Institutionnel
Une étude consacrée à la sphère publique, qui inclut les entreprises où l'Etat a une participation comme les institutions, fait ressortir l'importance de la gouvernance des autorités de régulation.

«En termes d'image, ce qui m'a le plus frappé, c'est la montée en puissance des autorités de contrôle. C'est là le signe d'une grande maturité et de la vivacité démocratique de notre débat public.» En présentant son étude «V com V» consacrée aux acteurs de la «sphère publique», soit 43 entreprises ou institutions françaises dont l'Etat est partie prenante, Vincent de La Vaissière est heureux de refléter une réalité: la puissance publique a su accoucher d'autorités de régulation qui sont, pour la plupart, respectées et ont su conforter leur rôle.

C'est ce qui ressort de son enquête menée pendant six mois auprès de 170 journalistes français et anglo-saxons. L'illustration la plus parlante en est donnée par l'Autorité de la concurrence, présidée par Bruno Lasserre, en 4e place des patrons les mieux notés de son classement. «L'Autorité des marchés financiers, faible avec les forts et forte avec les faibles, n'a qu'à aller se rhabiller, assène-t-il. L'Autorité de la concurrence est aujourd'hui reconnue pour son indépendance totale et son pouvoir de sanction inégalé.» Mieux, en termes d'influence politique et médiatique, elle a selon lui explosé en 2013.

Ce qui est vrai de cette institution l'est aussi de la Cour des comptes, même si elle n'a pas de pouvoir de sanction. Son président, Didier Migaud, s'impose à la cinquième place. Et l'on retrouve cette autorité instaurée ou retrouvée chez la plupart des organismes de contrôle, que ce soit le CSA (audiovisuel), l'Arcep (télécoms) ou même la DGA (armement) et l'ASN / IRSN (nuclaire).

Ministre bis de la Communication

A la tête du Conseil supérieur de l'audiovisuel, Olivier Schrameck (9e), conforté par la loi de novembre 2013 qui lui donne des pouvoirs de régulation économique, réalise selon lui un «sans-faute» qu'atteste l'élection de Matthieu Gallet à la présidence de Radio France, signe incontestable d'indépendance politique.

«C'est super-Schrameck», ose Vincent de La Vaissière, qui sait qu'on voit en lui une sorte de ministre bis de la communication alors que son collège «n'est pas toujours complètement à la hauteur». «Il ne se contente pas de réagir en père fouettard du PAF mais définit un cap, ajoute-t-il, réfléchit au nouveau modèle économique des médias, ce qui lui donne un surcroît d'influence».

Caractéristique de ces nouveaux régulateurs: ils ont su s'imposer parfois au forceps dans les médias. Jean-Ludovic Silicani, le président de l'Arcep, a ainsi bataillé pour l'arrivée d'un quatrième opérateur de télécommunication, ce qui lui vaut l'hostilité de Bouygues et du ministre Arnaud Montebourg. Le patron de la Direction générale de l'armement, Laurent Collet-Billon (10e), qui a survécu à l'alternance, a plus d'importance que le ministre de la défense en matière de dépenses d'armement de la France.

Quant à l'Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN), présidée par Dominique Le Guludec, il s'est imposé après Fukushima - avec l'agence de sécurité nucléaire - comme un chien de garde en modélisant le coût d'un accident nucléaire en France ou en emmenant une dizaine de journalistes au Japon, à Noël. Avantage de cet organisme de contrôle: il apparaît d'autant plus crédible qu'il n'est ni dans la nucléophilie ni dans l'antinucléaire.

Capacité à incarner leur institution, à vendre une vision stratégique, à avoir une idée extensive de leur rôle... Dans une Europe de la libre concurrence, les présidents de ces institutions profitent certes d'un certain affaiblissement de l'Etat actionnaire. «Mais la composante principale, c'est leur personnalité: probité, hauteur de vue et intelligence tactique», conclut le fondateur de V com V. Quitte à ce que cette personnalité se heurte à la susceptibilité de certains ministres.

 

 

Encadré

 

Les grands gagnants de l'étude


Thomas Enders (Airbus), Alexandre de Juniac (Air-France KLM) et Jean-Yves Le Gal (CNES, ex-Ariane Espace) sont les trois gagnants de l'étude V com V. A noter: en 6e place, Véronique Cayla, présidente d'Arte France. «Tous ont en commun la réussite européenne, l'esprit de réforme et l'affirmation de contre-pouvoirs», note Vincent de La Vaissière.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.