Lundi 1er avril, vers 16h, un communiqué d'Adventure Line Productions (ALP) producteur de l'émission de télé-réalité Koh-Lanta diffusée sur TF1, a annoncé le suicide du docteur Thierry Costa, 38 ans, médecin de l'émission depuis quatre ans. Un suicide qui survient dix jours après la mort de Gérald Babin, un candidat de 25 ans, décédé le 21 mars dernier au Cambodge après une crise cardiaque lors de la première journée de tournage de cette 13e édition définitivement annulée (1).

Le médecin a laissé une lettre, indiquant que son «nom a été sali dans les médias» et que «des accusations et suppositions injustes ont été proférées à [son] encontre». Il affirme: «Je suis certain d'avoir traité Gérald de manière respectable, comme un patient et non comme un candidat» et écrit ne pas avoir «d'autre choix» que de mettre fin à ses jours, se sentant incapable «de reconstuire sa réputation détruite»

Plainte en diffamation

A la suite du décès du candidat, des témoignages anonymes avaient remis en cause la version officielle du drame, accusant la production de négligences et de retard dans son secours au candidat. Un premier témoignage publié, le 27 mars, par le site Arrêt sur images, affirmait notamment que, pour ne pas interrompre le tournage, on a interdit au médecin d'intervenir. Dénonçant cette «accusation anonyme, mensongère et odieuse, relayée par différents médias», ALP avait aussitôt indiqué déposer une «plainte en diffamation» précisant que «les propos poursuivis mettent en cause les circonstances du décès, en particulier le rôle du médecin sur le lieu du tournage au moment du drame...».
Depuis, trois autres témoignages anonymes ont été diffusés - sur RMC, Lepoint.fr et Closer - accréditant la version du premier.

Enquête en cours

Parallèlement, le parquet de Créteil a ouvert, dès le 28 mars, une enquête préliminaire pour homicide involontaire afin de rechercher les causes de la mort du candidat.

Dans son communiqué annonçant le suicide du médecin, la production rend hommage à son «très grand professionnalisme» et «son humanité à l'égard des participants et des équipes de production» et attaquent les médias. «Cet événement tragique doit inciter ceux qui accusent et commentent sans discernement à faire preuve de responsabilité», indique ALP.

Une heure après la production, TF1 publiait à son tour un communiqué s'associant à la douleur de la famille du médecin et mettant également en cause les médias. Le président de TF1, Nonce Paolini, indiquant: «Face à cette tragédie, je laisse à leur conscience les auteurs des propos anonymes tenus sur les circonstances du décès de Gérald Babin, ainsi que ceux qui les ont colportés, avant même que toute la lumière ait été faite sur ce drame.»

Renaud Revel, redacteur en chef médias de L'Express, renchérissait sur son blog: «Elle est belle, la presse, quand elle se vautre dans la facilité et les surenchères pour vendre du papier! TF1 a naturellement sa part de responsabilité. En se murant dans un épais silence et en laissant seule la société de production de Koh-Lanta assurer sa défense, la chaîne privée a laissé libre cours à toutes les interprétations et à tous les dérapages, à tous les excès et fantasmes. Loin de tout, coupées du monde, les équipes de Koh-Lanta ont assisté les bras ballants à un lynchage médiatique en règle.» Et de conclure: «Il y a des jours où l'on se sent un peu honteux d'appartenir à cette profession.»

Qui a menti?

Pour Arrêt sur images et son fondateur, le journaliste Daniel Schneidermann, qui a aussitôt réagi, «les communiqués de la société ALP et de TF1, mettant en cause implicitement les révélations de la presse dans le suicide de Thierry Costa, semblent particulièrement malvenus».

«La nouvelle du suicide de Thierry Costa touche évidemment Arrêt sur images, qui a été le premier site à publier un témoignage mettant en cause des négligences dans les soins et l'évacuation de Gérald Babin, écrit le journaliste. Nous n'avons, et n'aurons d'autre mobile que l'établissement de la vérité, sur les conditions de la mort de Gérald Babin. Dans cet esprit, nous appelons aujourd'hui chacun à éviter toute mise en cause prématurée. [...] Au-delà des témoignages, ALP détient deux documents capitaux: le script du tournage de l'émission, qui en relate les péripéties, minute par minute, et les rushes de ce même tournage, qui devraient pouvoir apporter un éclairage sur le déroulé des événements.» Et de préciser qu'ALP a refusé de fournir ses documents aux médias. 

L' affaire appartient désormais à la justice. Ses conclusions seront très attendues car

au cœur de ce double drame, c'est la question de savoir qui a menti qui est posée. 

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