Reportages sur le terrain, caméras high-tech, studio multi-plateau, people... France 2 a battu TF1 en audience lors de la soirée du second tour de la présidentielle. Retour sur l'événement avec Loïc de La Mornais, président de la Société des journalistes de la chaîne publique.

Dimanche 6 mai, France 2 a de nouveau battu TF1 lors de la soirée électorale du deuxième tour de l'élection présidentielle, avec 5,8 millions de téléspectateurs contre 4,6 millions sur TF1, selon Médiamétrie. A 20 heures, les deux chaînes étaient pourtant presque au même niveau, avec même un léger avantage à TF1 qui rassemblait alors 11,4 millions de personnes contre 10,9 pour France 2.

 

De quoi provoquer un certain mécontentement au sein de la première chaîne où, selon un de ses cadres dirigeants, «TF1 se doit de produire les meilleurs contenus lors d'un événement de cette importance alors qu'il n'y a aujourd'hui plus aucune critique sur la ligne éditoriale de l'antenne». Selon TV Magazine, la Une se serait même mise en quête d'un nouveau patron de l'information et lorgnerait Thierry Thuillier, à France Télévisions, et Guillaume Dubois, à BFM TV.

 

Comment France 2 est-elle arrivée à battre sa rivale alors que le débat de l'entre-deux tours avait déjà montré, le 2 mai, que la chaîne publique réunissait 9 millions de téléspectateurs (33% de part d'audience) quand la Une devait se contenter de 8,1 million (29,8%)? Serait-ce parce que le 20 heures de la Deux est plus en affinité avec les électeurs de François Hollande (qui réunit 36% des téléspectateurs du JT sur la base du premier tour contre 17% au 20 heures de TF1, selon un sondage Ifop pour Marianne)?

 

«Il y a peut-être de ça mais c'est indémontrable , estime Jean-Louis Missika, sociologue des médias à l'Institut d'études politiques et adjoint au maire PS de Paris. Il y a une sensibilité plus à gauche des téléspectateurs du service public de l'audiovisuel mais l'érosion du JT de 20 heures de TF1 correspond à des tendances de fond, liées à l'âge, aux pratiques et à la consommation média.»

 

«La chaîne des opérations spéciales»

 

Loïc de La Mornais, président de la Société des journalistes de France 2, présent en direct durant sept heures place de la Bastille, à Paris, explique de son côté que le score d'audience de sa chaîne est d'abord la résultante d'«une dynamique de fond depuis plusieurs années» après les mariages princiers à Monaco et Londres à la mi-2011.

 

«France 2 est devenue la chaîne des opérations spéciales lors des grands événements, explique-t-il. Il y a un effet d'entraînement. J'ai pu le constater le 6 mai à la Bastille. Même s'il y a peut-être un tropisme service public, les organisateurs du PS avaient choisi France 2 pour retransmettre la soirée sur des écrans géants. Les jeunes envoyaient des SMS à leurs parents pour dire de regarder la chaîne où ils étaient présents. Avant, on se battait pour avoir des têtes d'affiche en plateau. Mais à l'approche du second tour, les hommes politiques préféraient aller sur France 2 plutôt que sur TF1.»

 

La réussite d'audience de sa soirée, la chaîne publique la doit aussi à une nouvelle technologie, une petite caméra 3G capable de filmer en direct à l'intérieur des bâtiments en passant par le réseau téléphonique. C'est ce qui a permis aux téléspectateurs de découvrir François Hollande, en train de travailler sur son discours peu après 20 heures, en sa mairie de Tulle. De même, c'est ce type de caméra qui a retransmis en instantané l'appel téléphonique estampillé «papa» sur l'Iphone de Thomas Hollande, le fils du président élu qui fut aussi le premier à donner sa réaction après 20 heures.

 

Parallèllement, TF1 diffusait une interview de François Hollande enregistrée la veille.

 

Au fait, ne serait-ce pas un brin politique-people et infotainement, ce type de plan-gadget?

«Il n'y a pas eu de remous sur cette question à la rédaction, assure Loïc de La Mornais. France 2 est contente d'avoir été la chaîne référente de la soirée. On ne considère pas que cela appauvrit le débat. A côté des débats politiques, où il y a toutes les têtes d'affiche, il faut sortir des studios et faire vivre l'événement. Ce sont deux exercices complémentaires.»

 

En studio, l'apparition d'un nouveau décor avec des plateaux multiples en étages réunissant d'un côté David Pujadas avec ses invités et de l'autre Laurent Delahousse avec Fabien Namias et Brice Teinturier (Ipsos), ont donné le sentiment de multiplier les points de vue. «Il y avait chez nous un rythme beaucoup plus soutenu, conclut le président de la SDJ. On zappait plus vite d'une séquence à l'autre alors que TF1 paraissait plus calme.»

 

Après le succès de l'émission "Des paroles et des actes", qui a réuni sur vingt-six heures en moyenne 4,4 millions de téléspectateurs du 1er janvier à la veille du premier tour (+157 000 téléspectateurs par rapport à "A vous de juger" en 2007, qui ne comportait que 13 heures d'émission), France 2 s'est imposée face à TF1, qui ne réalise que 3,8 millions de téléspectateurs, soit deux fois moins qu'il y a cinq ans.

 

Dans un communiqué publié lundi 7 mai, le groupe France Télévisions affirme que la Deux est «désormais la chaîne préférée des Français pour suivre les événements et les grands rendez-vous politiques avec 5,5 millions de téléspectateurs pour 26,6 % de part d'audience».

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