télévision
Cash Investigation, l'émission présentée par Elise Lucet sur France 2, achève le 15 juin sa saison avec une enquête sur la surconsommation de sucre orchestrée par un lobby industriel.

Elle ne sait pas encore si son émission sera reconduite sur France 2 mais elle a déjà une certitude: ce ne sera pas le vendredi en deuxième partie de soirée, une "case sinistrée" où Cash Investigation a réalisé 8,4% de part d'audience en moyenne pour 1,3 million de téléspectateurs (elle pourrait revenir à Bruce Toussaint l'an prochain).

Pourtant, Elise Lucet, la présentatrice du 13h, qui a mené de front le JT, son magazine d'investigation et les soirées électorales, a fait mouche: "Nous avons d'excellents retours, je ne pense pas que Cash sera arrêté: on a imposé une marque avec des révélations et un esprit très service public". Le 15 juin, l'émission produite par Premières Lignes (Paul Moreira et Luc Hermann) livrera le dernier numéro de la saison. 

Cash, c'est d'abord un parti pris qui consiste à expliquer clairement ce qui peut paraître hors de portée au téléspectateur lambda: le trading "high frequency" (des ordres de Bourse donnés par des ordinateurs-robots), le neuro-marketing, les habits toxiques, les paradis fiscaux, le "green washing"...

La présentation est limpide, non dénuée d'humour avec ses extraits de "cartoons" ou ses infographies édifiantes. L'émission ne craint pas non plus de retourner les publicités des marques comme un boomerang pour mieux pointer leur duplicité.

Exemple avec Le Crédit agricole, qui investit dans les énergies fossiles et dont le slogan "Il est temps que la banque passe au vert" supporte difficilement la contradiction. Selon nos informations, l'annonceur aurait fait pression sur la régie publicitaire de France Télévisions. Et le WWF, l'ONG accusée de recevoir des fonds de la banque, a engagé un procès en référé. "On l'a gagné", précise Elise Lucet.

Les enquêtes, visionnées trois ou quatre fois avant diffusion par les avocats du groupe, sont généralement béton. Réalisées pendant six à huit mois, elles ont permis d'exhumer les effets psychiatriques d'un médicament de Sanofi-Aventis retiré de la vente (L'Acomplia), 43 000 documents sur les paradis fiscaux ou encore le travail des enfants dont se rendent coupables Monoprix ou Zara en sous traitant la fabrication de leurs vêtements dans des ateliers du Bangladesh ou d'Inde.

 

Des retombées positives

"La plupart prennent alors des engagements, confie Elise Lucet, Monoprix a déclaré qu'il arrêtait de produire au Bangladesh, Zara réfléchit à faire de même en Inde. Je souhaite vivement que l'on puisse réaliser un droit de suite pour voir si les pratiques ont changé".

La caméra cachée, qui n'est pas systématique, est légitimée par le bien-fondé de la dénonciation. Même si, rappelons-le, la charte des journalistes interdit d'invoquer "un titre ou une qualité imaginaires" ou "d'user de moyens déloyaux pour recueillir une information". 

Si l'investigation est difficilement contestable, les méthodes d'interview d'Elise Lucet sont parfois décriées. Sur le forum de France 2, un internaute déplore le "ton inquisiteur" de la présentatrice qui cherche, documents à l'appui, à déstabiliser ses interlocuteurs.

"Nous sommes cash, mais jamais déloyaux, répond l'intéressée, je n'ai pas la volonté de les piéger, il s'agit de faire exister leur parole. Mais les gens sont surpris et désarçonnés par notre niveau d'information."

Sans mauvaise foi, difficile pourtant de nier qu'il y a une certaine gourmandise de la caméra à recueillir des moments où le représentant de l'entreprise ne se sait pas filmé. Quant aux patrons, ils sont parfois sommés de répondre. Ce peut être pour le meilleur, comme lorsque le dirigeant de Zara est interpellé en pleine séance de résultats financiers. Mais cela peut aussi relever de la mise en scène un peu gratuite, comme lorsque le médiatique Michel-Edouard Leclerc cherche à échapper à la star Elise Lucet ...

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