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Fini d'être cantonnés dans les rôles de vendeurs de croquettes, les animaux sortent de leur niche pour promouvoir des voitures ou des banques, et s’humanisent. Agnès Walser-Luchesi, de l’EM Strasbourg, a étudié l’efficacité de ces égéries à poils.

Un chat qui jongle avec un ballon (Serf & Rouby pour Feu vert), le chien Toby qui parle avec son maître (Les Gaulois pour Crédit mutuel) ou l’ours réalisateur de film (BETC pour Canal +)…, les bêtes à poils sont de plus en plus souvent les têtes d’affiche de spots de publicité. Et, du coup, elles sortent de leur niche: fini les simples rôles de vendeurs de croquettes, de litières ou d’assurances pour animaux.

La tendance est à l’anthropomorphisme: aujourd’hui, dans la publicité, l’animal est l’égal de l’homme. Mais comment ces spots sont-ils perçus par les consommateurs? C’est justement le sujet d’étude d’Agnès Walser-Luchesi, maître de conférences en marketing à l’EM Strasbourg Business school: «J’ai mené ce travail dans le cadre d’une recherche exploratoire démarrée en 2013 (quatre mois de terrain, une vingtaine d’entretiens). Puis nous avons organisé quatre focus groups, avec des propriétaires – ou non – d’animaux de compagnie.»

Ce qui ressort de cette étude, selon l’enseignante, est que «l’animal est un activateur d’attention. Il renforce l’attention portée à l’annonce et la fonction mémorielle de la marque. Mais il ne faut pas que l’animal la cannibalise». Agnès Walser-Luchesi classe les récepteurs (personnes exposées à ces publicités) en quatre catégories. «D’abord les "anthropomorphistes" accordent une place à l’animal dans la société, l’intègrent comme un membre de leur famille, précise-t-elle. Du coup, ils vont s’identifier dans la scène entre le chien Toby et son maître.» Ensuite les «enchantés», qui apprécient le côté humoristique, le décalage entre la réalité et la fiction, et font le lien avec les fables de la Fontaine ou des contes. 

 

«Spécistes enchantés»



«Ensuite, il y a deux types de récepteurs qui risquent de rejeter ces publicités», note la maître de conférences. Les «spécistes» (discrimination fondée sur le critère d’espèce), qui rejettent la place de l’animal dans la société et à fortiori leur humanisation. Et enfin les «désenchantés», qui considèrent que l’animal doit rester à sa place, et que son utilisation rend le scénario irréel.

Dans tous les cas, le recours aux animaux dans la publicité présente des avantages. «Ils bénéficient souvent d'un capital sympathie fort (les chatons, les poussins…) et offrent des possibilités de mise en scène originales, souligne la chercheuse. Mais il faut bien comprendre leur symbolique (histoire, mythologie et culture). Si le lapin Duracell fonctionne bien, c’est parce que l’on l’associe à des notions d’endurance, de vitesse, d’abondance, et parce qu’il représente aussi un symbole sexuel ("chaud comme un lapin"). Autrement dit, il est en cohérence avec l’énergie, la résistance des piles.»

La symbolique attachée à l’animal doit correspondre au produit et au message porté, sans quoi il y a un risque de rejet. Enfin, l’animal peut aussi tenir le mauvais rôle, comme dans une campagne de la RATP contre les incivilités où la régie a choisi comme contre-exemple un humain avec une tête d’animal.  

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