Dossier Conseil

Les agences de relations publics ont renoué avec la croissance en 2021, après une année 2020 de mise à l’épreuve.

La crise sanitaire a été vécue très différemment par les agences en fonction de leur profil, particulièrement en 2020. Celles ayant des clients dans l’hôtellerie, le tourisme, le retail (les magasins non essentiels) ou encore la restauration ont pâti de coupures de budgets. Celles ayant des clients dans les domaines de l’IT, de la santé ou de la grande distribution ont été relativement préservées. Encore faut-il que leur activité n’ait pas été essentiellement concentrée sur l’événementiel, corde sensible de la communication ces deux dernières années. Pour autant, la « casse » semble avoir été limitée. « Il n’y a pas eu de fermeture à ma connaissance, et au niveau du syndicat, nous avons mis en place des dispositifs d’information au sujet des aides de l’État », répond Pascale Azria, présidente du Syndicat du conseil en relations publics (SCRP) et directrice générale de l’agence Kingcom.

Bonne dynamique

Mieux encore, en 2021, les agences RP ont été sur une bonne dynamique. Elles auraient enregistré une augmentation moyenne de 10 % à 15 % de leur chiffre d’affaires, selon des chiffres encore non officiels mais divulgués par plusieurs professionnels interrogés. Sur les 15 agences contactées par Stratégies, une seule n’a pas souhaité donner d'indications sur ses résultats en raison de la crise du covid.

Les autres se félicitent de leur année. « On récupère doucement : on a fait -15% en 2020 et +5% en 2021 sur la partie brand management, communication interne et événementielle », confie Philippe Lucas, PDG de Wellcom. Céline Angelini, présidente de l’agence Marie-Antoinette, constate : « L’agence est en croissance mais nous ne sommes pas encore revenus aux taux d’avant-crise. » Même de plus petites structures semblent s’en être bien tirées. « Nous avons traversé la période sereinement », assurent Meriem Kadari et Douha Cherif, directrices de l’agence 3icom. « J’ai fait une très bonne année 2021, qui a été très dense, avec les gains de plusieurs budgets », s’enthousiasme pour sa part Nathalie Roland, qui a fondé Blondie Paris en mars 2019, un an avant le premier confinement.

« Les entreprises ont saisi l’importance de garder le lien avec les médias, a fortiori durant cette période complexe », analyse Sabrina Curto-Laverny, qui officie seule au sein de son entité SCL Conseil, lancée en mars 2020 et située dans le Grand Est. Elle est rejoint par Pascale Azria : « Les points de contacts, où la marque va entrer en conversation, toucher ou sensibiliser ses publics, se sont éclatés. L’univers s’est complexifié et nécessite de se faire accompagner par des experts. » Cette nécessité n’a pourtant pas empêché certaines entreprises, tourmentées par la crise, d’interrompre leur collaboration avec leur agence ou de négocier des reports de paiements. « En 2020, un quart de nos clients a gelé les contrats pendant deux mois », se remémore Sibylle de Villeneuve, fondatrice de l’agence Raoul. « Certains budgets ont été déplacés dans le temps mais il n’y a pas eu d’impact au global », temporise de son côté Marc Chauchat, CEO de BCW France.

Céline Angelini cite l’exemple d’Autogrill, un client avec lequel son agence a resigné en janvier 2022 pour une mission d’accompagnement sur LinkedIn, après deux ans d’absence en raison de la fermeture des restaurants. Elle nuance cependant sur les coupes de budgets : celles-ci n’auraient pas forcément été drastiques mais auraient surtout concerné les « pockets », c’est-à-dire les projets complémentaires, annexes des activations principales. Cette constriction ne serait toutefois pas valable pour les clients du secteur alimentaire, qui ont eu tendance, au contraire, à débloquer des budgets, selon plusieurs sources. « Des groupes ont pu être amenés à prendre des précautions budgétaires. Cela a été compensé par les enveloppes d’autres clients qui ont vu leur rythme de communication s’accélérer », abondent Charles-Antoine Colomb et Cécile Granat, managing directors d’Hopscotch PR.

Inquiétudes autour des pénuries

« Aujourd’hui, le sujet d’inquiétude des agences n’est plus tant porté sur la crise sanitaire que sur celles de la pénurie des semi-conducteurs et des matières premières », considère Pierre-Hubert Meilhac, head of PR & influence d’Ogilvy Paris. Une vigilance que partage Céline Angelini : « Un de nos clients, acteur du monde de l’emballage, a réduit la voilure car il préfère jouer la carte de la prudence. » Cette préoccupation n’a, pour l’heure, pas d’effet sur les appels d’offres, repartis à la hausse en 2021. « Nous n’avons jamais répondu à autant d’appels d’offres qu’en cette fin d’année », se réjouit Julien Monet, CEO de Monet & Associés. « Il y a entre cinq et huit appels d’offres entrants par mois », indique Sibylle de Villeneuve. « Les annonceurs ont envie de changer d’agence, de voir ce qu’il se fait ailleurs pour repartir sur de nouvelles bases », explique Julien Monet.

Ces nouveaux projets appellent le recrutement de talents, un sujet épineux pour la majorité des directeurs d’agences interrogés. La pénurie de candidats serait due, selon eux, aux reconversions professionnelles. Un avis nuancé par Pascale Azria, présidente du SCRP. « Comme le métier se développe et le périmètre grossit, on n’a pas assez de professionnels expérimentés », expose-t-elle. « Tout le monde recrute en même temps », résume Pierre-Hubert Meilhac. « Il y a aussi eu tout l’effet Balance ton Agency, qui a occasionné un ras-le-bol », estime de son côté Julien Monet, dont l’agence vient de recruter, pour la première fois, une responsable RH.

Certaines agences font appel à des recruteurs, d’autres mises sur la cooptation, toutes cherchant à se rendre attractives. À Rumeur Publique, Christian Giacomini, son fondateur, dit « investir énormément dans la formation ». Pour Gaëlle Legris et Marianne Felce-Dachez, fondatrices de l’agence Léon, « la bataille va se jouer sur la réévaluation des salaires ». Sur ce point, l’agence Wellcom a mis en place en 2021 une grille pour « jouer le jeu de la transparence », selon Philippe Lucas. Les agences partent donc en campagne pour 2022 et cette année présidentielle pourrait être celle d’un retour à la normale et d'un « business as usual ».

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