La lecture de la décision du Conseil d’État, en date du 13 février, concernant CNews et l’Arcom, est instructive et permet de se faire une idée plus précise des motifs de la haute juridiction administrative.

On y constate d’abord sur le site de l’institution qu’elle a bien un « perdant », l’Arcom, face à Reporters sans frontières, comme en témoigne l’obligation qui lui est faite de verser 3 000 euros à l’association.

RSF se voit reconnaître par le juge avoir « qualité pour agir » en demandant une mise en demeure de CNews en 2021, contrairement à ce que soutenait le régulateur. Si la décision de l’Arcom n’est pas illégale en ce sens qu’elle est conforme au droit des libertés, si CNews est bien conforté en tant « service consacré à l’information », si des manquements à l’honnêteté de l’information sur la chaîne n’ont pu être établis ou ont entraîné des mises en garde du régulateur qui permettent au Conseil de dire que « l’Autorité n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation » sur ce point, l’Arcom est bien épinglé s’agissant des obligations de pluralisme de l’information.

« En s’en tenant ainsi à la seule prise en compte du temps d’antenne accordé aux personnalités politiques pour l’appréciation des obligations du service en matière de pluralisme de l’information, l’Arcom a fait une inexacte application des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 », est-il écrit.

Vision globale

De même, concernant l’indépendance de l’information (par rapport à l’actionnaire Bolloré), le juge reprend la même tournure de phrase pour estimer que « l’Arcom a fait une inexacte application des dispositions de la loi du 30 septembre 1986 » en ce sens que l’instance de régulation ne pouvait se défendre de mettre en demeure CNews au motif qu’elle ne pouvait intervenir que « si la matérialité d’un manquement était établie au cours d’une séquence identifiée ». Or, l’Arcom aurait dû se prononcer, estime le Conseil d’État, « non seulement au regard d’un programme donné, mais également au regard de l’ensemble de ses conditions de fonctionnement et de ses caractéristiques de programmation. »

En bref, c’est donc sur deux points clés que l’Autorité de régulation est épinglée pour avoir méconnu la loi à propos de CNews : le pluralisme et l’indépendance de l’information. Dans les deux cas, il lui est reproché de ne pas avoir exercé une vision globale dans son travail de régulateur, quand bien même l’Arcom affirme que la décision du Conseil d’État fait jurisprudence et qu’elle représente une nouvelle lecture de la loi de 1986 qui élargit désormais son rôle.