Distribution
Vêtements, livres, produits de beauté… depuis quelques années, les influenceurs quittent les réseaux sociaux et investissent les rayons des supermarchés. Des projets qui bénéficient également aux marques qui travaillent avec eux.

[Dans le cadre du partenariat entre Stratégies et l'IEJ Paris, l'école de journalisme du groupe MediaSchool, certifiée par l'Etat, les étudiants du master presse écrite web ont réalisé une série de dix articles sur l'influence marketing.]

 

De plus en plus régulièrement, ces dernières années, des influenceurs décident de créer leurs propres produits. Un moyen pour eux d’exprimer leur créativité tout en en tirant des revenus, alors que 65% des partenariats entre marques et influenceurs ne sont pas rémunérés, selon les résultats d’une étude publiée en 2020 par l’entreprise spécialisée en influence marketing, Reech.

Pour les gros influenceurs, les réseaux sociaux sont souvent un moyen de fidéliser un public - au travers de likes, commentaires et autres partages - par la suite susceptible d’acheter leurs produits. Très populaire, sur les réseaux sociaux, le foutubeur fitness Tibo Inshape propose à la vente vêtements et accessoires à son effigie, et propose des équipements et des programmes de musculation. Il a compris comment monétiser sa communauté, en concentrant la production des produits et services proposés autour du thème de sa chaîne, le fitness, lui permettant de conserver l'adhésion de son audience. 

Pour les créateurs de contenus, il s’agit souvent de réussir à s’émanciper en partie de leur activité en ligne. Lucas Hauchard, alias Squeezie, en est un autre exemple. Avec ses 15 millions d’abonnés sur sa chaîne YouTube, ses projets ont une immense visibilité, permettant au jeune homme de 24 ans de partager ses passions de manière lucrative. En 2019, il a ainsi créé, aux côtés de son frère, sa marque de vêtements Yoko, dont la page Instagram officielle réunit plus de 300 000 abonnés. Il a même sorti son premier album, Oxyz, en septembre 2020, vendu à plus de 20 000 exemplaires.

Quand les projets soutiennent des causes

Mais si les projets d’un influenceur tel que Squeezie ont connu un succès important, il reste «rare que la création de marques concerne des influenceurs de moins de 100 000 abonnés, voire un million», explique Caroline Matz, responsable communication chez Reech. Les influenceurs qui «vendent des produits à leur effigie ou avec leurs propres punchlines» restent très minoritaires. Les marques accompagnées par l'entreprise, elles, cherchent plus à «séduire l’audience des influenceurs» que ces derniers eux-mêmes. Et pour cause, le marché pèse lourd: il représentait environ 6,5 milliards de dollars en 2019, et devrait approcher les 20 milliards cette année.

De l’autre côté de l’échiquier, l’agence Trends By Talents, créée en 2018, accompagne les influenceurs dans la création de leur marque. Cette start-up, dont nous avions déjà parlé en avril dernier, tente de «répondre à un besoin pour les influenceurs qui n’ont pas les moyens, le temps ou le savoir-faire» de tout gérer par eux-mêmes, nous explique l’un de ses cofondateurs, Anthony Danant. Elle accompagne les talents «au cours de toutes les étapes» de la création puis de la vente de leurs produits. Un accompagnement facilité par la crise du Covid-19 et les périodes de confinement : «Les influenceurs sont encore plus disponibles pour travailler avec nous sur leurs collections», c’est-à-dire la vente d’un ensemble de produits sur une durée limitée. Cible visée - et son pouvoir d’achat - mais aussi tarifs et méthode de promotion à mettre en place sont ensuite discutés.

Pour attirer et donner confiance, Trends By Talents mise énormément sur son image avec la production de produits de qualité, mais également de bonnes actions : «Des projets sont devenus des causes, on a plusieurs fois reversé nos bénéfices à des hôpitaux pendant le confinement». C’est par exemple le cas avec la youtubeuse Romy, dont la marque ànoshéros a été spécialement créée courant 2020 afin d’en reverser l’ensemble des bénéfices à la fondation Hôpitaux de France. La jeune femme, décidément engagée, avait également crée sa porpre marque de maroquinerie, UNLOCK, fin 2019 : des sacs mixtes et vegans. 

Comment trouver l'équation parfaite

La différence des objectifs entre influenceurs et marques est malgré tout parfois trop importante pour que des projets fonctionnent. On peut citer l’influenceuse américaine Ariana Renee qui, en 2019, n’avait pas réussi à vendre les 36 t-shirts nécessaires au lancement d’une production à grande échelle de ses produits, et ce malgré ses deux millions d’abonnés. Quant aux projets qui se concrétisent, tous ne prennent pas forcément auprès du public. Le tout est de trouver «l’équation parfaite», estime le cofondateur de Trends By Talents: «une grosse communauté et fortement engagée», les deux restant malgré tout souvent peu compatibles.

Reste la dimension éthique. Caroline Matz évoque ainsi des «partenariats parfois moins créatifs que sélectifs», au cours desquels «l’influenceur choisit parmi des produits proposés par la marque, mais ne les crée pas», sans évidemment le préciser à ses abonnés. Cette dimension, enfin, concerne également le fait de faire payer une communauté souvent très jeune. Si l’on évoquait plus tôt le succès du youtubeur Squeezie dans la musique et la mode, celui-ci avait malgré tout divisé en proposant des prix parfois jugés exorbitants: on notera par exemple les deux paires de chaussettes vendues pour la modique somme de... 25 euros.

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