Intérêt général
Les seules victimes d'un accident automobile ne sont pas celles qui se trouvaient dans la voiture. La campagne de La Chose/Anatome pour la Sécurité Routière s'attache à montrer les dégâts collatéraux: la souffrance des proches. Delphine Le Goff @DelphineLeGoff1

Agence: La Chose/Anatome 

 

Tôle froissée, vie broyées. Celles d’Étienne et Sophie tout d’abord; le jeune homme ne savait pas que la mort était au tournant, la jeune fille ne savait pas qu’elle y perdrait ses jambes. Celles des absents ensuite: père, mère, enfant, grand-père, amoureux…

Dans une lumière bleutée, glacée et glaçante, sur une musique de Mirwais, les corps se crispent, les visages se tordent. Dégâts collatéraux: ce ne sont pas des spectres, mais les proches des victimes qui entourent les voitures accidentées du spot de La Chose/Anatome pour la Sécurité routière, intitulé «Onde de choc».

«C’est un sujet qui me touche fortement, pour des raisons familiales et personnelles, confie Pascal Grégoire, cofondateur et directeur de création de l'agence La Chose. Près de la moitié des Français connaît un proche touché par un accident de la route selon une étude Ifop…»

 

Il est pourtant loin le temps des Choses de la vie de Claude Sautet (1970), où l’on voyait Michel Piccoli conduire sans ceinture. Les chiffres de mortalité ont drastiquement baissé: autour de 10 000 morts en 1995, 3 464 en 2015. Impressionnant. Sauf qu’en 2015, les chiffres repartaient à la hausse: 80 décès de plus qu’en 2014.

«Les comportements se relâchent, constate Pascal Grégoire. Devant cela, on aurait pu choisir des images de violences routières, à l’anglo-saxonne. Sauf que l’on s’est aperçu qu’à force, celles-ci produisaient de moins en moins d’effet.» Le choix se porte rapidement sur Bruno Aveillan. «Je suis convaincu que les messages pour les grandes causes, basés uniquement sur les chocs visuels ou au contraire construits sur les litanies de statistiques ne sont plus vraiment audibles», analyse le réalisateur.

Entre cauchemar et réalité

Très vite naît l’idée de montrer l’«après». «Des souffrances indélébiles, qui restent le plus souvent intimes. Un terreau pas vraiment exploité dans la pub», estime Pascal Grégoire. Dans ce choc frontal, Étienne a-t-il percuté Sophie? Ou est-ce l’inverse? «Il ne s’agit pas de désigner un coupable. Plutôt d’être dans la symbolique de l’accident», explique Pascal Grégoire. Bruno Aveillan raconte: «J’ai entremêlé plusieurs techniques de tournage et postproduction afin de générer une atmosphère très spécifique, entre rêve (je devrais dire “cauchemar”) et réalité… J'ai notamment choisi de m’affranchir de certaines règles classiques de la photographie notamment en ce qui concerne le respect des profondeurs de champ.»

L’accident de départ est tourné en full 3D. Les autres scènes du film et de ses futures déclinaisons par «cause de mortalité» (alcool, vitesse…) ont été shootées sur le circuit de Montlhéry, là où l’on réalise les tests de sécurité Euro NCAP. Les acteurs –60 comédiens pour les quatre films– doivent cumuler deux compétences: «avoir une tronche, et être bons trampolinistes». Une scène pénible, celle d’une jeune fille qui se fait écraser, nécessitera les services d’une cascadeuse. Ambiance.

«Pour autant, il n’y avait aucun pathos sur le tournage, empreint d’une atmosphère très calme», raconte Pascal Grégoire. Les films, diffusés tout au long de l’année 2016, seront accompagnés d’un site internet, créé par Razorfish, sur lequel accidentés et proches pourront partager leurs témoignages. Pour ceux qui restent.

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