CAHIER TRANSITION

De nombreuses entreprises participent à des initiatives de reforestation dans le cadre de leurs actions RSE. Mais les solutions nécessaires vont au-delà de la plantation de nouvelles essences. Explications en forêt avec le spécialiste EcoTree.

Au micro du youtubeur HugoDécrypte, le 4 septembre dernier, le président Emmanuel Macron a affirmé sa volonté de voir chaque collégien planter un arbre au cours de sa scolarité. Une annonce qui s’inscrit dans le plan d’investissement France 2030, visant la plantation d’un milliard d’arbres en dix ans pour adapter la forêt française aux bouleversements climatiques. L’arbre est avec les océans un des premiers puits de carbone sur Terre et les terribles incendies de l’été 2022 incitent à se tourner vers des essences plus résistantes. Les entreprises ont leur rôle à jouer dans cette ambition, et nombreuses sont celles qui soutiennent des projets de reboisement dans le cadre de leurs engagements RSE. Nivea a ainsi contribué à financer plus de 12 000 plantations en 2022 à travers son partenariat avec la société MyTree. La bien nommée Fondation Laforêt a planté 32 000 arbres dans la Nièvre la même année.

Mais planter n’est pas forcément la solution à tout. Comme le soulignait une tribune publiée dans Le Monde le 25 octobre dernier, « en 2022, près de 38% des plantations, financées en partie par le plan de relance, ont échoué ». Succédant souvent à des coupes rases, les jeunes pousses exposées au soleil sont fragilisées. « On caricature en parlant de plantation mais la gestion des écosystèmes forestiers va au-delà. Il faut identifier les terrains, mettre en place des itinéraires sylvicoles, planter des haies mellifères, installer des ruches, restaurer des mares », énumère Baudouin Vercken, cofondateur d’EcoTree, entreprise qui mène plus de 500 projets de biodiversité depuis 2016, avec le soutien de 76 000 particuliers et près de 2 000 entreprises. Pour expliquer les mécanismes de la gestion forestière, l’équipe organisait le 9 novembre dernier une visite en forêt de Pézarches, en Seine-et-Marne, avec certains de ses partenaires : Absolution, BPCE, Great Place to Work, RTE…

Au programme de cette journée pluvieuse, une initiation à la fresque de la biodiversité pour comprendre les interactions entre les végétaux et les animaux, une découverte du métier de forestier, une rencontre avec un apiculteur. Particulièrement attentif à cet atelier, Khalid Afkir, vendeur au rayon carrelage-parquet du Leroy Merlin d’Ivry-sur-Seine, fait partie des salariés qui s’occupent des abeilles installées sur le toit du magasin. « Je suis autorisé à prendre sur mon temps de travail pour aller vérifier les ruches. C’est une fierté de voir le résultat lorsqu’on récolte le miel », confie le jeune homme. Pour Christian Ledda, responsable RSE du magasin de 500 salariés, les actions pour l’environnement rejaillissent sur la motivation et la loyauté des collaborateurs, au-delà du bilan carbone de l’entreprise. Un constat confirmé par les autres participants : les projets de reforestation sont des leviers de mobilisation. Chez iAdvize, start-up digitale, « on s’est beaucoup renseigné auprès d’associations sur les actions à mener pour protéger la nature, et l’on nous a conseillé de planter des haies, témoigne François-Xavier Legrand, juriste droit social et RSE. Ce n’est pas le plus facile à expliquer aux collaborateurs. Au final, on a choisi EcoTree, après un vote de tous les salariés. »

Une vision sur plusieurs décennies

Depuis 2016, 1 200 hectares de projets ont été lancés par EcoTree avec une vision de long terme, sur plusieurs décennies. « Le but est de former d’autres personnes, pour que les projets perdurent, souligne Baudouin Vercken. On accompagne les entreprises de bout en bout, pas seulement pour compenser leurs émissions carbone mais aussi pour les éviter et les réduire en amont. » L’exemple de Palais des Thés est éclairant : « On a réalisé notre bilan carbone il y a deux ans, et identifié nos impacts sur les différents scopes, explique Clément Régis, le responsable RSE. Sur le scope 3, nous avons une part de transport en avion incompressible pour les thés rares. Nous travaillons sur ce volet avec la Fondation Good Planet. Mais sur les scopes 1 et 2, qui concernent essentiellement notre consommation d’énergie, nous cherchions des actions à l’échelle locale. Grâce à EcoTree, nous finançons une forêt dans la Meuse. » 

Au fil de la visite, on comprend pourquoi il faut restaurer une mare avec des plantes bien spécifiques, car ses rives sont en pente, pourquoi il ne faut surtout pas éliminer un arbre mort, dont le tronc est un refuge à insectes. Karim Ouahioune, directeur marketing et communication d’Acer France, se félicite d’une collaboration qui dure depuis trois ans : « Le groupe s’est fixé l’objectif d’être neutre en carbone en 2035. Au-delà des décisions prises au siège à Taïwan, comme l’éco-conception des produits, on souhaitait mener des actions locales. On a ainsi contribué à préserver des grenouilles dans une forêt en Bretagne. » Un projet moins facile à vendre au grand public que de planter un arbre, comme le groupe l’affiche sur sa gamme Acer Vero. Et pourtant, protéger les batraciens permet de respecter l’équilibre de tout un système et, au final, d’aider les arbres à jouer leur rôle de puits de carbone. « Sachant que la forêt française séquestre seulement 15% de nos émissions, rappelle Baudouin Vercken. Il est nécessaire de réduire nos émissions tout en augmentant la capacité de nos forêts à séquestrer du carbone. »

Chiffres clés

1 milliard Nombre d'arbres devant être plantés d'ici 2032, objectif du plan France relance.

38% Part des plantations (financées en partie par le plan de relance) qui ont échoué en 2022 (source : Le Monde).

1 200 Nombre d'hectares de projets lancés par l'entreprise EcoTree depuis 2016.

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