Dossier stratégie de marques
Dans un contexte difficile, la vente d’articles de sport et de loisir a pourtant réalisé de bonnes performances l’an dernier. Les enseignes spécialisées essayent de nouveaux concepts afin de contrecarrer la domination de Décathlon et de profiter de l’engouement pour le «sportswear».

En prélude à l'Euro et aux Jeux Olympiques de cet été, l’année 2011 a été sportive. En France, le marché des articles de sport a progressé de 2%, après trois années sans croissance, pour atteindre un chiffre d’affaires de 9,3 milliards d’euros, selon la Fédération professionnelle des entreprises du sport et des loisirs (FPS). Dans le circuit de la distribution d’articles de sport et de loisir, ce sont les enseignes et les magasins spécialisés qui règnent en maître. Ils détiennent 78% de parts de marché (7,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires) pour environ 4 000 points de vente.

 

Dans cette catégorie, cinq acteurs d’envergure internationale se détachent, puisqu’ils trustent plus de 80% du chiffre d'affaires des spécialistes. Dans l’ordre, on retrouve Décathlon, Intersport, Go Sport, Sport 2000 et Foot-Locker. «C’est un marché assez concentré, souligne André-Pierre Doucet, directeur de la communication et des études de la FPS. Il repose sur deux piliers solides, la pratique et la mode sportives. Cette dernière a d’ailleurs bien résisté durant le contexte difficile de l’année 2011.»

 

Ces enseignes spécialisées se différencient de leurs homologues de la distribution généraliste par le rôle qu’on leur prête. «La relation au circuit de distribution diffère, car le métier des enseignes sportives est associé à des moments de plaisir ou de loisir dans la vie des gens», analyse Bernard Buono, vice-président de BETC, et qui compte parmi ses clients Décathlon.

 

L’an dernier, deux catégories de produits ont fait la course en tête dans l’univers du sport. Avec une croissance d’environ 7%, les chaussures de sport et de loisir ont réalisé une belle performance. Le running s’est distingué, comme le «fitness-toning». Derrière cette appellation marketing se cache une promesse de sculpture du corps par la marche. En la matière, la marque anglaise Reebok (propriété du groupe Adidas) fait figure de précurseur. «C’est devenu un nouveau rayon en magasin», souligne André-Pierre Doucet.

 

Une tendance a marqué l’année écoulée, l’engouement pour le courant «minimaliste-sensation». «Ce sont des chaussures qui favorisent le déroulé naturel du pied, c’est-à-dire juste une petite semelle sous le pied», explique André-Pierre Doucet. De façon schématique, on pourrait dire que cette conception s’oppose à celle d’un grand succès des années 1990, la Reebok Pump et son système d’amortissement gonflable.

 

Double marché

 

Autre succès, le vélo, dont les ventes (accessoires inclus) ont progressé de près de 5%, le segment du vélo urbain et utilitaire tirant son épingle du jeu. «C’est peut-être lié à l’apparition des vélos en libre-service à Paris et à Lyon», note André-Pierre Doucet.

 

Le marché du sport est en fait un double marché. L’un comprend les produits conçus pour la pratique sportive et l’autre ceux de style «sportswear» (mode inspirée du sport), conçus et utilisés pour la vie quotidienne.

 

Longtemps, les tenues de sport se sont opposées aux vêtements à la mode. Les temps changent, le prêt-à-porter s’inspire désormais de l’univers du sport et inversement. A tel point que le «sportswear» est devenu un courant de la mode et occupe une place toujours plus importante dans les circuits de distribution. A-t-il absorbé l’ensemble du marché du prêt-à-porter décontracté? «Le textile destiné au sport et aux loisirs compte pour environ 40% du chiffres d’affaires du marché des articles de sport, précise André-Pierre Doucet. Au sein de cette catégorie, les usages de loisir (sportswear) ou mixte représentent 65% du chiffre d’affaires du textile sportif, tandis que l’usage strictement sportif en concerne 35%.» L’usage d’origine des blousons de ski et des survêtements par exemple est détourné par les Français, à tel point que les marques ont récupéré et encouragé cette tendance, jusqu’à l’émergence d’un véritable marché du sportswear. C’est un mouvement de fond dans la société. «Au départ, le sportswear était porté le week-end, puis en semaine durant les temps de loisir et dorénavant même au travail, observe André-Pierre Doucet. Les codes du “Friday Wear” ont favorisé ces tenues décontractées.»

 

Ce glissement d’une partie du marché du sport vers celui de la mode (ainsi que la mainmise de Décathlon) a conduit les distributeurs spécialisés à élaborer de nouveaux concepts de points de vente. Au mois de mai 2012, l’enseigne Go Sport a inauguré un nouveau type de magasin à La Défense. «L’accent est mis sur la théâtralisation de la pratique du sport et les grandes marques par opposition aux marques de distributeur, observe Bernard Buono. Ce point de vente est à mi-chemin entre Citadium (enseigne spécialisée dans le sportswear, ndr) et un magasin de sport.» Intersport teste également une nouvelle enseigne, appelée Black Store et dont l’offre propose du prêt-à-porter qui se greffe autour des baskets, à savoir des tee-shirts, des sweats et surtout des jeans. «Elle s’adresse à une cible jeune sensible au sportswear, mais qui ne veut pas forcément faire de sport», constate Bernard Buono.

 

Dans le sens inverse, le fabricant-détaillant de prêt-à-porter grand public Uniqlo a surpris en prenant un inattendu virage «sportswear» dans sa communication. Juste avant le tournoi de Roland-Garros, la marque japonaise a choisi comme égérie Novak Djokovic, le joueur de tennis serbe qui était à ce moment là numéro un mondial. Dans la corbeille de ce mariage figure le lancement à terme d'une ligne de «sportswear» élaborée en collaboration avec Novak Djokovic.

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