La détenue française remise en liberté par la justice mexicaine en raison d'irrégularités de procédure a généré davantage de bruit médiatique que l'ex-otage Ingrid Betancourt quand elle a été libérée de ses ravisseurs par les forces armées colombiennes.

Mieux qu'Ingrid Betancourt, bien au-delà de l'exil fiscal de Gérard Depardieu, un chouïa en dessous de la mort de Michael Jackson et pas très loin de l'intervention militaire française au Mali, tel est le bilan que Kantar Media tire de la couverture par les médias français de la libération de Florence Cassez, emprisonnée pendant sept ans au Mexique pour enlèvement et séquestration. Pour l'institut, qui mesure le bruit médiatique des événements sous forme d'Unité de bruit médiatique (UBM), la remise en liberté de l'ancienne détenue atteint 1637 UBM, contre 1566 pour la fin de l'enlèvement d'Ingrid Betancourt, en 2008.

 

«Tout se passe comme si chaque Français avait reçu 16 fois l'information le 24 janvier, explique Sonia Metché, directrice des études du pôle information de Kantar Media. C'est considérable. On ne dépasse généralement 1000 UBM qu'en situation de crise ou d'exploit.» 

 

La responsable d'études souligne que la fin de la détention de Florence Cassez, suivie de son retour en France, est le deuxième sujet ayant généré le plus de bruit médiatique en janvier, après l'intervention militaire au Mali (au-dessus de 2000 UBM). L'exil fiscal de Gérard Depardieu fait moins bien (700 au plus haut), mais s'inscrit davantage dans la durée.

Cependant, l'inculpation de Dominique Strauss-Kahn (2900), la mort d'Oussama Ben Laden (entre 2000 et 3000) et le décès de Michael Jackson (1700) ont fait mieux en termes de bruit médiatique. 

 

Déséquilibre médiatique

 

Ces données chiffrées apparaissent alors que le retentissement en France de la libération de Florence Cassez commence à susciter des critiques. Sur Le Plus du Nouvel Obs, l'éditorialiste mexicain Emilio Lezama signe un article intitulé «Florence Cassez libre: un discours français plein d'arrogance». Dans Rue 89, Daniel Schneidermann estime que suivant qu'ils étaient français ou mexicains, les médias se sont comportés en "machine à lyncher ou la chambre d'enregistrement d'un comité de soutien". Blandine Grosjean, rédactrice en chef adjointe du site, a aussi vu dans ce traitement hyperbolique "LA cause du moment d'un microcosme parisien qui l'utilise politiquement", jugeant "déprimant que la France ait déroulé le tapis rouge pour Florence Cassez".

 

On en sait aujourd'hui beaucoup sur le traitement médiatique inéquitable dont a été victime au Mexique Florence Cassez. La Française a été contrainte de jouer devant les caméras de Télévisa et de TV Azteca la mise en scène de son arrestation, avant qu'elle ne décide d'intervenir en direct à la télévision nationale pour dénoncer cette manipulation. Elle a même obtenu de Genaro Garcia Luna, le chef de la police, responsable de son arrestation, des aveux sur la fabrication médiatique de son interpellation.

 

A cette couverture partiale et instrumentalisée au Mexique semble avoir répondu l'orchestration médiatique d'une innocence abondemment relayée par les chaînes d'information qui ont créé des éditions spéciales sur "l'événement", depuis le mercredi 23 janvier au soir jusqu'au vendredi 25 janvier en fin d'après-midi, pour l'entrevue de Florence Cassez à l'Elysée avec François Hollande. Lundi 28 janvier, la nouvelle héroïne des médias étaient encore suivie par les caméras de BFM TV pour un déjeuner avec Nicolas Sarkozy.

 

Rappelons que l'ancienne détenue française n'a pas été innocentée mais libérée pour des irrégularités de procédure dans le respect des droits de la défense. A la différence de l'ex-otage franco-colombienne Ingrid Betancourt, elle n'a pas été enlevée mais accusée de complicité d'enlèvement. Elle ne s'est pas présentée à l'élection présidentielle de son pays et n'a jamais joué de rôle politique.

 

Le jeudi 24 janvier au matin, quelques heures avant que n'atterrisse à Roissy l'avion de Florence Cassez se posait celui qui transportait la dépouille de Yann Desjeux, l'otage français exécuté en Algérie. La ministre déléguée des Français de l'étranger, Hélène Conway-Mouret, était présente. Laurent Fabius, le chef de la diplomatie française, avait préféré réserver sa présence à l'accueil de Florence Cassez.

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