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D'anciennes voix de la radio comme Anne Sinclair ou Jean-Michel Aphatie se sont déclarées « solidaires » de la grève qui a commencé ce week-end par de faibles perturbations à l'antenne. Mais la grille a commencé à être sérieusement altérée, l'émission Culture Médias de Philippe Vandel étant remplacée à 9h par deux heures de musique, ponctuées de spots publicitaires.

Une cinquantaine d'anciens d'Europe 1 ont exprimé dimanche leur « solidarité » envers leurs confrères de la station, en grève depuis vendredi, dénonçant le « danger grave et imminent » menaçant selon eux la radio du groupe Lagardère, « sous la pression de Vincent Bolloré », son actionnaire principal.

Dans une tribune publiée sur le site du Monde, Philippe Alfonsi, Anne Sinclair, Ivan Levaï, Stéphane Paoli ou encore Jean-Michel Aphatie s'inquiètent de « l'instauration » d'une « ligne éditoriale partisane en rupture totale avec la longue histoire » d'Europe 1, alors que des ponts sont envisagés avec CNews, la chaîne d'information du groupe Canal+, filiale de Vivendi, contrôlé par le milliardaire Vincent Bolloré.

« Avant l'esprit Canal+, il y eut l'esprit Europe 1, souvent frondeur et impertinent, mais jamais partisan », écrivent les signataires du texte, apportant leur « solidarité totale » aux salariés de la station, en grève « pour la première fois en plus de soixante ans ». « Les responsabilités dans le désastre actuel » d'Europe 1 « sont multiples. Mais jamais son actionnaire principal n'avait tenté d'en faire un jouet politique partisan et un haut-parleur des haines qui agitent notre débat politique », s'alarment-ils.

Ces anciens de la station se disent en outre « particulièrement indignés par la violence faite » aux salariés voulant « exprimer simplement et clairement leurs inquiétudes légitimes ». 

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La grève a été votée vendredi en assemblée générale pour protester contre une procédure de sanction disciplinaire visant un journaliste, après une altercation avec une employée des ressources humaines, sur fond de malaise grandissant entre plan de départs et projet de rapprochement avec CNews. Elle a été reconduite pour une durée de 24 heures, lundi. La poursuite du mouvement a été décidée à la quasi-unanimité, indique-t-on de source syndicale.

Les grévistes réclament notamment que Constance Benqué, présidente de Lagardère News, vienne rencontrer la rédaction pour débattre avec elle de la clause de conscience permettant aux journalistes de quitter un titre avec des indemnités en cas de changement de ligne éditoriale.

Le mouvement a entraîné des perturbations « très minimes » à l'antenne samedi et dimanche, selon la direction.Il y aura peut-être « des petites répercussions sur la soirée électorale mais en aucun cas elle ne sera perturbée », avait ajouté la direction, sans se prononcer sur l'impact de la grève lundi matin, plus révélateur.

Selon elle, les programmes ont été diffusés quasiment normalement car la rédaction compte une majorité de non-grévistes. Plusieurs journalistes ont expliqué de leur côté que l'antenne du week-end était essentiellement assurée par des travailleurs précaires, car ce sont « essentiellement des CDD et des pigistes qui assurent l'antenne », d'après ce qu'a expliqué à l'AFP un journaliste qui a souhaité rester anonyme. Or, « les grévistes ont abondamment conseillé aux précaires de ne pas faire grève » par « peur des représailles », a-t-il ajouté.

Grille perturbée lundi matin

Des journaux semblent par ailleurs avoir été raccourcis et « meublés » avec « des interviews plus longues », a ajouté un de ses collègues. Lundi matin, à 9h10, après un journal, Philippe Vandel est venu annoncer à l'antenne qu'il n'était pas en mesure de présenter l'émission Culture Médias et qu'elle serait en conséquence remplacée par deux heures de musique, ponctuées de spots publicitaires. « Nous sommes tous là pour soutenir Europe 1 », a-t-il déclaré au micro.

En soutien aux grévistes et à la liberté de la presse, le SNJ-CGT et le SNRT-CGT Audiovisuel ont appelé à un rassemblement lundi à 9h devant le siège d'Europe 1 dans le XVe arrondissement de Paris.

Les salariés se sont réunis en assemblée générale à 10h pour décider des suites du mouvement. Sur 101 votants, 98 ont voté pour la reconduction de la grève, 3 personnes se sont prononcées contre, a précisé à l'AFP Olivier Samain, délégué syndical SNJ, annonçant une nouvelle assemblée générale mardi matin à 10H00.

Lundi, le mouvement, suivi par « 70% des journalistes, techniciens, programmateurs d'Europe 1 », d'après un gréviste, a eu un impact relatif sur les ondes, la plupart des programmes étant diffusés normalement grâce au remplacement des grévistes. Le matinalier Matthieu Belliard, gréviste qui va perdre l'animation de sa tranche à la rentrée, été remplacé par Pierre de Vilno. A l'exception de l'humoriste Nicolas Canteloup, qui a évoqué la grève au micro d'Europe 1, « pas un mot à l'antenne pour informer nos auditeurs », s'est indignée sur Twitter la Société des rédacteurs (SDR) de la radio, fustigeant « le mépris affiché pour les auditeurs et les salariés engagés », et ce malgré un débrayage massif.

La diffusion d'Europe Midi a pu être assurée par le présentateur Christophe Lamarre. Le journal de 13h a suivi avec notamment une interview sur "la santé au travail".

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