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De Bordeaux à Chambéry, en passant par Nantes ou Montpellier, tour de France de quelques-unes des pépites de la French Tech dans le secteur de la communication, des médias et de l’ad tech.

Displayce à Bordeaux : le DOOH en temps réel

L’idée lui est venue en 2014 alors qu’elle faisait carrière, à Bordeaux, chez Cdiscount. « Je me suis rendu compte qu’il y avait une faiblesse pour générer du trafic en magasin via l’affichage. Ce média devenait digital mais la manière d’acheter restait traditionnelle. Il fallait passer commande très à l’avance et je pouvais acheter toute la Gironde, par exemple, mais pas uniquement les panneaux qui m’intéressaient autour de mon magasin », raconte Laure Malergue. Displayce, première plateforme en temps réel d’achat d’espace de panneaux digitaux, était née. Laure Malergue, 40 ans, qui en est la CEO, emploie aujourd’hui 18 personnes sur les quais de la Garonne et prévoit d’atteindre 30 salariés fin 2022 devant la forte croissance de son activité. Ses clients ont accès à un parc de 500 000 panneaux digitaux dans le monde, qu’ils peuvent acheter via le programmatique et le RTB, de façon ciblée. En la matière, le nerf de la guerre reste la data. « Nous essayons par exemple de savoir où sont les étudiants entre midi et deux grâce aux données mobiles », explique la fondatrice de la start-up. Selon elle, l’implantation à Bordeaux est un atout pour attirer des profils technos très disputés. Displayce met le cap aujourd’hui sur l’Espagne et l’Italie que la start-up veut conquérir.

Brandeploy à Annecy : le content automation

Après vingt ans de carrière au marketing de grands groupes, dont Seb, basé à Annecy, Jean Naveau a lancé sa start-up avec une idée en tête : industrialiser le processus de production de contenus à l’heure où les réseaux de diffusion se multiplient. Avec ses associés, dont l’un a fondé le site 750g avant de le revendre, le quadragénaire a ouvert Brandeploy en 2020 et revendique aujourd’hui, avec dix employés, une quinzaine de clients et 600 utilisateurs. Sa plateforme de content automation « permet à n’importe quel marketeur de créer des contenus et de les publier directement depuis l’outil avec une traduction automatique », dit-il. Jean Naveau cite le cas de l’un de ses clients, un viticulteur, qui raconte tous les jours une histoire sur Instagram ou Facebook en utilisant des photos prises par ses ouvriers agricoles dans les vignes. Des chaînes de restauration y trouvent aussi leur compte pour publier des offres spéciales ou la prochaine soirée karaoké. Annecy, avantage ou inconvénient pour réussir ? « Ce n’est plus une question, tout se fait en visio, on peut devenir un leader mondial du content automation en étant ici », tranche Jean Naveau.

Be my media à Chambéry : l’éducation aux médias

Rien ne destinait Bertrand Giffon, 30 ans et charpentier de formation, à lancer en 2018 une application destinée à éduquer lycéens et étudiants à l’information et aux médias. Ce sont des discussions autour du sujet avec son associé, ex-responsable de l’innovation au Cnam à Lyon, qui l’ont décidé à monter sa start-up, Be my media, à Chambéry. « Nous nous sommes aperçus que l’information, chez les jeunes, était considérée comme un divertissement et ça nous a terrorisés. Certes, l’information peut l’être, mais la presse est aussi le premier pourvoyeur du débat démocratique et un outil au service du développement de la citoyenneté », estime Bertrand Giffon. L’outil mis à disposition des classes comprend un agrégateur de contenus en provenance de 400 sources d’information, des capsules pédagogiques à valider tout au long du cursus pour obtenir son certificat, et un serious game. « L’information, c’est comme les maths, pour développer ses compétences, il faut la pratiquer, c’est-à-dire lire, comparer les sources », estime-t-il. Depuis le début de son activité, Be my media a équipé 14 000 jeunes, surtout dans l’enseignement supérieur, et vise d’ici à 2024 les 100 000 utilisateurs par an.

