L'actu vue par...
L’année 2020 vue par Delphine Ernotte-Cunci, présidente de France Télévisions.

Le Covid-19, les vaccins et la communication du gouvernement face aux infox.

Ce sont dans les périodes de crise que les infox circulent avec le plus de virulence. Les rumeurs, les théories complotistes peuvent alors malheureusement l’emporter sur les faits et les chiffres. Je crois que tous les gouvernements du monde ont été soumis aux mêmes difficultés et pressions, et tous les citoyens, aux mêmes interrogations. Face à ça, le rôle de la TV publique a été de remettre la parole des experts et des scientifiques au centre du jeu, de réintroduire de la rationalité dans le débat. Nous avons aussi veillé à dialoguer avec les publics pour répondre à leurs très nombreuses questions sur la crise, les mesures sanitaires… La confiance que la TV publique inspire à ceux qui la regardent est l’un des meilleurs remparts face aux infox.

 

La sortie du confinement et les perturbations multiples dans le monde de la culture.

Depuis des mois, nous avons le sentiment que notre monde perd un peu de son âme sous le poids de cette pandémie. La culture sous toutes ses formes crée du lien et donne du sens, et bien sûr que les salles de cinéma et de théâtre nous manquent. Face à l’isolement lié au confinement et à la fermeture des salles, France Télévisions a cherché à être aux côtés des citoyens et des artistes, avec une programmation de cinéma, d’opéra ou de théâtre exceptionnelle. Nous allons poursuivre cette « offensive » culturelle en 2021 car nos publics nous le demandent.

 

Le projet de loi sur la sécurité globale et les menaces qu’il fait peser sur la liberté de la presse.

Ce projet a suscité une grande émotion dans toutes les rédactions et je la partage. Bien sûr, nos policiers font un travail essentiel pour protéger les citoyens. Mais les journalistes font tout autant, avec rigueur et déontologie, un travail d’explication et d’investigation vital. Opposer ces deux missions essentielles à notre démocratie m’apparaît vain. Dans les deux cas, il s’agit de protéger des droits fondamentaux pour tous les citoyens : la sécurité civile d’un côté, la liberté d’informer de l’autre.

 

Les records d’audience de la télévision pendant le confinement.

Depuis mon arrivée à la tête de France Télévisions il y a cinq ans, j’entends ici ou là la théorie de la mort lente et inéluctable de la télévision. À nouveau, le confinement a démontré que ces oiseaux de mauvais augure avaient tort. En 2020 en moyenne, près de 45 millions de Français l’ont regardée tous les jours près de quatre heures. La TV continuera à jouer ce rôle de lien social et de lieu de rassemblement des familles. Les plateformes gagnent du terrain, mais le lien chaleureux, quotidien et presque intime, qu’apporte la télévision au sein des foyers est essentiel à beaucoup de nos téléspectateurs.

 

Le monde des médias durement touché par la baisse des recettes publicitaires.

Même si France Télévisions est majoritairement financée par de la ressource publique, la chute brutale du marché publicitaire nous a aussi assez durement affectés. Il faut rester vigilant, car ce sont ces ressources qui permettent aux médias de financer la création, le cinéma et les auteurs français. C’est tout l’écosystème français de création qui est impacté.

 

Le futur projet de loi de Barbara Pompili et ses conséquences pour la publicité.

Je pense que la publicité peut participer, à son échelle, aux changements de comportement des Français. Par exemple, en faisant de plus en plus la promotion des voitures propres, qui représentent déjà près de 30% de nos publicités automobiles. Attention toutefois aux deux poids deux mesures, entre des médias traditionnels déjà très régulés – et c’est bien normal - et le far west que l’on peut encore observer sur les réseaux sociaux et les plateformes en matière publicitaire.

 

L’élection de Joe Biden sur fond de contestation des résultats par Donald Trump.

Au soir du 3 novembre, nous avons tous craint que l’une des plus grandes démocraties au monde vacille, sous les coups de boutoir du président. Au final, elle a tenu bon et heureusement. Là-bas, ce sont les médias qui annoncent les résultats. Cela peut paraître étrange vu de France, mais quelle que soit leur tendance partisane, ils ont joué le jeu de la démocratie. C’est rassurant sur l’état du pays. C’est la fonction du 4e pouvoir en démocratie, il est central.

 

BalanceTonAgency, ou le mouvement de libération de la parole des femmes qui gagne le monde de la pub.

Je soutiens évidemment tout ce qui permet la libération de la parole des femmes. Je soutiens ces initiatives par conviction mais aussi dans l’action : comex paritaire depuis mon arrivée, introduction d’un quota de femmes réalisatrices dans nos fictions, parité des femmes expertes qui interviennent à l’antenne… Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.

 

La montée en puissance de Vivendi dans les médias avec l’ouverture de négociations exclusives avec Prisma et le retour au centre du jeu de Canal+ sur les droits du foot.

Face à l’hégémonie des acteurs américains et chinois dans les domaines de la tech et des médias, l’Europe doit protéger ses champions. On l’a connu lors de l’appel d’offres sur Roland Garros il y a quelque temps, où Amazon a récupéré une partie des droits. Je ne cesse de le dire : attention, pour des logiques strictement financières, à ne pas désarmer les acteurs locaux. L’épisode des droits de la Ligue 1 en apporte une nouvelle preuve éclatante. La riposte passera aussi nécessairement par des concentrations ou des alliances comme nous l’avons fait avec TF1 et M6 sur Salto.

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