Interview exclusive
Caroline Fontaine est directrice de la communication de Paris depuis 2018, après avoir dirigé la marque Air France. Quels sont les enjeux, au lendemain de la réélection d’Anne Hidalgo et en pleine crise du Covid ?

Comment avez-vous travaillé pour changer l’image de Paris depuis 2018 ?

Quand j’ai pris mes fonctions il y a plus de deux ans, il y avait un enjeu d’image : modifier la perception de la ville. Un changement d’image c’est toujours assez long car c’est une construction. J’ai appliqué une méthode : dans un premier temps j’ai analysé où étaient les problématiques, puis nous avons déroulé un plan d’action. Afin d’être sûrs que les gens comprennent qui on était, on a ensuite transformé le logo avec l’agence Carré Noir. Jusqu’ici il y en avait de multiples et les domaines de compétences de la ville n’étaient pas clairs : beaucoup d’usagers ne savaient pas que les crèches dépendaient de la ville, et à l’inverse pensaient que le métro dépendait de la municipalité. La ville de Paris emploie environ 50 000 personnes au global. L’objectif : ordonner, afin que tout le monde puisse se dire : « ici c’est la Ville de Paris ! ».



Une période où la ville était en plein chantiers et a vécu des traumatismes…

Oui, et il a fallu raconter ce qu’il se passait dans la Ville : le réaménagement des espaces publics, la création de places en crèches… Mettre en mouvement l’histoire en train de se faire pour qu’il y ait une acceptation des administrés. Pourquoi la ville est-elle en chantiers et autour de quelles valeurs ?

Dans le même temps, la ville a été fortement secouée par des événements exogènes : incendie de Notre Dame, grèves, Gilets jaunes, Covid… Il y a un enjeu de résilience : comment nous nous préparons aux défis climatiques et sociaux ? Comment réduire l’impact écologique de Paris tout en maintenant l’attractivité ? Aujourd’hui la ville a affirmé son leadership sur la transformation climatique et il y a une vraie acceptation de la population.  



Est-ce différent de la direction de la communication d’une entreprise ?

Entreprise ou ville, la finalité, pour la communication, reste la même ! Il faut dire qui vous êtes, ce que vous faites, pourquoi vous le faites. Mon rôle essentiel est d’abord d’informer : apporter une information claire, transparente, efficace. Il y a aussi un rôle d’accompagnement du changement : il faut savoir écouter les habitants de Paris, ceux qui la traversent, qui y travaillent, qui la visitent. Identifier les points de tensions, les leviers à activer pour faire comprendre la transformation. Je peux m’appuyer sur une direction de la communication de 200 personnes, répartie dans quatre pôles : contenu et digital, planning stratégique (plans de communication sur l’ensemble des sujets, politiques publiques…), événementiel (protocole, relations publics et grands événements...), et administratif...



Pourquoi avoir rejoint une mairie, après avoir piloté une marque (Air France) ?

C’est un job où vous vous sentez utile, au service des usagers, à la tête d’un service public. Etre responsable de la marque Paris, c’est très gratifiant car c’est un symbole à travers le monde de la culture, de l’histoire, mais cela oblige. C’est aussi le choix de travailler pour une personne, une équipe que vous admirez pour ce qu’ils défendent.



Quels sont les atouts et faiblesses de la marque Paris ?

Ce qui est éminemment puissant dans cette marque c’est toute sa charge, pas uniquement symbolique. J’ai beaucoup travaillé sur Paris à l’international, c’est la seule ville au monde autant chargée d’inconscients. C’est un atout extraordinaire ! Le patrimoine culturel de Paris est un trésor, mais la Ville ne doit jamais être ressentie comme une ville musée : c’est pourquoi il est essentiel pour moi de révéler à quel point elle est une ville d’audace,  avec des enjeux de transformation très forts : elle est le fer de lance d’une forme de révolution, de façon de vivre.



Comment le Covid a changé votre métier ?

D’un point de vue communication, cela nous a obligé à revoir nos pratiques. Une grosse partie de notre métier consiste à délivrer de l’information. Dans cette période difficile, ce rôle a été plus utile que jamais pour ceux qui avaient le plus besoin de service public, d’être au courant. Nous avons tenté de les informer au plus près, notamment avec de l’affichage dans les immeubles…

Dans le même temps cette crise a servi de révélateur de tout ce que fait la ville, et ses personnels dans les écoles, les crèches, la propreté... Ces personnels ont reçu les honneurs qu’ils méritaient.



Avez-vous des campagnes en cours et envisagez-vous une communication à l’international pour faire revenir les touristes ?

Nous ne sommes pas encore suffisamment sortis de la pandémie pour imaginer une telle campagne. Il y a aussi les Jeux Olympiques (Paris 2024) qui se profilent.

Par ailleurs, nous avons plusieurs campagnes en cours, en affichage : pour promouvoir les nouvelles voies cyclables (plus de 50 kilomètres créés en très peu de temps), pour mettre à l’honneur les commerces de proximité ou sur les gestes barrières…



Quels événements sont prévus dans les prochains semaines ?

Nous venons de lancer l’édition de Paris Plage le 18 juillet. Une édition comparable aux éditions précédentes, qui se déroule sur les berges de Seine et au Bassin de la Villette, en extérieur. En parallèle il y a la campagne un été particulier : Paris plage, festival de la culture (16 juillet jusqu’au 15 septembre) avec un programme très beau et l’enjeu de tout faire en extérieur, programme d’animations sportives...



Avec quelles agences travaillez-vous ?

On a un studio intégré qui réalise beaucoup de campagnes (80% d’entre elles). Mais nous disposons depuis 2018 et jusqu’en 2022 d’un accord cadre multi-attributaire pour couvrir l’ensemble des besoins de la Ville de Paris en matière de création graphique. Ce marché compte douze lots allant de la conception de campagnes de communication à l’exécution en passant par la création d’identités visuelles ou la réalisation d’infographies. Le lot 1 a été attribué à l’agence Les Présidents. Tout au long de ma carrière, j’ai considéré qu’il fallait s’appuyer sur une excellence en interne et des alliés forts en externe.

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