainsi pallier les manques d'une société qui va mal.

Les réseaux sociaux sont un espace d'échanges démocratiques. Pas toujours pertinent, d'ailleurs, selon Waël Abbas, qui a suivi les élections en Egypte. «Je n'ai jamais aimé Facebook, confie-t-il. L'audience est différente de celle des blogs, où les lecteurs recherchent de vraies discussions.» Sur Facebook, les discussions s'enveniment rapidement. C'est ainsi que Waël Abbas se retrouve régulièrement accusé d'être «une agence américaine».

Au cours de l'un des ateliers, un réalisateur marocain explique qu'il a posté une vidéo abordant le sujet de la virginité. «En quelques heures, nous avons 270 000 vues, 40 pages de commentaires, à 90% des insultes: comment gérer cela?», se demande-t-il. «Sur ce genre de thème, on sait que la plupart des commentaires ne vont pas être constructifs. Il faut chercher le 1% constructif. Et dire: vous avez vécu quelque chose de différent? Parlons-en», répond Damien Van Achter, le développeur éditorial de Lab.davanac.

Les médias qui ouvrent leurs articles aux commentaires doivent dès le départ intervenir pour empêcher les discours de dériver en querelles stériles. Ou bien fermer les commentaires, s'ils ne comptent pas modérer. Attention également aux pouvoirs, qui veillent de plus en plus à pousser leur propagande sur la Toile.

Les réseaux sociaux peuvent enfin être utilisés à des fins d'investigation. Le nombre d'internautes désireux de partager leurs informations, notamment lors de crises (catastrophes, révolutions), est considérable. Andy Carvin, «senior strategist» à la National public radio (NPR) aux États-Unis, a passé des journées entières sur Twitter pour comprendre «ce qu'il se passe dans le monde».

«Lorsque je retweete une vidéo qui se passe en Libye, raconte-t-il, les internautes non seulement me traduisent ce qui se dit, mais encore identifient les origines en fonction des accents, etc. J'utilise Twitter différemment: au lieu de dire "voilà ce que j'ai fait", je dis "je ne comprends pas ce qu'il se passe. Pouvez-vous confirmer?".» D'un gadget, le nouveau média devient alors un outil à valeur ajoutée.

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