Tribune

En arrêtant de financer les sites qui propagent des fake news en n'y mettant pas leurs publicités, les annonceurs et leurs agences se doivent, à leur niveau, d'aider à lutter contre la désinformation.

Comment protéger notre système démocratique hérité des Lumières face à la déstructuration de l’information ? C’est le défi auquel répond Gérald Bronner dans son rapport «Les Lumières à l’heure du numérique», publié en janvier 2022. L’accès à l’information n’a jamais été aussi facile, mais l’impact de la désinformation n’a jamais été aussi fort.

Selon Statista, les sites web qui ont publié des fake news de manière répétée ont généré 2,6 milliards de dollars américains de revenus publicitaires dans le monde. Il est urgent que les annonceurs contrôlent leurs campagnes afin d'éviter la publication sur des sites de désinformation. Parce qu’internet doit rester une chance pour tous, les acteurs de la publicité digitale ont un rôle à jouer pour contribuer à limiter la propagation de la désinformation et mettre en place des moyens pour assécher le financement des sites de désinformation.

Le poids de la désinformation

La désinformation est une menace sur la société. Si elle n’est pas un phénomène nouveau, son ampleur est en revanche inédite, tout particulièrement ces dernières années avec les infox autour de la vaccination contre le Covid-19, les élections, l’écologie… Ces fausses informations influencent la vie des citoyens et les choix qu’ils peuvent faire dans leur vie quotidienne.

Cela représente aussi un coût pour l’économie. La désinformation pèse sur les politiques économiques et la santé des entreprises : pertes boursières et financières, demandes de réparations dans le cas de dommages sur la réputation, investissements pour lutter contre la désinformation et les fake news... Un coût annuel pour l’économie mondiale estimé à 78 milliards de dollars, selon une étude de l’université de Baltimore.

Elle représente aussi un risque pour l’image des marques. Dans le cadre de leurs achats publicitaires via des réseaux par exemple, qu’il s’agisse d’achats programmatiques ou d’achats de formats natifs via des réseaux à la performance, les publicités des marques peuvent se retrouver sur des sites de désinformation captant un fort trafic. Les annonceurs peuvent ainsi se retrouver associés à ce genre de contenu et à le financer, souvent d’ailleurs sans en avoir connaissance, et dans des contextes susceptibles de nuire à leur image.

La responsabilité des acteurs publicitaires

Pour contribuer à assécher le financement de la désinformation, les acteurs publicitaires ont une responsabilité. Cela commence par l'instauration de davantage de transparence dans la publicité programmatique, source de revenus pour la désinformation. Les dépenses en publicité programmatique ne cessent de croître au niveau mondial et, en France, d’ici 2025, 84% de tous les revenus publicitaires seront générés par des publicités programmatiques. Par le biais d’achats programmatiques ou de formats natifs, via des réseaux, des partenaires ou des achats à la performance par exemple, et sans un contrôle nécessaire sur ces types d’achat, certains annonceurs se retrouvent, de fait, à financer malgré eux des sites diffusant de fausses informations. Mais comment un annonceur peut-il contrôler les milliers de sites sur lesquels il diffuse ses campagnes ? En s’équipant de technologies spécifiques et expertes en détection de fausses informations, développées par un tiers de confiance.

Il convient ainsi de détecter les contenus de désinformation pour les éviter. Les risques liés à l’affichage de publicités aux côtés de contenus inappropriés, par exemple des contenus haineux ou violents, sont aujourd’hui relativement bien maîtrisés grâce à des technologies contextuelles ou de brand safety très sophistiquées. En revanche, elles ne peuvent à elles seules protéger les marques des fake news car cela nécessite un travail de fact checking. Global Disinformation Index (GDI), une ONG anglaise dont l’objectif est d’assécher les financements des sites de désinformation via un travail continu d’experts et de journalistes, a d’ailleurs estimé qu’en 2021, 36,7 millions de dollars ont été versés à 98 sites de désinformation sur le climat.

Valoriser l’information de qualité

Ainsi les annonceurs doivent stopper le financement des fausses informations et valoriser l’information de qualité. D'autant que le potentiel viral des fausses informations est immense. D’après une étude du MIT, publiée dans la revue Science en 2018, une fake news sur Twitter a 70% plus de chances d’être partagée qu’une vraie information. Il est donc essentiel pour les annonceurs de s’en protéger, en contrôlant au maximum leurs achats, en particulier lorsqu’ils sont axés sur la performance, et en évitant que leurs publicités soient placées sur les sites de fausses informations. Sans publicité, ces sites n’auront plus de financement, ni de moyen de continuer à exister.

A l’inverse, les médias premium, confrontés à la difficulté de la monétisation de leurs contenus, sont un canal de qualité pour les marques afin de toucher leurs audiences. Selon l’étude «Actualités et Perception Publicitaire», un média reconnu et de confiance est le premier critère cité par les consommateurs (61%) pour évaluer la qualité d’un contenu en ligne. Et les sites d’actualités arrivent en 3e position des types de contenus auxquels les consommateurs sont les plus réceptifs en voyant une publicité. Charge à chacun de s’orienter vers les achats les plus qualitatifs et responsables.

Aujourd’hui, le rôle de l’industrie publicitaire est d’offrir aux annonceurs une meilleure protection face aux contenus de désinformation que ce soit via des solutions technologiques ou le partage de bonnes pratiques. Le meilleur moyen de combattre la désinformation est d’assécher le financement des sites qui la propagent et de promouvoir des formes d’investissement publicitaires plus responsables.

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