Cela fait des mois que vous cherchez un pantalon sur internet et le moteur de recommandation vous propose un soutien-gorge. Cela vous énerve ou vous surprend... Et s’il avait raison?

«Recommander le mauvais produit à la bonne personne», ce pourrait être le slogan de SearchXPR, une jeune start-up fondée par Jean-Luc Marini et Olivier Figon, spécialisée dans la recommandation de produits. Mais plus que le «mauvais produit» c’est le produit «surprenant» qui est son créneau. Un point de vue pour le moins original. Le principe? La sérendipité psychocognitive. Un mot savant pour un concept simple: sérendipité – la découverte par accident ; psychocognitive – pas si accidentelle que cela, car issue du fonctionnement inconscient. Le principe pourrait s’étendre à bien d’autres domaines, comme la presse ou l’évaluation de priorités d’investissements…

 

Explications. Les moteurs habituels de recommandation fonctionnent en cherchant des corrélations dans le comportement des internautes, les mots clés etc. Et ils prennent en compte pour cela les signaux les plus flagrants. Vous cherchez un pantalon signifie que vous voulez trouver un pantalon, donc l’algorithme vous recommande un pantalon. Simple comme bonjour. Un peu trop pour Jean Luc Marini. Le cofondateur de Search XPR, est professeur adjoint à l’IAE de Lyon en intelligence artificielle spécialisée en accessibilité de l’information digitale et a notamment travaillé sur l’interprétation des «métaconnaissances»: des connaissances implicites, sortes d’actes manqués à petite échelle. Ce sont ces types de données que Search XPRE analyse.

 

«Quand tout le monde s’intéresse aux datas que le consommateur a exprimées, nous, nous analysons celles qu’il n’a pas exprimé. En tout cas pas directement. Tous les tics, les mouvements de souris passifs, etc.», explique-t-il. Partant du principe que ces comportements «involontaires» de la part de l’internaute ont un sens, les huit algorithmes de la start-up les interprètent et vont alors chercher dans l’offre du site internet sur lequel surfe l'internaute un produit qui répondra à ses besoins non exprimés. Et qui, de fait, le surprendra. Et l’incitera à la découverte. 

 

«Cela s’adresse à tous les clients "flanneurs", qui viennent pour regarder», poursuit le chercheur. Ils sont ainsi incités à découvrir l’offre du magasin. Le système est aussi réalisable dans les boutiques où, via des technologies RFID sur les produits et de localisation par Beacon, il est possible de relever le comportement indécis du client. Sa vitesse de déplacement, ses recherches par l’analyse du mouvement des porte-manteaux, etc. Attention, «le concept ne s’adapte principalement qu’à des vendeurs possédant une profondeur d’offre suffisante», reconnaît Jean-Luc Marini. Un vendeur de pantalon ne pourra recommander que des pantalons…

 

Testé pendant un an sur le site pêcheur.com, Search XPR affirme que le panier moyen du site a grimpé de presque 30%. La start-up a également travaillé pour l’aéroport de Shanghai en réalisant toute son application globale dédiée aux commerces dans l’aéroport.

 

Plus qu’une technologie dédiée à l’e-commerce, c’est une autre manière de concevoir l’algorithmie qu’a développée Search XPR. Fruit de cinq années de recherche, le principe d’analyse de signaux faibles peut être appliqué à d’autres secteurs, en intégrant d'autres données. Finalement, il s’agit d’un outil d’aide à la décision avec une ouverture d’esprit. Une sorte rationalisation de quelque chose qui apparaît comme irrationnelle à première vue: l'algorithme de la surprise. «Le concept est particulièrement adapté au marché de l’emploi, aux sites de rencontres, etc.», argue Jean-Luc Marini. L’entreprise travaille également pour le Cnes dans l’optique de prioriser les investissements ainsi que pour l’éditeur de presse Intescia (propriétaire de Stratégies), pour la recommandation d’articles en ligne. 

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