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Face à l'évolution des comportements des auditeurs, portée par les supports numériques, les éditeurs misent sur leur savoir-faire en matière de programmes. Tout en revoyant leur distribution.
En radio, «il faut que tout change pour que rien ne change», disait Tancredi, l'un des personnages du Guépard. La révolution numérique ne semble pas avoir ébranlé les convictions des éditeurs. «Comme internet, le média est gratuit, interactif, mobile et dématérialisé», souligne Franck Lanoux, directeur général de RMC. L'un et l'autre permettent «d’avoir des activités concomitantes et bénéficient de l’instantanéité», souligne Tristan Jurgensen, directeur général des radios musicales de RTL Group, Fun Radio et RTL2.
Pourtant, la multiplication des nouveaux supports modifie les comportements des auditeurs en général, des moins de 25 ans en particulier. Cette évolution pousse à innover pour essayer de renouveler les publics. Sans remettre en cause fondamentalement le média: «Les jeunes continuent d’écouter la radio, en particulier les musicales, se réjouit  Christopher Baldelli, PDG des radios de RTL Group. Les pratiques ne changent pas radicalement, c’est juste l’équipement qui est différent.» Selon Médiamétrie, les moins de 25 ans restent attachés au média. Et «sur le web, le live domine, précise Thomas Karolak, directeur exécutif de RTL Net. Le replay se développe moins vite qu’en télévision.»
Le smartphone est aussi une opportunité pour les marques radios. Aux Etats-Unis, «66% des auditeurs écoutent la radio sur leur portable au moins une fois par semaine», note Gwenaelle Le Cocguen, directrice des activités numériques d'Europe 1 et du pôle radio-TV de Lagardère Active. L’audience sur mobile de la station «a doublé en un an, avec un utilisateur d’application qui y revient en moyenne 80 fois par mois», évalue-t-elle. Seulement la moitié des Français étant équipés d’un tel appareil, «cela laisse un large potentiel de croissance pour un support qui met une radio dans la poche de chacun», selon Jean-Paul Baudecroux, PDG de NRJ Group. Fort de ses quatre stations et de ses 220 webradios, celui-ci revendique le leadership pour l’écoute sur le mobile. Une écoute qui «permet de voter, de partager, et bénéficie aujourd’hui d’une qualité de son, avec l'ultra HD 576KB».

Marques prescriptrices

Radio France peine à toucher les moins de 30 ans, comme l'illustre Le Mouv, pourtant sous la tutelle depuis un an de la direction des nouveaux médias. «L’antenne n'avait pas de contenus proches du public visé», diagnostique Serge Schick, directeur délégué au marketing stratégique et au développement du groupe. D’où le travail de repositionnement mené récemment, qui se traduit par une nouvelle ligne musicale, un nouveau nom, Mouv, et de nouvelles émissions à partir du 2 février. Mais «le service public doit prendre pied dans le monde des applis, avec des thématiques intéressant les jeunes», précise le directeur de Mouv, Bruno Laforestrie. Il lancera en février une application pour la musique, avec des complémentaires au flux radio, comme les clips diffusés sur You Tube. Le smartphone, récepteur de la nouvelle génération, «donne accès à un univers très concurrentiel, où la notoriété des médias historiques constitue un avantage, admet Roberto Ciurleo, directeur délégué de Virgin Radio. Mais où You Tube est le premier moyen pour consommer de la musique», nuance-t-il.

Il faut y ajouter les services de streaming musical, comme Deezer, Spotify..., auxquels seraient désormais abonnés 2 millions de Français, dont les deux tiers via leur abonnement téléphonique, précisait le 19 janvier dernier Pascal Nègre, PDG d’Universal Music France. Cependant, «ce sont d’abord des plates-formes. Face au manque de temps et d’expertise, le consommateur fait confiance à quelques marques prescriptrices, comme nos radios», soutient Tristan Jurgensen, de RTL. Une récente étude de Melty montrait d'ailleurs que les découvertes musicales des moins de 30 ans se font à 50% à la radio, à 48% sur les sites vidéos et à 19% sur les sites de streaming vidéos. Les responsables des réseaux musicaux comptent également sur leurs programmes. «Ces contenus uniques feront toujours de l’audience, estime Roberto Ciurleo, de Virgin. D’ailleurs, jamais les mornings n’ont été aussi forts.»

Plus que les contenus, «la radio est confrontée à un problème de distribution, analyse Laurent Guimier, directeur de France Info. Il faut aller sur les supports que le public fréquente.» Le dirigeant prévoit pour fin janvier un service de radio visuelle accessible via le player de Dailymotion, avec 80% de contenu s'appuyant sur du texte, plus de l’image, animée ou pas. Puis un compte Twitter «utilisé comme un canal d’information plutôt que pour les commentaires. Il s’agit d’y pousser l’info, d’intégrer du son comme cela se fait déjà pour la vidéo avec les “twitter cards”, d’être dans la logique d’un site», annonce le responsable de la radio d’information. Il espère ainsi «développer le réflexe France Info chez l’internaute, pour en faire un auditeur quand il montera dans sa voiture».

Quant à faire du jeune un auditeur à long terme, en particulier des radios adultes, «l’audience n’appartient à personne, rappelle Franck Lanoux, de RMC. Le meilleur moyen reste de continuer à produire des programmes qui l’intéresse.»
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