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Changement d’actionnaires, acquisitions pour se développer sur de nouvelles activités, alliance… Les annonces se sont multipliées ces derniers mois dans le secteur des études. Retour sur cinq faits marquants. Un article également disponible en version audio.

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- L’Ifop accueille le fonds LFPI

L’été 2022, l’Ifop, le plus vieil institut d’études et de sondages français, fondé en 1938, a changé de propriétaire. Celui-ci, qui emploie 300 personnes en France (et une cinquantaine à l’international), est désormais entre les mains du groupe Financière patrimoniale d’investissement (LFPI). L’Ifop était détenu depuis 2016 par la famille Dentressangle, qui elle-même avait acquis une participation majoritaire auprès de la famille Parisot six ans plus tôt. « L’accompagnement de la famille Dentressangle a permis à l’entreprise de retrouver une profitabilité avec un développement international en Asie et, plus récemment aux États-Unis, ainsi qu’une croissance organique et une croissance extérieure avec des acquisitions [Sociovision en 2018, Occurrence en 2022] », rapporte Stéphane Truchi, président du directoire de l’Ifop. En 2022, l’institut a réalisé 50 millions d’euros de chiffres d’affaires, avec une croissance organique de 9 % sur un an. De plus, son chiffre d’affaires a doublé aux États-Unis, à 4 millions de dollars, « et on pense encore le doubler en 2023 », s’enthousiasme Stéphane Truchi.

Avec le fonds d’investissement LFPI, l’Ifop entame donc « son deuxième cycle de développement », d’après lui. L’Ifop poursuit d’ailleurs cette dynamique avec une nouvelle acquisition : l’institut annonce le rachat de Brain Value, société spécialisée dans les études qualitatives et le planning stratégique, qui lui apportera une vision prospective. Un an auparavant, en avril 2022, l’Ifop avait fait l’acquisition d’Occurrence. « Le postulat de départ qui consistait à affirmer que l’enjeu était de "coudre" et non dissoudre Occurrence est parfaitement respecté. La marque, les équipes, les processus, sont inchangés, commente de son côté Assaël Adary, fondateur et président d’Occurrence. De vraies synergies commerciales apparaissent notamment sur l’intégration de l’analyse des réseaux sociaux dans les études d’opinion. » Fait notable, Occurrence a réalisé une croissance de 13,8 % en 2022.

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- Les Échos-Le Parisien entre au capital d’OpinionWay

OpinionWay, institut qui emploie 120 personnes, a également connu un changement majeur en juillet 2022. Jusqu’alors indépendant, il a accueilli le groupe Les Échos-Le Parisien (propriété de LVMH) à son capital pour une prise de participation à hauteur de 75 %. Luc Balleroy, directeur général d’OpinionWay depuis 2011, commente : « Il s’agit là d’une démarche volontaire : nous avons mandaté le conseiller financier Lazard pour trouver un fonds ou un industriel capable de nous accompagner dans notre développement international. L’offre qui nous a paru la plus pertinente était celle du groupe Les Échos-Le Parisien, avec qui nous avions déjà l’habitude de collaborer. L’objectif du groupe est de devenir une media tech company, cela résonne avec ce que nous sommes, à savoir une survey tech company. »

De plus, si des synergies sont envisagées, notamment une alliance avec Les Échos Études, l’institut dit garder son indépendance. C’est-à-dire qu’il peut continuer à travailler pour des titres de presse en dehors du groupe, de même que Les Échos et Le Parisien peuvent collaborer avec d’autres instituts d’études. OpinionWay a été cofondé en 2000 par des anciens d’Ipsos, dont Hugues Cazenave et Yann Aledo. Ces derniers, auparavant actionnaires majoritaires, détiennent désormais environ 20 % du capital. Les 5 % restants sont détenus par les membres du comex.

- Onclusive se positionne sur l’analyse média

Début 2022, Symphony Technology Group (STG) a fait trois acquisitions, dont une majeure : celle de l’activité Reputation Intelligence de la division média de Kantar, en intégrant les 400 experts de ce département. Dans le même temps, elle a racheté l’entreprise américaine Onclusive, spécialisée dans l’intelligence artificielle et la data science, et la britannique PRgloo, plateforme de relations médias, à destination des services de communication. Dans le courant de l’année, ont suivi d’autres acquisitions stratégiques dans l’analyse média.

« L’objectif est de choisir différentes entreprises qui s’apportent mutuellement », commente Corinne Foucault, directrice générale France du nouveau groupe réuni sous le nom d’Onclusive, et ce, aussi bien en termes de métiers que de situation géographique. STG a donc poursuivi ses acquisitions avec la plateforme américaine de veille médiatique Critical Mention et la Française Digimind, spécialisée dans le social listening (l’écoute des médias sociaux) et la market intelligence. En mai, les équipes de Digimind (soit 100 personnes) rejoindront le siège social d’Onclusive (500 collaborateurs en France, 1 500 dans le monde) à Courbevoie.

