Spécial Régions
Gwenn Meynier, 28 ans, est le président d’An Drouizig. L’association, créée en 2003, préserve la langue bretonne en lui donnant une place dans le numérique et les nouvelles technologies : traduction de programmes, création de logiciels à reconnaissance vocale…

Quel rôle joue An Drouizig dans la sauvegarde de la langue bretonne ?

Si on veut que les Bretons puissent parler leur langue tous les jours, il faut adapter le numérique. An Drouizig créé des correcteurs orthographiques et traduit en breton des logiciels comme Libre Office, sorte de suite Office en libre accès. Aujourd’hui, on continue de traduire certains programmes et sites mais aussi travailler la reconnaissance vocale et certains jeux vidéo.



Des jeux vidéo en breton ?

Bien sûr ! Depuis quelques années, je m’amuse à les traduire. J’ai fait Minecraft, SuperTuxKart (un genre de Mario Kart, ndlr) et Steredenn et Flipon, deux jeux bretons. Tous des jeux assez populaires. C'est quelque chose que l'association ne faisait pas avant. J’ai réussi à les convaincre. J’en suis très fier. 



La traduction est-elle la seule manière de promouvoir la langue bretonne sur le numérique ?

Des associations pourraient aussi créer du contenu en breton sur les réseaux sociaux, publier des vidéos sur TikTok ou sous-titrer une série Netflix. De mon côté, j'anime des directs sur Twitch avec une particularité : ces directs sont entièrement brittophones. Il y a aussi toutes les nouvelles technologies, intéressantes à utiliser.



An Drouizig s’intéresse à ce domaine ?

Avec Mozilla, le créateur du navigateur Firefox, on travaille sur le projet Common Voice. Un logiciel de reconnaissance vocale en libre accès. Un genre d’assistant Google. Le fait qu’il soit disponible pour tous permet aux entreprises d’ajouter directement le programme dans leur code. C’est génial. Si ça intéresse Apple par exemple, demain, on pourrait même parler à Siri en breton.



Quand ce projet pourrait-il aboutir ?

Pas tout de suite (rires). Nous avons besoin de plusieurs centaines d’heures d’enregistrement où l’on peut entendre des phrases types comme « quelle météo fait-il aujourd’hui » ou « quelles sont les actualités ». Pour que le logiciel prenne tout son sens, il faut une grande diversité de participants, du jeune garçon qui apprend le breton à la personne âgée qui le maîtrise parfaitement. Il faut aussi mettre le logiciel à l’épreuve. S’enregistrer aussi bien dans des endroits silencieux que dans des fêtes foraines. Common Voice doit être capable de fonctionner dans n’importe quelle situation.



Quelle est la plus grosse difficulté que vous rencontrez en général ?

Il faut convaincre les développeurs de nous laisser traduire leur logiciel, ce qui n’est parfois pas une mince affaire. On peut aussi s’arracher les cheveux sur la traduction. Parfois, on tombe sur des mots qui n’ont pas d’équivalent breton. Pour être pris en compte par les acteurs du numérique, il faut une reconnaissance officielle. Le Catalan est l’exemple parfait. En France, le breton est simplement reconnu comme langue régionale.

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