Institutionnel
Après une charte sur la protection des enfants dans les médias, le débat arrive sur la scène politique avec un rapport, qui sera remis le 5 mars, sur l’hypersexualisation des petites filles.

Une fillette en robe sexy et talons aiguilles dans une pose très suggestive: l'image, publiée dans le Vogue français en décembre 2010, avait choqué. Une pétition «contre l'érotisation des images d'enfants» avait alors été lancée tandis qu'une lettre ouverte, signée par 150 médecins, alertait sur les dangers de l'hypersexualisation des petites filles.

Le débat gagne le terrain politique en cette période électorale. Le 21 février, une charte sur la protection de l'enfant dans les médias a été signée par la ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, Roselyne Bachelot-Narquin, le président d'Unicef France, Jacques Hintzy, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et le Syndicat de la presse magazine (SPM).

Le texte préconise notamment de ne pas diffuser de mises en scène érotisées ou de photos d'enfants portant des vêtements, accessoires ou maquillage à forte connotation érotique. «En tant qu'instrument de diffusion, il était important de rappeler aux médias un certain nombre de principes», estime Jacques Hintzy.

Le 5 mars, un rapport sera remis sur le sujet par Chantal Jouanno, sénateur UMP de Paris. «La charte, elle, s'attache à l'image de l'enfant dans les faits divers, à faire respecter son anonymat et à ne pas le réduire à sa souffrance», explique Pascale Marie, directrice du SPM.

Cette dernière a pesé pour que ne soit pas retenue l'autorisation préalable parentale à toute photo d'enfant ou l'obligation de prévenir ce dernier des conséquences éventuelles d'une diffusion. «Le premier élément aurait abouti à des conflits devant les juridictions pour des motifs pécuniaires, souligne-t-elle, et le second aurait amené le journaliste à se transformer en psy alors qu'il est seulement tenu d'informer des conditions de la diffusion.»

Jusqu'où les magazines de mode enfantine Marie Claire Enfants, Milk ou Doolittle peuvent-ils aller dans la mise en scène glamour? «Nous avons des règles tacites, comme de ne pas utiliser de maquillage, ne pas faire porter de talons ou ne pas photographier les enfants dans des poses d'adultes. Nous n'y dérogeons pas, les enfants doivent rester des enfants», martèle Aude Bunetel, rédactrice en chef de Milk.

«Le phénomène commercial des mini-miss touche des pays comme la Grande-Bretagne, mais il n'y a pas de dérives dans la presse française de petites filles érotisées», assure Pascale Marie.

Une exigence qui n'est pas sans conséquence. «Nous n'avons jamais pu nous résoudre à publier les images de la marque de dessous pour enfants Jours après lunes, alors qu'ils font de jolis produits. Même chose pour des maillots de bain rembourrés pour enfants de la marque Abercrombie & Fitch», ajoute Anne Bunetel.

Pour les publicités en revanche, difficile d'être aussi strict. Sauf cas flagrant d'image litigieuse, la rédaction ne censure pas les annonceurs. Et l'Autorité de régulation de la publicité ne fournit pas d'avis préalable.

Le débat touche aussi l'audiovisuel. Si les mini-miss n'ont pas gagné la télé française, ce sont les chanteuses qui se mettent en scène avec des références sexuelles (Rihanna, Lady Gaga) qui appellent le CSA à la vigilance. «Aujourd'hui, la plupart des chaînes diffusent des versions allégées en journée», estime Françoise Laborde, conseillère au CSA.

Mais le problème est aussi dans le manque de contrôle parental à propos d'émissions de radios écoutées par les 11-12 ans. «A Skyrock ou Fun, sous couvert de donner des conseils sur la relation amoureuse, on incite les jeunes à parler de façon crue et on véhicule l'idée que la jeune fille libérée doit se soumettre au fantasme du garçon», souligne la «sage», qui rappelle que Skyrock a été déboutée en appel après avoir été condamnée à payer 200 000 euros pour une discussion sur la fellation avant 22h30.

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