- Episto poursuit sa croissance et s’installe à Londres

À l’hiver 2018, en pleine crise des Gilets jaunes, Jérémy Lefebvre et Alexis Watine ont l’idée de digitaliser le Grand Débat en sondant la population sur les réseaux sociaux. En quelques semaines, ils interrogent 16 000 personnes. « Se clarifie alors l’idée d’Episto », relate Jérémy Lefebvre, CEO de cette société d’études marketing et d’opinions (30 collaborateurs). L’innovation d’Episto réside dans le « social sampling » : l’utilisation des social ads pour recruter de manière très ciblée les sondés. Ces derniers, en cliquant sur les publicités, sont redirigés vers les questionnaires conversationnels d’Episto qui offrent une expérience assez ludique aux sondés.

« En général, les gens vont au bout de nos questionnaires », précise Jérémy Lefebvre. Les réponses sont agrégées sur une plateforme et les résultats des études sont présentés sous forme de data visualisation. La société parisienne, dont la croissance est à trois chiffres chaque année depuis sa création, a réalisé une levée de fonds de 1,6 million d’euros en 2021. En 2022, elle poursuit son développement en ouvrant un bureau à Londres car le marché des études au Royaume-Uni est « deux à trois fois plus important qu’en France », justifie Jérémy Lefebvre.

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- June Marketing fait l’acquisition de Jam

Lancé en 2015, Jam est à l’origine une communauté d’entraide basée sur le savoir-faire conversationnel et animée par un chatbot, nommé Jam, qui répond gratuitement via des messageries instantanées, comme Messenger, aux questions des étudiants pour les aider à trouver un stage, un job, un appartement ou même des bons plans pour leurs sorties (bars, concerts…). Jam faisait partie de la société Blackbird, fondée en 2013 par l’entrepreneuse Marjolaine Grondin. En 2022, l’agence conseil et d’études marketing June Marketing (35 collaborateurs) a racheté l’activité Jam, sa communauté et son chatbot.

« Aujourd’hui, notre communauté compte plus de 700 000 jeunes, dont 70 000 qui sont quotidiennement sollicités pour dialoguer avec Jam, les autres pouvant être réactivés selon les besoins », explique Laure Benaroya, CEO de June Marketing. « L’une des spécificités de Jam, c’est son approche conversationnelle qui permet d’engager les jeunes et ainsi d’obtenir des réponses riches, sincères et authentiques. Jam utilise un ton volontairement humain et de proximité avec les jeunes », poursuit-elle. Ainsi, la communauté Jam est régulièrement interrogée sur des sujets sociétaux ou d’actualité, et peut être sollicitée par des clients à des fins d’exploration et de compréhension de la cible GenZ sur des sujets spécifiques.

« Lors des conversations, il est possible de poser à la fois des questions ouvertes et fermées, ce qui nous permet de récolter de la donnée qualitative et quantitative au sein d’une même conversation », ajoute Laure Benaroya. À titre indicatif, June Marketing a réalisé en 2022 une étude pour un groupe dermo-cosmétique sur les perceptions et les besoins des jeunes, en France et au Royaume-Uni, en matière de soins de la peau. La stratégie d’acquisition de Jam s’avère payante pour June Marketing, qui a connu une croissance de 5 % en 2022, avec un chiffre d’affaires de 6,1 millions d’euros. Depuis le début d’année, les équipes de la société travaillent à étendre l’approche « social messaging » (l’interrogation par la conversation) à d’autres cibles afin de compléter l’offre de Jam.

Elabe et LinkUp font alliance

Le cabinet de conseil Elabe, qui a été créé en 2015 sur un modèle différenciant, à savoir le « conseil objectivé » grâce à l’apport de données, s’est rapproché, en septembre 2022, de la société LinkUp, spécialisée en stratégie et communication RSE. Les entreprises appartiennent depuis au même groupe, détenu par les associés des deux entités. « L’ambition de notre projet est claire : permettre aux entreprises et aux acteurs professionnels d’accroître leur utilité sociale », explique Bernard Sananès, président du groupe Elabe. Si les deux marques restent distinctes « pour ne pas diluer leurs expertises », selon Bernard Sananès, elles sont rassemblées dans les mêmes locaux et développent des offres communes. Ce n’est pas la première opération pour Elabe qui, en 2016, avait fait l’acquisition de l’institut Médiascopie, société spécialisée dans l’évaluation de la réception des discours de dirigeants.

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