Skeepers à Marseille : l’engagement client

Qu’y a-t-il de mieux pour parler à un consommateur d’un produit ou d’un service qu’un autre consommateur ? En partant de ce constat, la société Avis Vérifiés, lancée à Marseille en 2012 par Olivier Mouillet, est devenue l’un des leaders de cette activité, qui permet à une marque de s’appuyer sur l’engagement de ses clients. En 2019, la start-up a pris un tournant avec une levée de fonds de plus de 30 millions d’euros auprès du fonds d’investissement américain PSG. Devenue Skeepers, la société a tissé en France un réseau autour de l’engagement client, rachetant successivement des pépites du secteur à Nantes, Toulouse, Rennes et Lille. « Nous accompagnons les marques en leur donnant accès à une plateforme unique », explique Pascal Lannoo, directeur de la stratégie de Skeepers, un ancien de Oui.SNCF, recruté par la start-up marseillaise en 2020. « Nous avons des ambitions fortes pour 2022 et 2023 », revendique le quinquagénaire. Déjà présent à Madrid, Cologne et Milan, Skeepers, qui compte aujourd’hui 450 employés et connaît une croissance annuelle de 40%, veut devenir le champion européen de l’engagement client. Elle mise aussi sur les nano et les micro-influenceurs avec le rachat à Paris de deux plateformes spécialisées dans ce secteur.

Easypicky à Montpellier : l’IA de merchandising

Marine Bibal et Renaud Pacull ont révolutionné le quotidien des commerciaux chargés d’effectuer les relevés de leurs gammes dans les supermarchés. Easypicky, leur start-up lancée en 2017, propose une application de reconnaissance produit en vidéo et sans réseau basée sur l’intelligence artificielle. Elle dispose d’une réelle avance technologique par rapport aux concurrents limités à la photo et qui fonctionnent en ligne. Destinée au départ à des usages grand public, leur technologie permet aux commerciaux de Danone, Unilever ou L’Oréal de visualiser rapidement, depuis un téléphone ou une tablette, un produit manquant en rayon, un autre, mal placé ou trop proche d’un concurrent. À Montpellier, l’équipe d’Easypicky compte aujourd’hui 30 personnes et veut doubler de taille cette année. « Nous recrutons des développeurs, des docteurs en intelligence artificielle, des chefs de projet, des commerciaux », précise Marine Bibal, qui ne cache pas ses ambitions internationales. Leur moteur de reconnaissance pourrait aussi, selon la trentenaire, servir dans d’autres domaines, comme celui de la gestion des éoliennes. Les faire ralentir quand des oiseaux s’approchent ne devrait pas être trop ardu. Leur IA différencie bien une brosse à dents souple d’une dure…

Sellsy à La Rochelle : le CRM des PME

Avec 7,2 millions d’euros de chiffre d’affaires, 100 employés et près de 6 000 clients actifs, soit 35 000 utilisateurs, Sellsy, créée en 2009, est désormais une scale-up. « Mais on garde l’esprit start-up et on continue d’innover », précise son dirigeant, Alain Mevellec. Dans une autre vie, ce quinquagénaire a géré une agence de publicité à Paris avant de revendre un site de rencontres à Meetic puis de se tourner avec un associé vers le marché des entreprises. Leur offre ? Une suite logicielle qui se présente comme un couteau suisse de la gestion commerciale. Par rapport à un logiciel CRM classique centré surtout sur les besoins des commerciaux, Sellsy intègre l’ensemble des interactions d’une entreprise avec ses clients ou ses prospects, lui évitant ainsi d’avoir à acheter plusieurs outils différents et impliquant davantage de collaborateurs. Les PME, peu convoitées par la concurrence selon Alain Mevellec, sont les premières ciblées. Aujourd’hui très franco-française, son entreprise veut maintenant se développer à l’international. Une levée de fonds record de 55 millions d’euros, effectuée en début d’année auprès du fonds américain PSG, devrait le lui permettre. 80 recrutements sont programmés cette année. Le cadre de vie de La Rochelle ne devrait pas rebuter les talents.

Inod Solutions à Laval : la réalité virtuelle au service des entreprises

C’est en œuvrant dans le bâtiment comme chargé d’affaires qu’Anthony Hacques, 37 ans, a pris conscience de la difficulté pour le commun des mortels de se projeter à partir d’une simple lecture de plan. Avec un associé, le trentenaire a alors eu l’idée de proposer des solutions pour s’immerger plus facilement dans son futur espace de vie ou de travail. Et quand on est à Laval, capitale de la réalité virtuelle avec Laval Virtual, premier salon du genre en Europe, la VR s’imposait. Six ans après le lancement d’Inod Solutions, la société, forte de sept employés, a largement dépassé le cadre de l’immobilier et propose ses services à de multiples secteurs, créant des salons virtuels dans le domaine bancaire, des show-rooms ou des configurateurs d’aide à la vente pour les artisans… Inod Solutions mise aussi sur les serious games en matière de formation professionnelle. « Un casque de VR permet d’immerger une personne dans un environnement pour lui apprendre, par exemple, à utiliser une nouvelle ligne de production », note Anthony Hacques, qui est aussi président de la communauté French Tech de Laval. Cet écosystème regroupe aujourd’hui en Mayenne, autour de la réalité virtuelle et de la réalité augmentée, plus d’une dizaine de start-up.

