Chef de chantier

Pour mener à bien la transformation digitale d’Accor, Sébastien Bazin, le PDG du groupe hôtelier a choisi un chef de chantier trois étoiles: Vivek Badrinath, ancien directeur général adjoint (DGA) en charge de l'innovation, du marketing et des technologies d'Orange. Chez Accor, en tant que DGA, en charge du marketing, du digital, de la distribution et des systèmes d’information, Vivek Badrinath a les coudées franches et fait partie du comité exécutif. Il peut compter sur des équipes étoffées (500 personnes) et un budget conséquent consacré à cette transformation: 225 millions d’euros sur cinq ans.

Depuis son arrivée en mars dernier, au siège d’Accor (près de la bibliothèque François-Mitterrand), le «monsieur digital» d’Accor a déjà imprimé sa marque: «Il y avait deux équipes travaillant sur les datas, aux finances d’un côté et au commercial de l’autre, dit-il. J’ai créé un centre de compétences business intelligence de 40 personnes, qui regroupe ces experts de la finance, de l’analyse des flux commerciaux, et de l’informatique. Chez Accor en une journée, il peut y avoir 150 000 réservations d’hôtels: c’est de l’industrie, et il faut piloter les choses avec beaucoup de données.»

La clé de son management: tout pour le «projet». «Je veille à laisser mes collaborateurs, avancer, voire courir sur un projet, sans qu’ils soient bloqués par un accord, une validation, explique-t-il. Cela veut dire moins de reporting sur le suivi d’activité, des objectifs assez larges plutôt tournés vers le “quoi” que le “comment”, et des points de synchronisation hebdomadaires, qui se résument à “headlines only” (les grands titres).»

Accès libre.

Cette agilité se retrouve dans l’organisation: «Il faut s’arranger pour que les projets puissent se déployer indépendamment les uns des autres, constituer de petites équipes pluridisciplinaires le temps d’un projet, d’un livrable, puis les reconfigurer. Cela correspond aussi au rythme de mise à jour de nos sites ou applications.» Le manager s’efforce bien-sûr de donner du sens à tout cela: «Dès octobre, nous avons communiqué sur notre plan (“Leading digital hospitality”) de manière très large, auprès de nos salariés, partenaires, fournisseurs, prestataires… afin que tout le monde sache où l’on veut aller, expose Vivek Badrinath. Qu’ils aient une idée du tableau d’ensemble.»

Pour que son plan aboutisse, le DGA sait qu’il doit aussi «digitaliser ses employés» et, de ce point de vue, le mobile est une chance. «S’il y a une dissonance entre ce que l’on propose aux clients et ce que l’on offre aux employés, on passe à côté du service, de la promesse, note-t-il. Nous devons apporter aux 170 000 personnes sous enseigne Accor, un accès à l’information.» Du coup, il a rendu accessible à tous le réseau social interne, «Accor loundge», afin que les collaborateurs puissent partager leurs expériences, qu’il s’agisse de réparer une pompe à chaleur ou une recette de cuisine.

«Ce que Vivek a apporté, c’est une ouverture sur l’extérieur dans la façon d’aborder les sujets, constate Christine Ravanat, senior VP projets stratégiques et communication chez Accor. Il nous incite à aller échanger avec des personnes en-dehors du groupe, dans l’univers du web et des start-up.» Concrétisation de cette ouverture d’esprit: un hackaton organisé avec l’incubateur Innovation Factory (incubateur Paris 13) a donné naissance à des prototypes de chariots connectés qui optimisent le parcours des femmes de chambres. Ils sont en train d’être testés. Au pas de charge.