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Début 2011, la directrice générale du Temps a mis en place un modèle innovant pour le site Internet du quotidien suisse. Un pari qu’elle ne regrette pas.

Valérie Boagno n'est pas une personne qui tergiverse. «C'est une femme qui doute souvent, mais une fois qu'elle s'est fait une conviction, elle s'y tient et ne regrette pas», estime Pierre Veya, rédacteur en chef du Temps. Pas surprenant donc que celle qui a été nommée en décembre 2009 directrice générale du quotidien suisse - diffusé à 44 550 exemplaires payés - défende avec ferveur le modèle qu'elle a mis en place au début de l'année pour le site Internet du journal.

 

Le 12 janvier, deux mois avant le New York Times, Letemps.ch a adopté un mur payant: au-delà de 15 articles consultés par mois, l'internaute doit ouvrir son porte-monnaie pour continuer à lire les contenus produits par la rédaction. «Je suis très pragmatique, juge Valérie Boagno, mais aussiquelqu'un de déterminé. Quand j'ai l'impression qu'il faut y aller, je ne lâche pas, je vais essayer de rallier les autres à mes convictions. Mais j'accepte de pouvoir me tromper», assure-t-elle.


Exigence bénéfique

 

Cette fois-ci, les chiffres lui donnent raison. Certes, la fréquentation du site a baissé de 16% sur la période janvier-avril par rapport à 2010, à 135 000 visiteurs uniques. Mais dans le même temps, le chiffre d'affaires publicitaire numérique a bondi de 67%. «Ce qui est important, c'est la marque et la cohérence entre les différents supports. Lorsque c'est le cas, les journalistes sont moins réfractaires à donner de l'information d'abord sur le Web quand ça se justifie», explique celle que PME Magazine a appelé «la femme la plus puissante de la presse suisse».

Déjà en 2009, elle avait dû faire preuve de courage et de fermeté lorsqu'en pleine crise, elle annonçait la suppression de 10 postes sur un total de 140 au Temps, propriété des groupes Ringier et Tamedia. «Elle est très respectée pour sa rigueur financière», estime Anouch Seydtaghia, président de la Société des rédacteurs et du personnel. Pour autant, «elle a de très bons rapports humains. Elle prend le temps d'écouter et se montre très disponible», ajoute-t-il.

 

Avant d'arriver au sommet, Valérie Boagno a commencé sa carrière au bas de l'échelle, d'abord sur la vente d'annonces pour les magazines du groupe Ringier, puis comme directrice commerciale du Nouveau quotidien, lancé par Jacques Pillet, son mentor, en 1991. «Ça m'a appris l'humilité, l'importance des gens et le respect du travail», se souvient celle qui a été désignée manager média de l'année 2010 par le magazine Schweizer Journalist.

 

Un parcours qui a nourri son ambition. «J'ai du mal à comprendre les gens qui disent qu'ils ne peuvent pas, qui se mettent des barrières», affirme-t-elle. «Elle peut se montrer dure avec les gens qui ne sont pas à la hauteur. Mais globalement, elle fait grandir ses collaborateurs parce qu'elle place beaucoup d'espoirs en eux», se réjouit Virginie Fortun, en charge du développement stratégique et membre du comité de direction. Une exigence bénéfique, en somme.


Son parcours en bref

2 avril 1965. Naissance à Yverdon-les-Bains, en Suisse romande.
1989. Entrée au groupe Ringier Romandie, au service commercial.
1991. Rejoint Edipresse comme directrice commerciale du Nouveau quotidien.
1998. Directrice commerciale du Temps, puis directrice adjointe.
Décembre 2009. Directrice générale du Temps.

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