Getfluence à Toulouse : la marketplace de brand content

Elle a à peine 4 ans mais se positionne déjà comme un acteur important du contenu sponsorisé. La start-up toulousaine Getfluence double chaque année son volume d’affaires et a atteint 13 millions d’euros l’an dernier, dont 70 % reversés aux médias, le solde constituant sa commission. Son fondateur, Marc de Zordo, 34 ans, en a eu l’idée alors qu’il était consultant et commençait à racheter de petits supports, 200 en l’espace de deux ans, pour aider des entreprises à émerger dans la presse. « Je me suis rendu compte que mes clients voulaient toucher de grands médias et qu’il m’était impossible, ceux-là, de les racheter », explique-t-il. Ne restait plus qu’à inventer une plateforme qui permette à une entreprise, une fois son contenu rédactionnel élaboré, de choisir, en fonction de ses critères de ciblage, les médias auprès desquels le diffuser. Getfluence recense aujourd’hui 10 000 titres en Europe pour un portefeuille de 1 500 annonceurs. Après une levée de fonds de 5 millions d’euros l’an dernier, elle en vise une nouvelle cette année. Déjà présente à Milan, Madrid, Londres et Paris, Getfluence prévoit d’ouvrir en Allemagne en 2022 et aux États-Unis en 2023, continuant à recruter pour passer de 50 à 80 salariés en fin d’année.

Inersio à Aix-en-Provence : la visite immersive d’entreprise

Lors du dernier carnaval de Nice, dans le village dédié à l’événement, le public a pu découvrir les coulisses de la fabrication des chars du défilé en s’équipant d’un casque de réalité virtuelle l’immergeant dans l’atelier où ils sont conçus tout au long de l’année. C’est la dernière réalisation en date de la société Inersio, lancée en 2019 à Aix-en-Provence par Raynaut Escorbiac, 48 ans. Ingénieur de formation, d’abord salarié en tant que directeur de projets, il a créé une première société qu’il a revendue avant de se consacrer depuis 2019, avec Inersio, à la conception de visites immersives d’entreprise en vidéo 360° interactive. Dans le prolongement, l’entrepreneur, chantre du made in France, a ouvert en 2020 une plateforme, France Immersive, destinée à présenter les savoir-faire des industries et des territoires français. On visite ainsi, en accès libre sur internet, une manufacture Aigle, une chocolaterie, une savonnerie… « Quel est le meilleur argument pour convaincre vos interlocuteurs ? C’est vous, votre authenticité, votre culture... et la visite immersive permet de le montrer », défend Raynaut Escorbiac, en se réjouissant que son entreprise de huit salariés soit bénéficiaire depuis son lancement.

Les Horizons à Nantes : le média d’intelligence écologique

Originaires de Nantes, Guillaume Joly et Mathieu Desprez y sont revenus après un passage par Paris pour monter leur média, Les Horizons. Les deux jeunes hommes définissent leur pure player en ligne comme « un média de solutions » dans le domaine de la transition écologique, à destination des professionnels en entreprise ou dans les collectivités locales. « Lors de la prise de conscience des enjeux climatiques, beaucoup de discours étaient catastrophistes, mais il manquait l’angle des solutions. On a créé Les Horizons pour mettre en avant des sources d’inspiration », plaident-ils. Leur modèle économique repose sur les abonnements, avec une partie des articles réservés aux abonnés payants, et sur la vente de contenus en marque blanche. Ils ont, pour cela, développé un studio de création de contenus, en texte ou en vidéo, pour accompagner des marques ou des médias sur les sujets de l’environnement avec la création de blogs, de livres blancs, de newsletters… Dans les clous de leurs prévisions, avec déjà 8 500 abonnés gratuits à leur newsletter, Guillaume Joly et Mathieu Desprez, hébergés dans les locaux du groupe de communication The Links, trouvent sur les bords de Loire un environnement propice à leur activité.

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