Deux journalistes viennent de rendre un rapport de tendances sur le CES de Las Vegas, réalisé avec des outils d’IA. Retour d’expérience, à l’heure où ChatGPT ne cesse de susciter des interrogations, notamment sur la façon dont il pourrait faire évoluer une série de métiers.

OBJECTIF

Tester un potentiel.

Jusqu’où iront les outils d’intelligence artificielle (IA) ? C’est l’une des questions qui a animé l’agence de communication AxiCom (WPP) pour mettre en œuvre un projet singulier : la rédaction d’un rapport de tendances sur le dernier CES de Las Vegas, par deux journalistes, avec l’aide d’outils d’IA.

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« L’idée était de tester le potentiel de ces outils tech en matérialisant le dispositif autour du CES, une plateforme toute choisie pour cela, entame François Gobillot, directeur d’AxiCom France et Benelux, agence qui s’intéresse à la fois à la prospective, à la création de l’information et à la technologie, lors de la présentation du rapport, le 14 février. La survenue de ChatGPT donne une nouvelle résonance au projet ».

MOYENS

Pas de « grand remplacement ».

Jean Rognetta et Maurice de Rambuteau, deux journalistes indépendants, se rendent à Las Vegas afin d’arpenter les allées du salon et de réaliser des interviews. S’ensuit un travail de synthèse et d’analyse pour aboutir aux 128 pages du rapport en version française. « Je ne crois pas au grand remplacement [des journalistes par les robots]. Il reste une part non robotisable du travail journalistique que nous avons voulu aller préciser », témoigne Jean Rognetta, qui, avec son coauteur, a notamment utilisé OpenAI GPT-3 et Writesonic pour la rédaction et Midjourney AI pour l’élaboration de la couverture du rapport. Le budget pour le projet s’établit « entre 10 000 et 20 000 euros », selon Axicom.

RÉSULTATS

Une difficile synthèse.

Le rapport alterne analyse de tendances (impératif soutenable, objets connectés, nouvelle mobilité…) et fiches descriptives sur des innovations, classées par noms de sociétés. Pour les journalistes, l’IA a représenté un gain de temps, par exemple pour synthétiser les données sur les entreprises citées et écrire les fiches, ainsi qu'une aide à contextualiser l’information sur le terrain. En revanche, « la synthèse a fait apparaître une première limite du travail du robot. Il peut synthétiser plusieurs pages mais a du mal à en dégager des tendances journalistiques », relate Maurice de Rambuteau. Les sept choisies ont été élaborées par les auteurs, qui ont aussi réalisé un travail d’édition (grammaire…), de hiérarchisation et de vérification de l’information, autant d’étapes apparues comme non délégables.

L’un des enseignements de l’initiative est relatif aux compétences que la généralisation de ces outils - qui n’est pas pour demain - ferait particulièrement attendre chez les journalistes : « le terrain, les interactions humaines, distinguer le bon grain de l’ivraie [autrement dit, des fake news], la capacité à obtenir de l’information », détaille Jean Rognetta. Sans oublier la maîtrise des outils d’IA en eux-mêmes, par exemple la capacité à formuler les bonnes questions pour obtenir des réponses adaptées. Les outils représentent, par ailleurs, un potentiel pour les éditeurs, qui pourraient les entraîner à rechercher des informations dans leur propre base documentaire. Le résultat en serait un article qui viendrait synthétiser tous les autres déjà publiés sur le même sujet.

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