La banque britannique, mise en cause pour l'évasion fiscale organisée par sa filiale suisse, a privilégié une communication a minima. Swiss Leaks est une nouvelle révélation du Monde, avec l'appui du Consortium international des journalistes d'investigation.

«Nous répondons aux questions de nos clients sur @HSBC_FR_Client du lundi au vendredi 8h-22h et le samedi 9h-17h30», a twitté HSBC France vers 10h, lundi 9 février. C’est jusqu’alors le seul message sur Twitter de la banque britannique, mise en cause à travers sa filiale suisse pour avoir mis en place un système d’évasion fiscale d’ampleur mondiale et portant sur 130 000 clients et 180,6 milliards d’euros. Une réplique à minima face à un bad buzz qui risque de perturber ses relations avec sa clientèle.

 

Dans un communiqué de quatre pages cité par Reuters, HSBC met ces pratiques sur le compte du fonctionnement du système bancaire privé suisse, qui a longtemps cultivé le secret. Elle affirme que sa filiale suisse a subi ces dernières années une «transformation radicale» et que ces pratiques de fraude fiscale ne sont plus d'actualité. «Nous admettons et nous assumons la responsabilité des défaillances passées en matière de respect des règles («compliance») et de procédures de contrôle», indique le communiqué.

 

HSBC se justifie en expliquant que sa filiale suisse n'a pas été totalement intégrée au groupe après son rachat, en 1999, et les niveaux de mise en conformité ont été par la suite et de manière durable «significativement plus bas» que la norme.

 

"Face à ce qui peut être perçue comme une catastrophe pour son image, le groupe bancaire a choisi d’assumer. De ne pas nier sa responsabilité. Dire la vérité est le choix stratégique qu’il fallait faire. Pour s’en convaincre, il suffit de se remémorer les entreprises qui n’ont pas jugé utile de suivre ce principe essentiel de la communication de crise et qui l’ont payé très cher, à l’image de Total au moment du dramatique naufrage dit Erika ou de Coca-Cola au début de la crise des canettes contaminées", a indiqué Florian Silnicki, expert en stratégies de communication et fondateur de l'agence LaFrenchCom, selon lequel "sur le terrain périlleux de la communication de crise, la banque évite les plus grosses erreurs".

 

Marie Muzard, conseillère en «communication sensible on et off line» et auteur de «Very bad buzz» (Eyrolles) rappelait dans Stratégies cette semaine qu'il était nécessaire de «ne pas tout dire tout de suite ou de s'excuser mais plutôt de reconnaître quelques erreurs avec un «statement d'attente» pour se rendre crédible et revenir ensuite avec un discours adapté à la situation».

 

Le Monde indique aussi que le 29 janvier, Andreas von Planta et Franco Morra, président du directoire et PDG de HSBC Private Bank, ont prévenu leurs clients de l’imminence de la publication de données confidentielles. «Nous avons appris que certains médias, notamment le Consortium international des journalistes d’investigations, ont eu accès à des informations volées concernant nos clients par

l’intermédiaire d’un tiers non identifié», écrivent-ils.Leurs  courriers ont été adressés aux clients ayant ouvert un compte avant avril 2007, au moment où les listes ont été dérobées par Hervé Falciani, le lanceur d'alerte à l'origine des révélations de l’ICIJ. «Nous allons continuer  à prendre toutes les mesures raisonnables pour minimiser l'impact de la possible intrusion des médias dans votre vie privée. Nous nous excusons pour la gêne occasionnée.», précisent les deux dirigeants.

   

 

Swiss Leaks, de nouvelles révélations de l'ICIJ

 

 

D'après les informations publiées sous l’égide du consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ)  par Le Monde et, en Grande-Bretagne, par le Guardian, HSBC Private Bank aidait en particulier ses clients à échapper à certains impôts, notamment la taxe européenne ESD, instituée en 2005, en dissimulant «leur argent derrière le paravent de structures offshore généralement basées au Panama ou dans les îles Vierges britanniques». Des noms d’entrepreneurs français comme le coiffeur Jacques Dessange, qui se serait mis en conformité avec le Fisc en 2012 ou la famille Ouaki –propriétaire de Tati jusqu’en 2004– sont cités comme figurant dans les listings.

 

Le consortium ICIJ regroupe plus de 140 journalistes de 45 pays. Sont inclus Le Monde, The Guardian, BBC, Süddeutsche Zeitung, l’émission 60 Minutes de CBS et plus d’une quarantaine d’autres médias.



Le Monde a rapporté dans un article en ligne que cette opération qui a été désignée sous le nom de Swiss Leaks avait pour nom de code Voyager, en référence à la série «Star Trek». Il a aussi précisé que le consortium avait mis au point un forum sécurisé pour échanger des documents et des informations, une base de données, «black light» pour des recherches par nom, pays, source, et enfin une application, «graph», pour visualiser les liens entre ayants-droit et holdings et sociétés offshore. Il précise aussi que les communications ne passaient que par des messageries cryptées.

 

 

L'image de marque de la Suisse en cause

 

 

Des voix se sont élevées lundi en Suisse, selon l'AFP, pour réclamer l'ouverture d'une enquête judiciaire contre la banque HSBC (Suisse), au centre d'un vaste scandale d'évasion fiscale, de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme. L'ouverture d'une enquête «serait la moindre des choses», a déclaré lundi matin Micheline Calmy-Rey, une ancienne ministre socialiste du gouvernement suisse, qui a été en charge du portefeuille des Affaires étrangères jusqu'en 2011, et qui avait négocié l'accord avec les Etats-Unis pour mettre fin à un contentieux avec UBS.

 

A ce jour, le Ministère suisse de la Confédération n'a ouvert une enquête que contre Hervé Falciani, l'ancien informaticien de HSBC qui avait volé des fichiers de la banque, à l'origine des révélations publiées lundi par la presse internationale et appelées «Swiss Leaks».

 

Selon Micheline Calmy-Rey, qui était interrogée par la Radio suisse-romande, cette affaire nuit gravement à l'image de marque de la Suisse.

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