Sold Out. Complet. Les organisateurs des Jeux olympiques de Londres ne cessent de le répéter: tous les billets ont été vendus. Pourtant, les téléspectateurs britanniques ne comprennent pas que des rangées et des blocs entiers de sièges soient vides dans les tribunes. Un polémique que les tabloïds anglais ont repris sur leurs Unes.

Les premiers coupables pointés du doigt sont les sponsors, ou plutôt leurs invités. Malgré un billet en poche, une partie de ces VIP ne prendrait pas la peine de se déplacer pour assister aux compétitions. Trop tôt, trop loin, trop de fatigue, envie de shopping... les excuses sont nombreuses. Même si le ticket a été offert, quelques-uns n'ont aucune gêne de se porter pâle sans prévenir leurs invitants.

 

Mais les sponsors, qui profitent de 8% des 8,8 millions de billets édités, ne sont pas les plus gros bénéficiaires. Ce sont les comités olympiques nationaux, avec 12% de l'allocation totale. Avec les fédérations sportives internationales, qui en reçoivent 5%, elles trustent 1,5 million de billets. Au total, un quart des places est donc réservé aux invités. Ce taux est comparable aux autres grands événements sportifs.

 

«Moi, je n'ai pas vu de sièges vides», affirme Denis Masseglia, le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), qui s'étonne de cette polémique. «Concrètement, nous avons bénéficié d'environ 85 000 places. La France a perçu la deuxième allocation après la Grande-Bretagne. Sur ce compte, le CNOSF a gardé 12% des tickets. Le reste a été mis en vente auprès du grand public français et cette opération est organisée par notre agence officielle, Eventeam».

 

Chez Eventeam on confirme: «Nous avons écoulé 95% des places», indique Igor Juzon, le président de l'agence. Au Club France, à Londres, l'agence met quotidiennement en vente les derniers billets disponibles. Certains sont directement rétrocédés par le CNOSF. «La demande est très forte, poursuit le dirigeant. La file d'attente atteint parfois 300 mètres».

 

Mais à qui sont donc les places vides, souvent visibles lors des retransmissions télé ? «Nous avons eu 20 000 places pour le football, et c'est beaucoup trop», reconnaît Denis Masseglia. Au total, le comité d'organisation avoue que 200 000 billets pour le football n'ont pas été vendus. Les stades étaient trop loin de Londres et de sa fête olympique. «Pour le reste, nous réservons toujours des places pour des invités importants de dernière minute», confie le président du CNOSF qui s'appuie sur les Jeux pour réaliser une vaste opération de relations publiques auprès des personnalités politiques et des élus. Ceux sont eux qui votent les budgets pour le sport.

 

«Le système de billetterie doit être revu pour Rio en 2016», insiste le président du comité olympique britannique, par ailleurs en conflit avec Sebastien Coe, le président du comité d'organisation. Ce dernier vient tout de même de remettre en vente 75 000 billets, dont 9 000 venant des sponsors. Avant de remettre tout le marketing de la billetterie à plat, une enquête a quand même été lancée afin de connaître les propriétaires de ces billets inutilisés.

 

L'indélicatesse des VIP n'est pas la seule responsable de ce problème de sièges vides. «Les conséquences de la loi anti-corruption («UK bribery act») mise en place en Grande-Bretagne, et censée lutter contre la corruption dans les entreprises, a eu des effets négatifs sur les opérations de relations publiques», indique Nathalie Zimmermann, présidente de l'agence de marketing sportif NZ Consulting, installée à Londres. Cette loi, qui pourrait se déployer en Europe, limite la valeur des cadeaux pour les salariés dans les entreprises. Or, les packages proposés par les sponsors à leurs invités dépassent souvent les 1 000 euros. «Ce type de cadeau peut aussi être considéré comme un avantage en nature, ajoute Nathalie Zimmerman. Cette loi et ces nouveaux usages remettent en cause tout le concept de l'hospitalité dans le sport.» Du coup, les agences officielles se sont retrouvées avec un grand nombre de packages invendus, qu'il a fallu brader.

 

Pour l'heure, le Comité d'organisation des J.O. tente de rattraper le coup en remettant en vente un certain nombre de billets. Londres en offre aussi par dizaine aux écoles et aux militaires assurant la sécurité. Du personnel chargé d'occuper ces sièges qui, vides, passaient très mal à la télé.

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