Presse
Alors que la presse écrite semble traverser l'enfer, le magazine culturel annuel Faux Q sort un nouveau numéro consacré au paradis. Gros plan sur un modèle hors pair.

Faut-il se prénommer Antigone pour se rebeller contre la décrépitude annoncée de la presse écrite ? Depuis quatorze ans, bravant les Cassandre qui prédisent la disparition des journaux papier, Antigone Schilling propose un magazine annuel culturel intelligent et drôle, fondé sur un modèle économique unique. «C'est une danseuse qui ne nous coûte rien» lâche la fondatrice de Faux Q, dans son bureau-caverne du 14e arrondissement de Paris où s'empilent dossiers, livres et collections de miniatures de parfums. «J'avais envie d'un magazine en liberté et avec de l'humour». Un magazine annuel donc. Avec un Q pour... culture. «C'est un manifeste dadaïste. J'aime ce titre provoc et sympa. Aux antipodes du politiquement correct, idiot et superficiel. Notre signature, c'est le décalage». Cette journaliste émérite, styliste et experte en parfums, n'a pas l'argent pour financer son titre. Qu'à cela ne tienne, les artistes et professionnels de la presse qui la côtoient depuis trente ans, de Vogue Hommes à Jalouse ou Slate, la suivent. Elle crée avec sa petite équipe de six personnes une association loi 1901. Personne n'est rémunéré, à commencer par eux. Et c'est dans sa cuisine qu'ils se réunissent, chacun notant sur un papier un mot qui puisse être la thématique du prochain numéro. Après Noir, Ligne, Chance, Air ou Eau, place à Paradis. Le journal fait la part belles aux photos, données par Pierre et Gilles dans ce numéro, ou Sarah Moon dans d'autres. Les textes sont signés par l'avocat Emmanuel Pierrat, le peintre Pierre Soulages, les écrivains Marie Desplechin ou Florian Zeller. L'architecte Dominique Perrault, l'écrivain Dominique Fernandez ou la productrice Sylvie Pialat y sont interviewés. Ce grand format tiré à 10 000 exemplaires est vendu en kiosques 10,01 euros... «On a choisi ce palindrome parce que l'habituel 9,99 euros est tellement hypocrite». Les treize pages de pub, avec L'Oréal, Dior et Chanel, financent productions, achat du papier et imprimeur. Antigone Schilling trouve sa gratification dans l'enthousiasme des lecteurs et interlocuteurs, fidèles ou nouveaux arrivants, bluffés par la revue.  

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