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La société de livraison à domicile de produits alimentaires Place du Marché (ex-Toupargel), qui compte 1 600 salariés, devrait être liquidée le 11 janvier, un des plus importants plans sociaux de ces derniers mois, marquant l’essoufflement d’un modèle.

« On ne prend plus les commandes, désolé, nous allons être liquidés… » : au téléphone, le service clients de l’entreprise ne laisse guère de doute sur l’issue de l’audience du tribunal de commerce de Lyon, le 11 janvier, à laquelle sont attendus des salariés venus de toute la France.

Les mandataires judiciaires, de source syndicale, ont eux aussi annoncé lors d’un Comité social et économique (CSE) au siège social de Civrieux-d’Azergues (Rhône) mercredi dernier qu’ils passeraient bientôt au statut de « liquidateurs judiciaires ».

Et lors de cette même réunion, la direction du groupe, en redressement judiciaire depuis fin novembre, a informé les salariés de la création d’une « cellule liquidative » de 35 personnes, venant des services ressources humaines et informatique, dans le cadre d’une « prestation grands licenciements ».

Auparavant nommée Toupargel, l’entreprise, alors déjà en redressement judiciaire, avait été reprise en janvier 2020 par la holding Agihold des frères Léo et Patrick Bahadourian, cofondateurs et actionnaires de la florissante enseigne Grand Frais.

La société s’est rebaptisée Place du Marché en 2021, dans l’idée notamment d’étendre sensiblement son offre au-delà du surgelé, vers les produits frais et l’épicerie. Certains produits distribués provenaient d’ailleurs des mêmes fournisseurs que Grand Frais. Le projet visait aussi à accélérer les ventes en ligne, alors que l’entreprise a bâti son modèle sur les ventes par téléphone.

Clientèle vieillissante

Mais cette stratégie a échoué. « D’abord, la moyenne d’âge de notre clientèle est assez élevée, beaucoup ont plus de 70 ans et n’ont pas accès ou ne savent pas se servir d’internet. Le changement de nom l’a aussi perturbée. Et au final, la grande majorité venait pour les surgelés », explique Lise Delaizé, déléguée CGT, elle-même télévendeuse depuis 24 ans.

Une centaine de centres d’appels maillait ainsi le territoire, notamment les zones rurales, d’où partait une partie des livraisons à domicile, acheminées depuis trois grandes plateformes.

« Le modèle n’a pas évolué depuis 30 ans, d’autres alternatives ont vu le jour depuis, notamment le drive. Même dans les zones rurales, les gens ont pris l’habitude du "one stop shopping", où ils trouvent tous les produits nécessaires en un même lieu. En outre, il n’y a pas eu de renouvellement de la clientèle », observe Yves Marin, associé au cabinet de conseil Bartle, spécialiste de la grande consommation.

Autant d’éléments qui ont nourri une chute des ventes, passées de 271 millions d’euros en 2017 à 200 millions en 2021-2022.

La liquidation, si elle est confirmée, va entraîner un des plus importants plans sociaux de ces derniers mois, après la liquidation de l’enseigne textile Camaïeu en septembre (2 100 salariés) et les 1 200 emplois supprimés (sur 2 300) annoncés fin décembre chez Scopelec, groupe spécialisé dans les technologies de communication.

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