Régie
Marianne Siproudhis, directrice générale de France Télévisions Publicité, dévoile les grands chantiers de sa régie publicitaire. Elle défend l'extension des offres sur les réseaux sociaux et annonce une expérimentation sur la publicité adressée avec Orange.

Vous êtes arrivée à la tête de France Télévisions Publicité à la fin 2015. Quel est le bilan de la régie ?

Nous avons regagné la troisième place sur le podium, ce qui n’était pas arrivé depuis cinq ans, en totalisant un chiffre d’affaires de 373,5 millions d’euros nets. Dans un marché à +0,7%, cela représente une croissance de +4,1% (et +29% sur le digital) là où le groupe TF1 est à -1,6% et M6 à +4,8%. C’est là le résultat d’une grosse activité de nos 300 collaborateurs – dont soixante nouveaux -avec plus de mille comptes gagnés. Nous avons changé l’organisation, rassemblé les équipes locales et nationale, étoffé une cellule de développement. Notre Lab nous a permis de décoller sur des initiatives innovantes : opérations spéciales, programmes courts, etc.



La question de la publicité à France Télévisions semble être de nouveau dans le débat public avec la perspective de l’élection présidentielle. Qu’en pensez-vous ?

Que les recettes de France Télévisions Publicité correspondent pratiquement au montant investi dans la création [420 millions d’euros]. Si demain elles étaient retirées, il faudrait compenser sachant que France Télévisions finance à hauteur de 50% la création française. J’ajouterais qu’après 2008-2009, les 400 millions que France Télévisions a perdu sur l’après 20 heures n’ont absolument pas profité à TF1 et M6. La manne est allée un petit peu à la TNT et beaucoup aux Gafa. On pourrait aussi décider de moins financer le service public et de légiférer pour avoir davantage de ressources propres…



Google et Facebook aspirent l’essentiel de la dépense sur le digital. Cela vous inquiète-t-il ?

C’est toujours inquiétant. La concentration autour de deux acteurs est un sujet de préoccupation. La réponse ne peut être que collective. C’est le sens de l’histoire d’avoir des actions communes dans les outils et les offres pour simplifier l’accès à nos contenus et nos vidéos. J’ai été avec La Place Media à l’initiative de la place de marché sur l’ad exchange. Une plateforme de réservation participe du même esprit de mutualiser les forces des médias. C’est évidemment dans nos réflexions et nos volontés.



Et le rapprochement entre La Place Media et Audience Square ?

Pour répondre aux Gafa, on n’est pas obligé de rapprocher juridiquement les deux places. Il y a déjà eu des offres communes packagées qui ont été lancées.  Cette initiative vise à simplifier les offres et à choisir les mêmes partenaires technologiques sur le marché des invendus du real time bidding.



Avez-vous intérêt au développement de la consommation des vidéos de France Télévisions sur Youtube ou Facebook, plutôt que sur les plateformes du groupe ?

Ce n’est pas la même valeur car les prix ne sont pas les mêmes. Mais ce qui nous importe, c’est que le contenu soit consommé par le plus grand nombre, y compris sur les réseaux sociaux. En 2016, il y eu un milliard de vidéos vues sur Facebook et 1,1 milliard sur France Télévisions. Ce qui fait la valeur, c’est la qualité du contenu ! Nous avons conclu des accords avec Youtube et Facebook et lancé, début 2017, des offres packagées qui proposent de suivre les usages tout au long de la journée en fonction des quatre écrans, étendues aux réseaux sociaux. Nous embarquons ainsi le broadcast, le digital sous toutes ses formes et l’extension d’audience sociale qui complètent nos dispositifs publicitaires. Ces offres ont rencontré un très bon accueil du marché. Nous sommes entre +4% et +5% de recettes au global en janvier-février.



Et comment mesure-t-on l’audience ?

Nous avons besoin d’outils de mesure d’audience cohérents et identiques, tenant compte de l’apport de couverture sur les réseaux sociaux. Nous apportons le contexte, la puissance instantanée, la connexion et l’engagement du réseau social. Une vente en extension est ainsi cohérente.  Quand je suis arrivée, il y avait une proposition aboutie sur trois qui embarquait du digital. A la fin 2016, c’est trois sur quatre. 70% du chiffre d’affaires digital est produit par l’équipe multiscreen. De même, nous avons pris en régie Brut en février. Nous proposons des vidéos brutes sur Pluzz, Franceinfo, Facebook, Youtube, Twitter ou Snapchat.



Un décret du 15 février a assoupli les règles parrainage. Quelles conséquences pour la régie ?

On a augmenté la durée du billboard de 8 à 12 secondes. On ressent un regain d’intérêt des annonceurs pour l’intégration de leur message au contenu télévisuel, notamment dans l’hygiène-beauté, l’auto et la boisson. Le nouvel atout qui consiste à pouvoir montrer le produit et donner le slogan crée la boucle par rapport au message publicitaire. Le parrainage totalise 50 millions d’euros, soit une hausse de 20% sur un an.



Quel sera l’impact de la suppression de la pub dans les programmes jeunesse en 2018 ?

La manque à gagner est de 20 millions d’euros. Mais il y aura aussi des charges supplémentaires car il y aura une majoration des coûts de la production – actuellement de 29 millions d’euros par an - du fait de la suppression des écrans jeunesse de 4 minutes avant et après le programme. J’ai déjà dit que ce n’était pas juste. On risque la paupérisation des programmes jeunesse. Si la publicité à destination des enfants est nocive, ce qui reste à démontrer, il faut l’enlever des autres médias et des réseaux sociaux.



Qu’apportera la reconfiguration de votre plateforme Pluzz en mai ?

Ce sera une plateforme loggée. On va avoir le bénéfice de la data. C’est une excellente nouvelle car cela va nous permettre de nourrir davantage notre connaissance des publics en garantissant la visibilité, la cible et la complétion. La qualification du téléspectateur se fera sur des critères socio-démographiques mais aussi sur des goûts. Les contenus seront poussés en fonction de centres d’intérêt.



La publicité adressée sur l’IP TV est-elle aussi un chantier pour FTP ? A quand une expérimentation avec Orange ?

Nous avons ouvert un chantier avec Orange pour voir comment on peut travailler sur la TV adressée.  Je suis favorable à une innovation qui permet d’être plus précis dans l’achat d’espace et d’avoir plus d’efficacité. Quand vous vous adressez à quelqu’un concerné par la pub, vous ne pouvez qu’être moins intrusif. La pub TV adressée s’inscrit dans un label de qualité. Nous avons un avantage : nous savons décortiquer par zone géographique grâce à France 3. Sky réalise 10% de son chiffre d’affaires avec de la publicité adressée, en allant sur les marchés locaux grâce à la géolocalisation des spots.

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