Société
Alors que s'ouvrait le procès de Nordahl Lelandais, l'assassin présumé arborait une casquette marquée d'un gros logo Adidas. Énième manifestation de l'amour des criminels pour les marques – souvent celles d'équipementiers sportifs. Un mariage funeste qui fait perdre le sommeil aux directions de la communication...

Il porte les menottes, le gilet pare-balles… et une casquette estampillée Adidas. On peut encourir 30 ans de réclusion criminelle et néanmoins vouloir rester stylé. Nordahl Lelandais, qui comparaissait devant la cour d’assises de la Savoie du 3 au 12 mai 2021 pour le meurtre du caporal Arthur Noyer, semble avoir le goût du sang… et la passion des logos. Sur une photo reprise abondamment dans la presse, on le voit aussi bomber le torse, sanglé dans un t-shirt Pepe Jeans.

Entre les criminels et les marques, c’est décidément une histoire d’amour... à mort. On se souvient encore du t-shirt Umbro kaki arboré par le terrifiant Guy Georges, tueur de l’Est parisien, lors de son procès en 2001. Et comment oublier la farandole de survêtements extravagants arborés par Jawad Bendaoud, logeur inénarrable de deux djihadistes du 13-Novembre 2015 : à son procès, il paradera notamment avec un modèle jaune canari signé Nike et un étonnant jogging à paillettes de la marque Avenue Georges V.

Une simple recherche Google Images offre une vue imprenable sur le catwalk des routards du crime. Pour un Michel Fourniret, ogre des Ardennes visiblement « no logo », on trouve David Hotyat, assassin de la famille Flactif, en T-shirt Adidas et Jonathann Daval, condamné pour le meurtre de son épouse Alexia et grand amateur « des runs du dimanche », également en tenue de sport de la marque aux trois bandes. Sur des clichés anciens, Muriel Bolle, personnage clé de l’affaire Grégory, est vêtue d’un sweat-shirt Naf Naf – comme toutes les adolescentes des années 80. Le diable s’habille en Prada, et Luka Rocco Magnotta aussi : on tombe en trois clics sur des clichés du dépeceur de Montréal posant fièrement avec un sweat-shirt de la marque milanaise.

L'origine du mal

Avec des égéries pareilles, pour les marques, autant se tirer une balle dans la tête. Surtout lorsque les criminels leur vouent un véritable culte. Comme Anders Breivik, auteur de la tuerie d’Oslo et inconditionnel de la marque au crocodile, au point de professer son adoration dans un manifeste : «Je porte principalement les meilleurs vêtements de ma vie passée, c'est-à-dire des vêtements de marque très chère, des sweat-shirts Lacoste.» L'entreprise avait alors contacté la police afin qu’Anders Breivik ne porte plus de vêtements de sa marque lors de ses apparitions en public. Pas une mince affaire, alors que le Norvégien exigeait de ne se vêtir, pendant son procès, que de son pull Lacoste rouge hémoglobine…

Il faut dire que la passion des marques constitue bien souvent, intrinsèquement, un puissant pousse-au-crime. Les possessions matérielles nourrissent les pulsions envieuses, les haines recuites : les Villemin n’étaient-ils pas surnommés « les Giscard » parce qu’ils possédaient deux voitures et un canapé en cuir ? L’incarnation la plus aboutie du mariage funeste entre crime et marques porte un nom : Andrew Cunanan. Ce jeune homme avide de gloire et de luxe assassinait en 1997, à Miami Beach, le couturier le plus bling bling des années 90 : Gianni Versace. Assassin au sang froid mais victime de la mode… Reste qu'aujourd'hui, pour les amateurs de faits divers, le plus grand mystère demeure : quelle peut bien être la marque chouchoute de Xavier Dupont de Ligonnès ? 

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