Relations publics
Pour interpeller l’opinion publique sur le fait que de nombreuses personnes victimes de torture vivent en France, le Dignity Institute et Grey Paris ont imaginé une campagne audio... qui se présente comme l'album d’un groupe de rock.

Agence: Grey Paris

Fin avril et début mai, plusieurs «influenceurs parisiens» ont reçu une pochette d’album vinyle au nom de «Talking Bones». Le disque du dernier groupe de rock à la mode? Pas vraiment. À l’intérieur se cachait une radiographie médicale montrant un crâne, un os de mai, de pied ou de genou. Cassé ou non. Une note écrite les invitait alors à déposer cette radio sur une platine vinyle pour entendre les témoignages poignants d’Arta, Adnan et Fidèle, toutes ayant été victimes de tortures.

Conçue par Grey Paris pour le Dignity Institute, association internationale basée au Danemark et intervenant dans 20 pays dont la France, cette campagne de sensibilisation vise à interpeller l’opinion publique française sur le fait que 125 000 personnes, victimes de torture ou de violence politique, vivent dans l’Hexagone. «Nous nous sommes rapprochés de psychologues pour collecter des témoignages de personnes torturées. Nous n'avons toutefois pas retenu les détails les plus sordides. La problématique était de trouver le juste équilibre pour interpeller de manière forte sans rebuter le grand public», explique Thierry Astier, directeur de la création de Grey Paris.

Victimes de tortures

Ces témoignages ont ensuite été lus (en anglais) par des volontaires russes, syriens et africains, approchés par Grey Moscou et Grey Middle East. «Les victimes de tortures viennent beaucoup d’Afrique, d’Europe de l’Est ou du Moyen-Orient. Nous voulions être au plus proche de la vérité avec des lecteurs issus également de ces régions», continue Thierry Astier.

Si l’agence a d’abord voulu graver ces témoignages sur de fausses radios dessinées sur des vinyles, elle a finalement préféré utiliser de vraies radios médicales. Las, plus personne ne maîtrisait cette technique!

Après de nombreuses recherches, l’agence a finalement appris que ce processus avait déjà été utilisé dans les années 1950 par les Russes… pour importer du rock’n’roll américain alors que Staline en interdisait l’écoute! «Nous nous sommes alors rapprochés de plusieurs collectionneurs pour essayer de retrouver une machine de cette époque. Nous avons mis six mois à trouver Lathecuts, une petite société américaine basée en Arizona, qui en a une», raconte Thierry Astier.

Témoignages gravés

Mais le processus de gravure a été long à mettre en place, car le matériau utilisé pour les radios des années 1950 n'a rien à voir avec celui d'aujourd’hui. Après plusieurs essais et tâtonnements, une solution a tout de même réussi à graver les témoignages audio sur des radiographies. Au total, une quinzaine d’objets ont été produits pour un coût d’environ 60 dollars l’exemplaire. D’autres devraient être gravés prochainement.

En effet, la campagne «Talking Bones» n’est pour l’instant diffusée qu’en France. Mais elle devrait être déployée dans d’autres pays européens dans les prochaines semaines, notamment au Danemark, où l’écoute des disques sera proposée en direct à l’occasion d’un événement organisé par le Dignity Institute autour de ce sujet sensible. Les radiographies n'ont pas fini de nous livrer leurs secrets!

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