La publicité ciblée sur Internet devrait dépasser cette année le milliard de dollars aux Etats-Unis. Les associations de consommateurs et défenseurs des droits des internautes s'inquiètent.

Zappos, le plus grand marchand de chaussures en ligne aux Etats-Unis, prolonge le contact après la première visite de l'internaute. «Nous lui envoyons plusieurs bannières avec les produits vus et des recommandations sur d'autres produits qui vont bien avec», explique Pascal Gauthier, responsable commercial de la société Criteo, en charge du programme. L'internaute a plus de chances de cliquer et finalement d'acheter. Le taux de conversion, selon Pascal Gauthier, est de 3% et plus.

 

Cet exemple de publicité ciblée se veut vertueux. «Nous n'enregistrons pas de données personnelles, la reconnaissance de produits est anonyme, nous ne partageons pas les données de site à site, et ces éléments sont effaces au bout de 30 jours», affirme Pascal Gauthier, désireux de marquer sa différence vis-à-vis des autres acteurs de l'industrie qui s'aventurent dans l'étude du comportement de leurs cibles.

 

Cette industrie censée donner aux publicitaires le sacré Graal - on délivre le bon message à la bonne audience au meilleur moment - est en plein boom. David Hallerman, analyste de la société d'études eMarketer, estime le marché 2010 américain à 1,125 milliards de dollars, soit 21,6% de plus qu'en 2009.

 

Les douzaines de bourses d'échanges, 300 réseaux de pub et autres entreprises qui créent, achètent, agrègent les informations des banques de données classiques et en ligne sur les internautes n'ont pas connu la récession. Bien au contraire. Le cabinet eMarketer évaluait le marché à 775 millions de dollars en 2008, un an plus tard, il était 19,4% plus haut et 2010 suit le même rythme.

 

Au grand dam de Jeff Chester, du Center for Digital Democracy, prompt à souligner les risques de violation de la vie privée, encourus par le naïf surfeur du Net. Dans un dossier remis à l'agence gouvernementale FTC (Federal Trade Commission), il raconte ce qu'il appelle «la collecte sauvage de données» : le Right Media Exchange de Yahoo, par exemple, digère 9 milliards de transactions par jour, BlueKai observe les comportements d'achats de 200 millions d'internautes, Exelate grâce à ses accords avec Nielsen et des centaines de sites peut profiler 150 millions d'usagers...

 

La profession jure que ces récoltes sont anonymes. Et tente d'améliorer les pratiques du métier en prônant davantage de transparence et d'information. C'est ainsi que sept associations (AAAA, Direct Marketing Association, Interactive Advertising Bureau...) ont mis en place un icône. Lorsque l'internaute clique dessus, on lui explique le type d'informations recherchées et il peut choisir de ne pas participer.

 

Mais les assurances de la profession ne satisfont guère Jeff Chester. Car il y a déjà eu trop de gaffes de Google, Facebook, Microsoft et les autres. Les grands magasins Sears par exemple ont été épinglés par la FTC pour avoir collecté sans prévenir les relevés bancaires, ordonnances, locations de vidéos, etc., de certains clients. Les associations de consommateurs et défenseurs des droits des internautes tablent en fait sur la FTC pour gendarmer l'industrie naissante.

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