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Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, détaille les enjeux de communication des universités.

Pourquoi les universités redécouvrent-elles aujourd'hui les bienfaits de la communication?

Valérie Pécresse. Avant la réforme, nous étions dans une logique de service public national. Depuis 2007 et le vote de la Loi relative aux libertés et responsabilités des universités (dite loi LRU), celles-ci sont devenues autonomes et doivent se bâtir une stratégie d'établissement. Comme cela instaure davantage de concurrence entre universités, chacune d'entre elles a intérêt à retrouver ou à affirmer son identité et donc à communiquer. Et puis, désormais, les universités cherchent aussi des mécènes, des partenaires financiers: elles ont besoin de se faire connaître, en particulier auprès des grands patrons, qui ignorent pour la plupart leurs spécificités et leurs réalisations.

 

Du coup, elles s'engagent dans une nouvelle stratégie de marque?

V.P. Bordeaux I, II, III ou IV, vu depuis Shanghai ou New Delhi, cela n'avait aucun sens, c'était même absurde. La compétition est mondiale et nous venons encore d'en avoir la preuve: le professeur Luc Montagnier, 78 ans, codécouvreur du virus du sida et prix Nobel, a été recruté en décembre par une université chinoise. Il faut dire qu'un prix Nobel, cela rapporte des points dans les classements! Alors pour qu'elles s'imposent à l'international, nous incitons les universités à se regrouper au sein des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (Pres). Aujourd'hui il y a vingt et un Pres, et cela a abouti à la création d'une seule marque par territoire: un pôle à Lyon, à Bordeaux, à Toulouse, etc. Ces pôles géographiques confèrent aux universités une image de marque plus forte, y compris à l'international, ce qui est crucial pour attirer des étudiants et les meilleurs enseignants.

 

Comment s'explique le désamour pour les marques universitaires?

V.P. Savez-vous quelle université a fait le président de la République actuel ou le Premier ministre? Paris X Nanterre pour l'un, Paris V René-Descartes pour l'autre. Aux États-Unis, ces universités communiqueraient largement là-dessus. En France, il y a un problème de fierté et d'identité. Mais la tendance est en train de s'inverser: l'année dernière, il y a eu 13% des élèves de terminale de plus – soit 80 000 – qui ont indiqué une université comme premier choix. C'est d'autant plus intéressant quand on sait que l'information sur ces prises de décisions en dernière année de lycée s'effectue surtout par bouche-à-oreille et Internet.

 

Pourquoi y a-t-il une nouvelle bataille autour de la marque Sorbonne?

V.P. Après 1968, la Sorbonne a été scindée en huit entités. Et en 40 ans, alors que l'image de l'université française disparaissait totalement, seule la marque Sorbonne survivait. Du coup, aujourd'hui trois pôles de recherche et d'enseignement supérieur à Paris ont repris ce nom: Sorbonne université, Sorbonne Paris Cité et Hautes Études Sorbonne arts et métiers (Hesa). Je ne peux pas faire renoncer une université à la marque Sorbonne! Cependant, les noms de ces groupements en région parisienne ne sont pas encore stabilisés. Ils pourraient encore évoluer.

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